Le ministre de l’intérieur, Bruno Le Roux, le 20 mars, à Rome. | TIZIANA FABI / AFP

Deux mois après le début de l’affaire Fillon, Bruno Le Roux est à son tour au centre de la polémique : d’après les révélations de l’émission Quotidien, lundi 20 mars sur TMC, le ministre de l’intérieur a employé ses deux filles adolescentes comme collaboratrices parlementaires. Bruno Le Roux doit s’expliquer ce mardi devant Bernard Cazeneuve, a déclaré l’entourage du premier ministre.

Selon Quotidien, l’actuel locataire de la place Beauvau a employé ses filles, alors qu’elles étaient lycéennes puis étudiantes, en cumulant respectivement 14 et 10 CDD entre 2009 et 2016, pour un montant total de quelque 55 000 euros. Elles n’avaient, lors des premiers contrats, que 15 ans et 16 ans. Certains CDD ont pu avoir lieu en même temps que des stages en entreprise ou sur le temps universitaire, à l’été 2013 pour l’une des filles, vingt jours en mai 2015 pour l’autre, affirme l’émission de Yann Barthès.

Cité dans le reportage de l’émission, le ministre reconnaît leur embauche ponctuelle, en contrat à durée déterminée, alors qu’il était député de Seine-Saint-Denis : « Bien entendu, j’ai mes filles qui ont travaillé avec moi sur des étés, notamment, ou des périodes de vacances scolaires, mais jamais en permanence. »

« Chaque contrat faisait l’objet de missions qui ont été honorées », a assuré le cabinet du ministre à Quotidien. Des missions « effectuées en horaires renforcés avant et après le stage, et en travail à distance durant le stage (travail de rédaction, mise à jour de fichiers, recherches, etc.) et durant plusieurs jours supplémentaires à l’automne », a-t-il ajouté.

Bruno Le Roux se défend toutefois d’un « amalgame » avec l’affaire Fillon – mis en examen le mars pour « détournement de fonds publics », « complicité et recel de détournement de fonds publics » –, puisqu’il s’agit, selon lui, « d’un boulot d’été auprès d’un parlementaire ».

Bruno Retailleau, le coordinateur de la campagne de François Fillon, a semblé ne pas vouloir accabler Bruno Le Roux mardi. « On a toujours dit que cette pratique, qui vise pour un parlementaire à employer ses enfants ou ses proches, était très répandue », a botté en touche le sénateur Les Républicains sur France 2.

« Je ne ferai pas plus de commentaires, parce qu’il faut parler du fond. On a trop souffert nous-mêmes de ces débats-là qui tiraient vers le bas la politique pour ne justement pas utiliser ces ficelles. »

Interrogé sur une éventuelle démission du ministre de l’intérieur, Bernard Accoyer, secrétaire général des Républicains, a déclaré : « S’il y a des faits qui le justifient, la réponse est oui, mais n’instrumentalisons pas le problème, avant même qu’il ait été évoqué. Il faut qu’il y ait le même traitement pour tout le monde. » L’ancien président de l’Assemblée nationale a ajouté : « Le nombre de parlementaires qui ont pour collaborateurs des membres de leur famille n’est pas si important qu’on veut bien le dire. Pour beaucoup d’entre eux, l’entrée dans la vie politique, c’est quelque chose qui vous dévore et ce cheminement se fait avec l’aide de la famille. »

« Là, les magistrats sont absents »

« S’il a fait bosser vraiment ses filles, on va pas lui reprocher », a dit, pour sa part, Hervé Morin, président du parti Les Centristes et soutien du candidat de la droite, sur BFMTV. « Ce que j’observe en revanche, c’est que M. Le Roux, on le sait depuis hier, je n’ai pas entendu le parquet national financier se saisir de l’affaire dans la journée », « là, les magistrats sont absents », a-t-il ajouté.

« Si les faits sont confirmés, je ne doute pas que Bernard Cazeneuve demande à M. Le Roux de quitter le gouvernement, a, de son côté, dénoncé Christophe Castaner porte-parole d’Emmanuel Macron, le candidat d’En marche ! La justice doit être la même pour tous, on l’a dénoncé pour Fillon, il faut le dénoncer pour Le Roux. »

Quant au patron du PS, Jean-Christophe Cambadélis, il a estimé sur RTL que le « problème » n’était « pas d’embaucher des proches mais de savoir s’ils ont travaillé », arguant que « rien ne permet de dire que c’est un emploi fictif ». Et d’ajouter : « ne faisons pas démissionner les gens à partir d’un soupçon… »