François Hollande, à Bonneuil-sur-Marne (Val-de-Marne), le 17 mars. | STEPHANE DE SAKUTIN/AFP

François Hollande n’a pas attendu la fin de « L’Emission politique », jeudi 23 mars, pour s’indigner des propos tenus par le candidat du parti Les Républicains à la présidentielle. François Fillon l’a accusé d’animer un « cabinet noir » à l’origine des fuites dans les médias sur ses affaires judiciaires. Dans un communiqué, le chef de l’Etat a « condamné avec la plus grande fermeté les allégations mensongères » du député. 

« L’exécutif n’est jamais intervenu dans aucune procédure judiciaire », a réagi l’Elysée, assurant que le président n’avait été informé des démêlés judiciaires de M. Fillon – qualifiés de « particulièrement graves » – que par la presse. Les propos du candidat sèment « un trouble insupportable » à la campagne, a insisté la présidence. « Le seul scandale ne concerne pas l’Etat mais une personne qui aura à en répondre devant la justice. »

« Ça fait deux mois que la presse déverse sur moi des torrents de boue », s’était emporté dès le début de l’émission M. Fillon, alors qu’on lui demandait s’il était « un homme d’argent ». C’est après l’altercation avec l’écrivaine Christine Angot, que le candidat a directement mis en cause François Hollande.

« Il y a un livre qui sort ces jours-ci, dont j’ai pu lire les bonnes feuilles, qui a été écrit par des journalistes qui sont loin d’être mes amis, car deux d’entre eux sont du Canard enchaîné. (…) Un livre qui explique comment François Hollande fait remonter les écoutes judiciaires qui l’intéressent à son bureau, ce qui est une illégalité totale. » Et de poursuivre : « Moi, ce soir, solennellement, je demande qu’il y ait une enquête d’ouverte sur les allégations qui sont portées dans ce livre, parce que c’est un scandale d’Etat. »

« Ce cabinet noir n’existe pas »

L’un des auteurs de Bienvenue Place Beauvau, Police : les secrets inavouables d’un quinquennat (éd. Robert Laffont, 264 p., 19,50 euros), Didier Hassoux, a démenti ces propos sur FranceInfo. « On n’a jamais écrit ça, la seule personne qui croit qu’il y a un cabinet noir à l’Elysée, c’est François Fillon. Il y croit tellement que le 24 juin 2014 (…), il est allé voir Jean-Pierre Jouyet, le numéro deux de l’Elysée, pour lui demander d’activer ce cabinet noir. Ce cabinet noir n’existe pas. »

Pour Olivia Recasens, coauteure et ex-journaliste du Point, « François Fillon est atteint de trumpisme : il voit pour faux ce qui est vrai, pour vrai ce qui est faux. Notre surprise a été totale. Il n’existe pas de cabinet noir mais une remontée des informations qui est ancienne ».

François Fillon, en réalité, n’a pas lu le livre, mais les « bonnes feuilles », publiées par l’hebdomadaire Valeurs actuelles, qui en a fait son miel et sa couverture. L’ouvrage retrace les multiples affaires, toutes déjà publiées, qui ont secoué le ministère de l’intérieur et qui ne datent certes pas de l’élection de François Hollande : la guerre entre les services, l’instrumentalisation de la police à des fins politiques, l’éternelle rivalité entre policiers et gendarmes…

Le livre, comme le précédent des mêmes auteurs (L’Espion du président, éd. Robert Laffont, 2012), nourri de citations aussi accusatoires qu’anonymes, respire le conspirationnisme, les petites magouilles, et ferait douter qu’il puisse exister une police républicaine. Avec des méthodes détestables : des déjeuners informels deviennent dans le livre des « entretiens avec l’auteur ».