Donald Trump, entouré de mineurs, signe le décret « sur l’indépendance énergétique », à Washington, le 28 mars. | JIM WATSON / AFP

Editorial du « Monde ». Donald Trump aime la facilité. Comme il est plus difficile de construire que de détruire, il avait l’air rayonnant, mardi 28 mars, en annonçant le début du démantèlement du plan de lutte contre le réchauffement climatique mis en place par son prédécesseur à la Maison Blanche, Barack Obama. Même si la mesure qu’il a annoncée n’aura qu’un effet pratique limité, le signal envoyé au reste du monde est désastreux : l’Amérique de Trump se moque des effets du réchauffement sur l’état de la planète.

Ce n’est pas une surprise. M. Trump a déjà dit qu’il considérait que cette affaire de climat n’était qu’une « ruse » inventée par les Chinois pour handicaper l’industrie américaine. Ainsi, entouré d’une demi-douzaine de mineurs conviés à la Maison Blanche pour l’occasion, a-t-il signé, mardi, cette directive présidentielle s’attaquant à l’une des mesures phares du dispositif Obama : le « Clean Power Plan ».

Il s’agit de diminuer les émissions de CO2 provenant des centrales thermiques, celles brûlant du charbon étant considérées comme les plus polluantes. Ambition affichée : réduire considérablement la part du charbon dans la production d’électricité. Le Clean Power Plan fixait un objectif – une baisse de 32 % des émissions liées à la production d’électricité par rapport à celles de 2005 – et il interdisait l’ouverture de nouvelles mines.

Rage de destruction préadolescente

« C’est la fin de la guerre au charbon », a dit Donald Trump, en annulant purement et simplement cette mesure du Clean Power Plan. Il l’a fait au nom d’une politique de création d’emplois et d’indépendance énergétique. Cette décision devrait préserver quelque 100 000 postes de travail dans l’industrie minière. A très court terme seulement. Car l’avenir du charbon paraît compromis par une force dépassant heureusement les tropismes régressifs de M. Trump : le marché. Comme le rappelait cette semaine au Monde le patron de Total, Patrick Pouyanné, les Etats-Unis vivent une révolution liée au gaz et au pétrole de schiste. A moins de 20 dollars le baril en coût de production, le gaz se substitue au charbon, de moins en moins compétitif pour produire de l’électricité.

Mais M. Trump ne s’arrêtera pas là. Dans une sorte de rage de destruction préadolescente, il entend démolir les objectifs fixés pour la réduction de la pollution automobile, la préservation de la qualité de l’eau aux Etats-Unis, bref vider de sens ce qu’a accompli M. Obama. Il veut réduire de 30 % le budget de l’Agence de protection de l’environnement (EPA), dont il a confié la direction à un ancien magistrat qui appartient à la branche fondamentaliste des climatosceptiques, Scott Pruitt. Le président Trump ira-t-il jusqu’à dénoncer l’accord de Paris sur le climat ? Il peut en tout cas le vider de sa substance, notamment en refusant de verser aux pays du Sud l’aide financière que les Etats-Unis se sont engagés à fournir pour les aider dans la transition énergétique.

Aux Etats-Unis mêmes, M. Trump aura fort à faire face à une « société civile » (grandes villes, Etats, entreprises, associations) qui entend faire barrage à l’action de la Maison Blanche. De la Californie à l’Etat de New York, la bataille pour une énergie propre est menée par des maires et des gouverneurs qui sont convaincus des effets désastreux du réchauffement sur la santé des hommes et l’avenir de la planète. C’est ainsi que, dans une société démocratique, le marché et la « société civile » mettent en échec l’irresponsabilité du chef de l’Etat. Tant mieux.