Neuf mois après un conseil exécutif à l’issue duquel Alexandre Saubot, président du pôle social du Medef, n’avait pas obtenu de mandat pour négocier une nouvelle convention d’assurance-chômage avec les syndicats, l’organisation patronale modifie son choix. Cette fois, le conseil exécutif, réuni lundi 27 mars, a donné quitus à son négociateur pour discuter avec les syndicats le lendemain.

Sa quarantaine de membres devait décider de l’opportunité de poursuivre ou non les discussions en statuant sur un projet d’accord que M. Saubot devait soumettre aux syndicats en amont de la dernière séance de négociations, mardi 28 mars.

Responsables de la gestion du régime d’assurance-chômage, patronat (Medef, U2P, CPME) et syndicats (CFDT, FO, CGT, CFTC et CFE-CGC) doivent se réunir tous les deux ans pour signer un accord fixant les règles d’indemnisation des chômeurs. Leur dernier tour de table, en juin 2016, s’était soldé par un échec sur la question épineuse de la surtaxation des contrats courts : elle était souhaitée par les syndicats qui y voyaient un moyen de lutter contre « l’usage abusif et récurrent » aux CDD très courts, mais rejetée violemment par le patronat hostile à un « surenchérissement du coût du travail ». Poussés par l’hostilité manifestée par certains candidats à la présidentielle face à la gestion paritaire de l’assurance-chômage, les partenaires sociaux ont, néanmoins, relancé un cycle de négociations début mars.

Séance houleuse

Pour autant, la proposition envoyée lundi soir par M. Saubot aux syndicats ne tourne pas autour des contrats courts. En lieu et place d’une hausse des cotisations sur les CDD de très brève durée, voulue par les représentants des salariés, c’est une « contribution temporaire exceptionnelle » sur tous les types de contrats qu’a proposée le négociateur du Medef. En clair, il s’agirait en réalité d’une augmentation de la cotisation patronale d’assurance-chômage de 0,03 %. Temporaire, cette hausse a vocation, selon le patronat, à être remise en cause dès la prochaine négociation. Elle pourrait, selon certains, rapporter un peu plus de 230 millions d’euros au régime d’assurance-chômage.

En échange, le patronat réclame l’annulation de la surtaxation des contrats de moins de trois mois mise en place par un accord interprofessionnel en 2013. Alexandre Saubot souhaite, en outre, obtenir une baisse des cotisations versées par les entreprises à l’Assurance de garantie des salaires (AGS), un régime qui permet le versement des traitements et des indemnités de licenciement en cas de faillite d’une entreprise.

Au Medef, beaucoup demeurent circonspects devant cette solution. « Nous étions très loin d’un consensus », fulmine un pilier de l’organisation patronale. Comme en juin, la séance a été quelque peu houleuse. Plusieurs grandes fédérations ont manifesté une farouche hostilité à l’accord proposé par Alexandre Saubot. Parmi elles, le Groupement des professions de service, ou encore le Syntec et le bâtiment. Pour certains d’entre eux, il n’y a pas de doute, « une ligne rouge a été franchie » : « On nous avait promis qu’il n’y aurait pas de surenchérissement du coût du travail et voilà qu’on augmente les cotisations pour tout le monde. Dans une économie mondialisée, il faut savoir être agiles, nous n’avions pas besoin de ça. C’est un véritable jeu de dupes ! », enrage le président d’une importante fédération.

La baisse des AGS en compensation ? « Nous l’aurions eue de toute façon, cette baisse. Elle était programmée », insiste un autre membre du conseil exécutif. « Encore une fois, Alexandre Saubot n’a écouté personne. Il voulait juste se présenter en sauveur du paritarisme alors que certains d’entre nous pensent qu’il vaut mieux créer des emplois en baissant le coût du travail. Et ce, même s’il faut mettre un autre coup de canif dans la gestion paritaire de l’assurance-chômage », admet un autre.

Les défenseurs de la proposition insistent, pour leur part, sur le fait qu’avec la baisse des AGS, la manœuvre est à coût constant pour le patronat, mais permet de « donner des gages solides » aux représentants des salariés. « C’est un accord ambitieux, les choses ont avancé sur bien d’autres points par ailleurs. La question, c’est : “Est-on capable de passer des réformes qui changent les choses quand il le faut ?” Nous montrons que oui », explique une source patronale. Reste à savoir si la proposition est en mesure de satisfaire les syndicats, mardi 28 mars.