Un visiteur du Mobile World Congress (MWC) à Barcelone, le 28 février 2017. | JOSEP LAGO / AFP

Une nouvelle offensive des opérateurs télécoms dans le domaine du mobile : mardi 14 mars, Free a annoncé l’enrichissement de son forfait traditionnel facturé 19,99 euros par mois (15,99 euros pour les abonnés Freebox). Désormais, pour ce même tarif, les communications en Europe et dans un certain nombre de pays, parmi lesquels les Etats-Unis, le Canada, Israël et l’Australie seront incluses. Surtout, les clients de Free disposeront de 5 gigaoctets de données à l’étranger, en plus des 50 gigas déjà compris dans les forfaits.

Pour l’occasion, Xavier Niel (actionnaire du Monde à titre personnel) a même pris la peine d’annoncer (en anglais) cette nouvelle offre sur Twitter. « #Free abolit les charges de #roaming [ces surfacturations payées sur les communications à l’étranger] », s’est félicité le fondateur de Free, habituellement discret sur le réseau social. Au passage, l’homme d’affaires a taclé son concurrent SFR, en ajoutant que « 5 gigas sur un mois aux US [coûtait] 45 000 euros pour un abonné Red/SFR. La révolution, c’est maintenant ».

Chez SFR, la réponse ne s’est pas fait attendre. En fin de journée, l’opérateur, propriété de Patrick Drahi, s’est fendu d’un communiqué rappelant qu’il n’avait pas attendu pour offrir des frais de « roaming » dans ses forfaits Red d’entrée de gamme, à 15 euros par mois. Lui aussi enrichit son offre. A ce tarif, les clients auront également accès au « roaming 100 % » en Europe, et surtout en Amérique du Nord. Le client Red aura droit à « 10 gigas supplémentaires en roaming », soit un total de 15 gigas en 4G.

Ironie de l’histoire, avec ces offres, les opérateurs transforment en argument marketing les nouvelles obligations imposées par la Commission européenne. A partir du 15 juin prochain, les frais d’itinérance, facturés lorsque le consommateur appelle ou surfe sur Internet sur son mobile depuis un autre pays européen, disparaissent.

« Jeu tactique »

Le mouvement était lancé depuis longtemps, l’Europe ayant progressivement plafonné ces charges, et donc réduit les revenus des opérateurs. « C’est bien de voir des offres des opérateurs télécoms qui reflètent déjà la fin des frais de roaming, au sein et au-delà de l’Union », a lancé sur Twitter Andrus Ansip, vice-président de la Commission européenne, en charge du marché unique du numérique.

« L’offre Free ne fait qu’anticiper ce qu’il va se passer. C’est un jeu tactique à qui dégaine le premier pour prendre des parts de marché », analyse Sylvain Chevallier, expert au sein du cabinet de conseil BearingPoint. « Tous les opérateurs s’y préparent depuis des mois. La preuve, c’est que SFR était également prêt. »

Les offres comprenant une part plus ou moins grande de « roaming » existent déjà dans les forfaits haut de gamme. C’est le cas chez Orange pour 56,99 euros (Play) ou 69,99 euros (Jet) par mois. Pour ce dernier tarif, le voyageur peut téléphoner et surfer de manière illimitée en Europe, ce qui fait dire à Sylvain Chevallier que pour le moment « l’offre Free ne devrait pas avoir d’impact sur le “premium”, qui reste mieux disant ».

Pour se distinguer de ses concurrents, Free a décidé d’inclure dans ses offres de nombreux pays non européens. Un calcul délicat dans la mesure où l’opérateur continuera de payer des frais d’itinérance à l’opérateur étranger pour les consommations de son client. « Les opérateurs ne peuvent pas proposer n’importe quel pays. L’itinérance aux Etats-Unis ne coûte pas cher, contrairement à d’autres zones, comme l’Afrique ou les destinations soleil », précise M. Chevallier. Mais en s’adressant au grand public, Free et SFR limitent les risques. Car, pour le moment, ce sont surtout les professionnels qui téléphonent à l’étranger.