Mark Rutte devant ses supporteurs à La Hague, le 15 mars. | YVES HERMAN/REUTERS

Editorial du « Monde ». Et de deux. Après l’Autriche, où les électeurs ont confirmé en décembre 2016 leur préférence pour un président écologiste sur un candidat d’extrême droite, les Pays-Bas ont apporté, mercredi 15 mars, une nouvelle preuve de la vigueur de la résistance démocratique à la montée du populisme anti-européen.

Dans cette bataille essentielle qui se livre dans les démocraties occidentales, les électeurs néerlandais ont marqué plusieurs points importants. Par leur participation au scrutin législatif, d’abord : près de 78 % d’entre eux sont allés voter. Ce chiffre en hausse traduit à la fois la prise de conscience de l’enjeu du scrutin et l’engagement des citoyens dans le processus démocratique : ce sont là deux éléments rassurants.

Par le résultat lui-même, ensuite. Le parti de centre droit du premier ministre Mark Rutte, le Parti populaire, remporte une nette victoire, avec 33 sièges, sur le parti d’extrême droite de Geert Wilders, le Parti pour la liberté, qui arrive en seconde position, avec 20 sièges, dans un Parlement qui en compte 150. La mobilisation pro-européenne prive donc M. Wilders et son discours xénophobe autant qu’europhobe de la victoire annoncée : c’est la leçon la plus spectaculaire du scrutin.

Qui est Geert Wilders, le leader de l’extrême droite néerlandaise ?
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Le parti écologique Gauche verte, le plus grand gagnant

Car c’est une autre leçon remarquable de l’élection aux Pays-Bas : la poussée des partis pro-européens. Avec 19 sièges chacun, deux partis libéraux, l’Appel chrétien-démocrate (CDA) et le parti réformateur D66, enregistrent des progrès importants en nombre de sièges par rapport au scrutin de 2012 ; le plus grand gagnant à cet égard est le parti écologiste Gauche verte, qui, sous la houlette de son charismatique dirigeant, Jesse Klaver, passera dans le futur Parlement de 4 à 14 députés.

Enfin, l’effondrement du Parti travailliste, le parti social-démocrate dont est notamment membre le vice-président de la Commission européenne Frans Timmermans, qui perd 29 sièges en passant de 38 à 9, illustre le naufrage de cette mouvance en Europe. Cette chute, parallèlement à la fragmentation des forces politiques, sont le signe d’un paysage politique en cours de recomposition, comme on le voit ailleurs en Europe.

L’envers du décor, cependant, ne recèle pas que des bonnes nouvelles pour M. Rutte. Même si ces élections vont lui permettre, cette fois-ci, de se passer d’alliances douteuses avec l’extrême droite, celle-ci n’a pas dit son dernier mot. Comme l’a dit M. Wilders lui-même, on ne remet pas si facilement « le génie dans la lampe ». Le dirigeant populiste a imposé ses thèmes, amenant même M. Rutte à le suivre parfois dangereusement sur son propre terrain. Il demeurera une force importante aux Pays Bas.

Il reste que, après une année marquée par le Brexit et l’élection de Donald Trump, le verdict des électeurs néerlandais apporte un message pro-européen et antipopuliste bienvenu. Le président François Hollande s’est empressé de saluer cette « victoire claire contre l’extrémisme ». On devine, derrière ce message, l’espoir que, après l’Autriche et les Pays-Bas, la France confirme en mai le coup d’arrêt à la vague europhobe.