La première ministre britannique, Theresa May,  le 23 mars, au Parlement britannique, au lendemain de l’attentat de Londres. | HANDOUT / REUTERS

Célébrées à quelques dizaines de mètres des lieux de l’attentat perpétré mercredi 22 mars, les retrouvailles des parlementaires encore sous le choc avec la première ministre, elle-même exfiltrée en urgence de Westminster, la veille, avaient de l’allure. « Un acte de terrorisme a tenté de museler notre démocratie, a déclaré Theresa May. Mais, aujourd’hui, nous nous réunissons normalement. (…) Nous n’avons pas peur, et notre détermination ne vacillera pas devant le terrorisme. »

Oubliées pour un temps les déchirures du Brexit. L’heure était à l’unité nationale. Dans un élan de communion, les élus de toute tendance ont rendu hommage aux forces de l’ordre, adressant leurs condoléances aux victimes et célébrant le stoïcisme comme une vertu nationale. « C’est un crime horrible mais, en tant qu’acte de terreur, il a échoué, a souligné Harriet Harman, ancienne dirigeante du Labour. Nous sommes ici, au travail. »

Radicalisation en prison ?

Quelques heures plus tard, Scotland Yard révélait l’identité de l’auteur de l’attentat qui, selon un bilan actualisé vendredi 24 mars au matin, a fait quatre morts – un policier, une enseignante britannique d’origine espagnole, un touriste américain et un homme de 75 ans ayant succombé à ses blessures jeudi soir – et une quarantaine de blessés. Entre-temps, l’organisation Etat islamique avait revendiqué l’attaque, menée « en réponse à l’appel à frapper les pays de la coalition [internationale antidjihadiste] ».

Agé de 52 ans, Khalid Masood, né Adrian Russell Ajao dans le Kent, est un musulman converti. Connu de la police pour des actes de délinquance, il aurait pu se radicaliser au cours de plusieurs séjours en prison. Sa première condamnation remonte à 1983 pour dégradations volontaires et sa dernière à 2003 pour un port de couteau. Mais il était aussi apparu « il y a quelques années » sur les radars du MI5, le service de renseignement intérieur britannique, dans le cadre d’une enquête en lien avec « l’extrémisme violent », a expliqué de façon énigmatique Mme May, précisant qu’il n’était alors qu’un « personnage périphérique ». Dans la journée de jeudi, la police a arrêté huit personnes à Birmingham, Londres, Brighton et au Pays de Galles. Toutes sont soupçonnées de préparer des actes terroristes.

La belle unanimité mise en scène aux Communes le matin n’a cependant pas résisté à l’instrumentalisation xénophobe et antimusulmane. « “Né en Grande-Bretagne” ne veut rien dire s’il vivait dans un quartier à part et détestait le mode de vie britannique, a tweeté Leave.EU, l’organisation de campagne pro-Brexit proche de l’extrême droite. L’inaction du gouvernement à s’attaquer à la ségrégation facilite ces actes de terreur. »

Son principal financier, l’homme d’affaire Arron Banks, fondateur d’un site d’information proche de l’américain Breitbart, a mis en cause le prétendu laxisme de Mme May, ancienne ministre de l’intérieur, en matière d’immigration. En écho, Nigel Farage, ancien leader du Parti pour l’indépendance du Royaume-Uni (UKIP, extrême droite), a péroré sur la chaîne américaine Fox News, arguant que l’attentat de Londres justifiait la politique antimusulmane et anti-immigration de Donald Trump. Et d’insister : « Nous avons déjà un problème avec le terrorisme né chez nous. Pourquoi diable en rajouter en faisant entrer des gens ? »