Le site de l’usine de production d’éoliennes de Montoir-de-Bretagne, près de Saint-Nazaire, construit par Bouygues, le 10 janvier. | LOIC VENANCE / AFP

Le 19 mai, date limite du dépôt des candidatures aux élections législatives des 11 et 18 juin, on saura combien de salariés du privé figurent parmi les candidats. Et il en faudrait beaucoup pour rééquilibrer l’Assemblée nationale. Parmi les 577 députés élus en 2012, 50 % sont issus du secteur public et parapublic, selon la Fondation pour la recherche sur les administrations et les politiques publiques (iFRAP). Le secteur privé (chefs d’entreprises, cadres et divers), en compose un quart, le reliquat comprenant des professions libérales comme les médecins, des agriculteurs ou des retraités.

Pourtant, le code du travail prévoit des mesures qui facilitent les candidatures des salariés du privé. Un dispositif qui a été amélioré dans quelques grands groupes, comme Michelin et Saint-Gobain. Depuis début janvier, c’est aussi le cas chez Bouygues (Colas, TF1, etc.). Son PDG, Martin Bouygues, a diffusé sur l’intranet du groupe un courrier présentant cette initiative, a révélé l’agence AEF, le 3 mars 2017. Le groupe souhaite aller plus loin que les droits légaux, écrit le dirigeant, « en mettant en place des mesures incitatives ».

Des conditions de travail aménagées

Concrètement, la loi prévoit, pour les candidats salariés, des absences autorisées non rémunérées de 20 jours ouvrables pour les élections nationales, et 10 jours pour les élections locales et européennes. Bouygues double ce quota, qui peut être pris sur le compte épargne-temps. Pour pouvoir suspendre son activité professionnelle, la loi prévoit que le salarié doit avoir au moins un an d’ancienneté et, par exemple, être maire ou adjoint d’une ville, président de département ou de région. La réintégration est possible à condition de ne pas avoir dépassé deux mandats. Bouygues, pour sa part, ne limite pas le nombre de mandats et réévalue le salaire en fonction de l’inflation.

Pour permettre d’exercer un mandat tout en continuant à travailler, la loi prévoit des absences qui ne peuvent pas, au total, excéder 803 heures 30 par an, soit 50 % de la durée légale. Chez Bouygues, les salariés peuvent, en outre, aménager leurs conditions de travail (télétravail, etc.) et leur temps de travail (forfait-jour, temps partiel).

« Une démarche citoyenne »

« Compte tenu de l’importance de la commande publique dans nos activités », souligne Martin Bouygues, les collaborateurs élus devront prêter « une attention toute particulière aux risques d’éventuels conflits d’intérêts. » FO, premier syndicat du groupe, applaudit : « On en a tous un peu marre d’avoir une classe politique totalement déconnectée de l’entreprise. » « L’idée est intéressante, juge Jean-Pascal François, secrétaire fédéral de la fédération CGT de la construction. Mais le but est de renforcer le lobbying, selon moi. »

« Nous n’avons pas d’intérêt direct dans ce dispositif, se défend-on chez Bouygues. C’est une démarche citoyenne. » Tout cela, « c’est de la com’ », dénonce Philippe Christmann, référent de la CGT construction pour Bouygues, qui préférerait que le groupe de construction développe la citoyenneté… au sein de l’entreprise.