Les robots installés dans l’usine Shiseido de Kakegawa ont été partiellement financés par l’Etat japonais. | DR

Des palettes de maquillage fabriquées par des robots humanoïdes. Le fabricant japonais de produits cosmétiques Shiseido a révélé, jeudi 30 mars, avoir installé deux robots « aux côtés d’ouvriers » dans son usine de Kakegawa, à l’ouest de Tokyo. Ces créatures aux allures extraterrestres sont chargées des « procédures les plus difficiles à automatiser avec des machines classiques et les robots industriels existants », explique un communiqué du groupe japonais qui parle d’une « première mondiale dans le secteur des cosmétiques ».

Les deux robots accomplissent les dernières étapes de fabrication de produits de maquillage en petite série. La réalisation de palettes, boîtiers et poudriers exige d’assembler beaucoup de pièces (capot, godet pour chacune des couleurs de fards, applicateurs, pinceaux, packaging, etc.) et d’intervenir sur différentes textures, rappelle Shiseido. C’est pourquoi un test sur des chaînes de produits de maquillage, par nature complexes, a été préféré à un prototype sur des lignes de production où des machines remplissent des flacons de crèmes, sérums et autres lotions. Les deux robots assistent un ouvrier chargé de contrôler la qualité des produits, précise la marque.

Le programme a été adoubé par le gouvernement japonais. Il a mobilisé 54 millions de yens (450 000 euros). La moitié de ce montant a été accordée par le ministère japonais de l’économie.

Pénurie de personnel

Grâce à cette « collaboration entre humains et robots », le fabricant de produits cosmétiques dit « protéger son avenir en anticipant […] la baisse de main-d’œuvre ». Le Japon est en effet confronté au vieillissement de sa population avec l’un des taux de fécondité les plus bas au monde (1,4 enfant par femme en 2015), argumente le fabricant qui emploie 46 000 personnes. « Ce qui amène à une réduction très significative de la main-d’œuvre disponible », explique Shiseido.

Nombre de firmes japonaises sont concernées par cette pénurie de personnel et tablent sur la robotisation pour y remédier. Le taux de chômage flirte avec ses plus bas niveaux depuis 20 ans, à environ 3 % de la population active. Et le pays présente l’un des plus faibles taux de productivité des pays développés, loin derrière les Etats-Unis et la France. L’enjeu est aussi purement économique. Les robots devraient permettre de réduire les coûts de fabrication des industriels japonais de 25 % d’ici à 2025, d’après une étude du cabinet de conseil Boston Consulting Group publiée en 2015.

Chez Shiseido, l’adoption de cette méthode de fabrication relève précisément d’une revue complète de la stratégie de production. Son président Masahiko Uotani, un ancien de chez Coca-Cola nommé en 2014, doit propulser les ventes à 8 milliards d’euros (contre 5,7 en 2015) et améliorer la rentabilité pour atteindre une marge de 12 % de son chiffre d’affaires en 2020. En 2016, son bénéfice d’exploitation a diminué de 17 %, malgré ses efforts pour réduire ses frais fixes.

« L’usine qui crée le futur »

A la tête de 13 usines, dont trois au Japon et deux en France, le groupe a annoncé en février l’installation d’une nouvelle usine à Osaka. Les travaux commenceront en 2018. Dans ce site consacré à ses produits de soin, le groupe investira 40 milliards de yens (335 millions d’euros). Il y transférera les 900 employés de son usine actuelle d’Osaka. Et sans accroître les effectifs, le groupe jure pouvoir augmenter de 50 % sa capacité de production par rapport à sa précédente usine, créée en 1939 et désormais promise à la fermeture ; plus de 100 millions de produits sortiront du site d’Osaka en 2020. Ces chaînes de production incluront précisément des robots humanoïdes. Ce sera « l’usine qui crée le futur », assure Shiseido.