Des soldats suédois, en septembre 2016, sur l’île de Gotland. | SOREN ANDERSSON / AFP

Pour les jeunes Suédois, la trêve aura duré sept ans. Jeudi 2 mars, à Stockholm, le gouvernement a annoncé le rétablissement du service militaire, à partir du 1er janvier 2018. Treize mille filles et garçons, nés en 1999, seront convoqués dès cet été pour passer des tests. L’armée espère convaincre 4 000 volontaires de s’engager sur une période de neuf à douze mois. Si elle n’y parvient pas, elle utilisera la contrainte, afin de parer au manque de personnel dans les troupes.

« Dans le contexte sécuritaire actuel dans la région, nous ne pouvons pas nous permettre d’avoir une armée affaiblie », observe le député libéral Allan Widman. Président de la commission de la défense au Parlement, il mentionne « le redéploiement massif de la puissance militaire russe et l’agressivité de la politique menée par Moscou », qui justifient, selon lui, le retour du service militaire.

Signal d’alarme

Abolie en 2010, la conscription a été remplacée par une armée de métier, tournée vers les opérations de maintien de la paix à l’étranger. Stockholm comptait alors sur l’engagement de 4 000 soldats par an. Mais les candidats prêts à embrasser la carrière militaire ont été moins nombreux que prévus : 1 347 seulement en 2015.

« D’expérience, il est plus difficile pour un petit pays de se constituer une armée professionnelle, puisqu’il faut plus de candidats proportionnellement à la population que dans un pays plus peuplé », remarque Stefan Ring, spécialiste des questions de défense. La bonne santé du marché du travail n’aide pas, remarque-t-il : « Quand le chômage est faible, l’armée a plus de mal à recruter, surtout que le niveau des salaires n’y est absolument pas compétitif. »

La défense misait, par ailleurs, sur huit à dix ans de service. Les militaires restent finalement en moyenne cinq ans, avant de retourner à la vie civile. Beaucoup se sont engagés pour des missions à l’étranger, de plus en plus rares. Ils se retrouvent stationnés en Suède, à faire de la surveillance et des exercices, et finissent par démissionner.

Résultat : il manque à l’heure actuelle plus de 7 000 soldats et l’armée suédoise ne dispose d’aucune réserve. « Il y a cinq ans, un déficit pareil aurait pu être toléré, estime Stefan Ring. Mais vu les menaces qui pèsent désormais sur la Suède et sa sécurité, il est indispensable que nous disposions d’une armée suffisamment fournie, capable de défendre le pays. »

« Quand le chômage est faible, l’armée a plus de mal à recruter », remarque Stefan Ring, spécialiste des questions de défense

Le ministre de la défense, Peter Hultqvist, a fait savoir qu’il voulait donner la priorité aux volontaires, motivés. Mais s’il s’agit seulement de 4 000 conscrits en 2018, il pourrait falloir en recruter le double d’ici 2023, afin de compenser les départs en retraite des militaires professionnels et le vieillissement des réservistes.

Si un sondage réalisé en septembre montrait que 62 % des Suédois étaient favorables au retour du service militaire, les jeunes, eux, sont nombreux à s’opposer à ce qu’il soit obligatoire.

Mardi 28 février, le chef d’état-major, Micael Bydén, a tiré le signal d’alarme. Malgré les 10,2 milliards de couronnes (1 milliard d’euros) de rallonge budgétaire allouée à la défense en 2015, les caisses sont vides. Micael Bydén réclame 680 millions d’euros supplémentaires d’ici à 2020 pour assurer notamment la formation des conscrits.