Le 26 janvier 2014, un voyageur passe devant un centre de contrôle, à l’aéroport La Guardia de New York. | JOHN MOORE / AFP

Washington et Londres ont décidé, mardi 22 mars, d’interdire les ordinateurs portables et les tablettes en cabine, sur les vols en provenance de plusieurs pays arabes et de Turquie. Tous les appareils électroniques plus gros qu’un téléphone portable devront être mis en soute. Cela concerne les ordinateurs, les tablettes, les consoles de jeux, les liseuses, les lecteurs DVD ou les appareils photos.

Cette mesure, prise au nom de la lutte contre la menace terroriste, concerne tous les vols au départ de huit pays, tous alliés ou partenaires de Washington : la Jordanie, l’Egypte, la Turquie, l’Arabie saoudite, le Koweït, le Qatar, les Emirats arabes unis et le Maroc. Parallèlement, le Royaume-Uni a annoncé une interdiction quasi similaire qui affectera, « d’ici à samedi [25 mars] », la Turquie et cinq pays arabes, dont le Liban, la Jordanie, l’Egypte, la Tunisie et l’Arabie saoudite.

« Nous faisons face à une menace en termes de sécurité qui évolue », a relevé le ministre des transports britannique, Chris Grayling, devant les députés, alors que Washington a pris une mesure similaire en faisant état d’une menace d’attentats.

Gérard Feldzer, consultant aéronautique et transport et ancien commandant de bord chez Air France, revient sur cette mesure qui provoquait mercredi incompréhension et colère dans les pays visés.

Comment justifier une telle mesure au nom de la sécurité aérienne ?

Si les Etats-Unis et Londres – et probablement bientôt le Canada – prennent de telles mesures, elles le font indépendamment de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), mais sur la base des informations délivrées par leurs services de renseignement.

Leur postulat est le suivant : il est possible de cacher de l’explosif dans des appareils électroniques plus gros qu’un téléphone portable, voire d’installer des logiciels qui permettent de déclencher à distance l’incendie d’un appareil électronique. Face à cette menace, Washington et Londres ont dressé une liste des compagnies aériennes jugées peu fiables pour détecter ces explosifs, ils ont donc décidé d’interdire à ces compagnies de transporter en cabine certains appareils électroniques.

Evidemment, derrière cette mesure se cache une volonté de répondre à une menace terroriste, puisque la liste des pays concernés concerne des pays arabes, dont les compagnies aériennes sont pourtant très fiables pour certaines, comme Qatar Airways, Emirates et Etihad Airways. Il s’agit clairement d’un message politique, pour signaler que les terroristes sont surveillés et qu’ils n’ont pas intérêt à bouger. C’est un message de communication. Le Royaume-Uni et les Etats-Unis veulent montrer qu’ils sont proactifs. C’est un superparapluie, une superprotection… à l’américaine.

Les appareils électroniques constituent-ils un véritable risque ?

Les bureaux d’enquêtes et d’analyses du monde entier tentent de répondre à cette question, mais, pour l’heure, le fait qu’un incendie de batterie soit un véritable danger pour la sécurité d’un avion n’a jamais été prouvé. Il n’y a pas d’étude qui prouve la dangerosité d’un ordinateur, seulement des craintes. D’autant qu’il y a eu très peu de cas d’explosions de batteries d’appareils électroniques. Donc cette mesure est surtout une mesure préventive.

Selon l’OACI, il est de la responsabilité de chacun des Etats membres d’évaluer constamment le niveau de menace pesant sur le transport aérien et d’ajuster en conséquence les normes de sécurité. Les règles internationales prévoient seulement que les passagers et les bagages en cabine doivent être inspectés et passés au détecteur.

Est-ce véritablement plus sûr de mettre des appareils électroniques en soute ?

La solution de mettre les appareils électroniques en soute implique que le feu se déclenche en soute, ce qui est plus sécurisé, puisque cette partie de l’avion est équipée de détecteurs de fumée, qui, en cas d’incendie, déclenchent des extincteurs qui inondent la soute pour éteindre tout départ de feu. Un incendie en cabine est plus compliqué à neutraliser.