Ivan Février, de dos, au rebond.

Quand certains sont encore sur les bancs du lycée, lui est champion d’Europe en titre de basket. Du haut de ses 2,04 m, Ivan Février quitte rarement sa tenue d’entraînement. A tout juste 18 ans – il les a fêtés le 8 février –, la pépite de la génération 1999 du Centre fédéral de l’Insep (Institut national du sport, de l’expertise et de la performance) apparaît décontractée sur le parquet du gymnase, à Vincennes, qui est sien depuis maintenant trois ans.

Son entraîneur, Jean-Aimé Toupane, ne manque pas de superlatifs lorsqu’il parle de la « tête de gondole » de son équipe évoluant dans le championnat de Nationale 1, soit juste en dessous de la Pro B. Avec presque 14 points par match, le meilleur scoreur du Centre fédéral a creusé son trou.

Fan des Lakers

Le basket, Ivan l’a découvert à 11 ans, après s’être essayé au cyclisme puis au football. Très vite, il « ne pouvait plus s’en passer ». Sous l’impulsion d’un père fan des Lakers qui lui montrait « tout le temps des vidéos de Karim Abdul Jabbar », il s’inscrit à l’OHM basket, dans le nord de la France, avant de rejoindre Bruay, où il décroche un titre de champion de France niveau départemental. Ce premier sacre lui permet de rejoindre la session sport-études de Liévin et le Creps de Wattignies à 15 ans. Puis, l’Insep est arrivé.

L’Insep réunit l’élite de la formation des jeunes sportifs français. Marie-José Pérec, Tony Parker, Teddy Riner, Amélie Mauresmo… presque tous les plus grands sont passés par-là. Mais le chemin vers la réussite n’est pas de tout repos. Il faut réussir à concilier un entraînement intensif avec les études. Les débuts peuvent être compliqués, surtout à 16 ans, lorsque l’on doit tout quitter pour donner un sens à sa passion. « Tu n’as pas le temps de souffler ! Il faut se lever à 7 heures du matin pour aller en cours, enchaîner par un entraînement à 11 heures, retourner en cours à 14 heures, se remettre en tenue pour un second entraînement à 18 heures… Et ce, tous les jours ! »

Avouant avoir eu « quelques difficultés à ne pas occulter le côté scolaire », le poste 4 confesse qu’il ne s’en serait peut-être pas sorti sans un triste fait de vie. Peu avant les vacances de Noël de sa première année de cursus, son père décède. « Cela a tout fait basculer, cet événement a été un énorme déclic. Mon exigence et mes objectifs ont décuplé, je n’en serais pas là où j’en suis si ça n’était pas arrivé. » Un discours que son entraîneur confirme. « Ivan ne se plaint jamais, c’est celui qui s’entraîne le plus. On est même parfois obligé de lui dire stop ! », explique Jean-Aimé Toupane.

Champion d’Europe, sa consécration

Cet acharné de travail, comme l’était Kobe Bryant – la célèbre star NBA des Los Angeles Lakers –, son « exemple », commence à remplir son armoire à trophées. Après avoir terminé cinquième du championnat du monde U17 en Espagne, Ivan a été surclassé pour jouer l’Euro avec l’équipe de France U18, en décembre 2016. Au milieu des dizaines d’observateurs de grands clubs européens et de franchises NBA, il a fallu surmonter « une pression qui peut-être paralysante. Ils sont impressionnants avec leurs logos qui font rêver ».

Ce qui n’a pas empêché le résultat d’être au niveau des attentes : les bleuets ont été sacrés champions d’Europe, en dominant la Lituanie en finale 75 à 68. « Quand le buzzer a résonné, on a vraiment eu l’impression d’être les meilleurs du monde. C’était un moment incroyable ! », raconte Ivan Février. L’entraîneur de l’équipe sacrée, Tahar Assed-Liegeon, qui depuis a pris la tête du Centre fédéral, confie avoir été plus qu’« heureux pour Ivan, parce que, quelque part, c’est un petit clin d’œil à son papa ».

C’est la quatrième fois que la France remporte cette compétition, après 1992, 2000 (génération Parker et Diaw) et 2006 (Batum). Un signe ? Le dernier fait de jeu d’Ivan Février est d’avoir été élu dans le 5 type de l’Adidas Next Generation Tournament, considéré comme « l’Euroligue des jeunes », aux côtés des plus grands espoirs européens.

« J’aimerais tenter ma chance en NBA »

A la fin de l’année scolaire, avec un bac ES en poche, Ivan aura terminé son cycle de trois années à l’Insep. Ambitieux, il sait que l’échéance qui approche sera déterminante pour la suite de sa carrière : « J’aimerais faire deux ou trois ans en France, prouver mon niveau en devenant l’un des dix meilleurs jeunes de Pro A, puis tenter ma chance aux Etats-Unis ! » La NBA, le mythique championnat américain, rêve de tous les jeunes basketteurs. Mais les encadrants, qui vantent « son énergie, sa polyvalence, sa capacité à prendre des rebonds et son tir extérieur », exercent aussi le rôle de garde-fou pour leurs jeunes joueurs.

L’après-Insep « est un environnement difficile à gérer avec les médias, la pression et les critiques », rappelle Jean-Aimé Toupane. Le directeur du centre, Tahar Assed-Liegeon, tient également à protéger ses basketteurs : « quand on leur dit tout ça, ce n’est pas pour les empêcher d’y aller, c’est justement parce que nous nous devons de prévenir le jour où ils n’iront pas. » Les anciens de l’Insep, ceux qui sont devenus pros, « ont toujours un petit mot pour nous, on est une grande famille », s’enthousiasme Ivan. En attendant la suite, trêve de rêveries, il est temps d’aller s’entraîner.