Protestation de chauffeurs près de la préfecture de Bordeaux, le 26 janvier 2016. | GEORGES GOBET / AFP

Les discussions entre la plate-forme de réservation de voitures Uber et les conducteurs de véhicules de tourisme avec chauffeurs (VTC) ont tourné court, mercredi 15 mars au soir. Le groupe emblématique du secteur oppose un « refus » aux revendications tarifaires, sans « rien proposer » à la place, selon les représentants des chauffeurs.

Uber avait accepté, le 20 février, le principe d’une discussion sur les tarifs, préoccupation principale des chauffeurs. Ces derniers sont mobilisés depuis plusieurs mois pour dénoncer leurs conditions de travail et la « paupérisation » de la profession.

« Une désillusion »

Mais après plus de cinq heures et demie de réunion dans un hôtel parisien, les syndicats de chauffeurs tirent un constat d’échec. Au nom de l’intersyndicale (CFDT, Actif-VTC et UDCF), Fabian Tosolini se dit « en colère » :

« C’est une désillusion. (…) Le fait qu’Uber vienne sans aucune proposition chiffrée montre que cette entreprise n’est pas mûre pour la négociation. »

Hassan Benbarak, de CAPA-VTC, appelle, quant à lui, l’Etat à « prendre la main » pour « imposer une réglementation tarifaire minimum, comme pour les taxis ». « La suite logique », également, pour Sayah Baaroun, de SCP-VTC - UNSA. Pour ces deux organisations syndicale, sorties de l’intersyndicale depuis la médiation menée en janvier à la demande du gouvernement, « il n’y aura pas de deuxième réunion ».

Pour M. Tosolini, de la CFDT-Transports, « la porte n’est pas fermée, mais si ça continue, on devra passer par un processus législatif ». Après la réunion, Uber a promis par e-mail des propositions concrètes dans les jours à venir, ont rapporté deux participants.

Peur de perdre des clients

Selon les représentants syndicaux des chauffeurs, Uber a argué qu’il ne pouvait pas bouger ses prix « par peur de perdre des clients ». « Son interlocuteur principal, c’est le client. Il n’a aucune reconnaissance pour les chauffeurs », relève M. Tosolini, qui a appelé les clients d’Uber « à une prise de conscience collective ».

L’intersyndicale demandait à Uber le retour à une commission de 20 % – au lieu de 25 % –, un minimum de course à 8 euros – contre 6 euros actuellement –, un relèvement des prix au kilomètre et à la minute, ainsi que la rémunération du temps d’attente des clients, qui n’est actuellement pas facturé.

Salariat déguisé

CAPA-VTC et le SCP-VTC - UNSA revendiquaient de leur côté un minimum de course à 12 euros, ainsi que le droit pour les professionnels de fixer les prix. Le SCP-VTC - UNSA, qui réclame « un seuil de dignité », interpelle les candidats à l’élection présidentielle sur ce qu’il considère comme une forme de salariat déguisé.

Ce syndicat est solidaire d’un premier appel à la mobilisation des coursiers à vélo, suivi mercredi soir par une cinquantaine d’entre eux à Paris, une trentaine à Bordeaux et une vingtaine à Lyon, selon l’Agence France-Presse. « Le début d’un mouvement », espère un porte-parole du collectif parisien, pour qui les coursiers sont « des employés » et non « des sous-traitants, comme les plates-formes nous le font croire ».

Associations et syndicats de VTC dénoncent depuis plusieurs mois la dégradation des revenus des chauffeurs, très faibles au regard du volume d’heures travaillées. Selon les calculs du médiateur, un chauffeur indépendant doit travailler soixante heures par semaine et savoir maîtriser ses charges pour gagner 1 700 euros net mensuels, hors congés et couverture maladie ou accident.

La loi Grandguillaume a été votée à la fin de décembre en réponse aux mouvements sociaux déclenchés ces derniers mois par les chauffeurs de taxis, de VTC et de véhicules LOTI (loi d’orientation des transports intérieurs – transport collectif à la demande), qui se disputent une même clientèle. Ce texte précise notamment les obligations des plates-formes de VTC, leur interdisant, entre autres, d’imposer des clauses d’exclusivité aux chauffeurs.