Le président américain, Donald Trump, accueille lundi 3 avril son homologue égyptien, Abdel Fattah Al-Sissi, avec la volonté affichée de renforcer les liens et de mettre en sourdine les critiques sur les droits de l’homme de l’administration Obama. Pour l’homme fort de l’Egypte, qui fut l’un des premiers à féliciter chaleureusement le républicain lors de sa victoire surprise, le tête-à-tête dans le Bureau ovale aura une saveur particulière : il n’avait jamais été invité à la Maison Blanche par son prédécesseur démocrate.

Le magnat de l’immobilier et l’ancien général, qui n’ont pas prévu de conférence de presse commune, s’étaient déjà rencontrés à New York, en septembre 2016, lorsque la campagne présidentielle américaine battait son plein. Donald Trump n’avait alors pas tari d’éloges sur son interlocuteur : « C’est un type fantastique. Il a pris le contrôle de l’Egypte, vraiment pris le contrôle. »

L’administration Trump loue aujourd’hui avec force celui qui dirige l’Egypte d’une main de fer, saluant ses « mesures courageuses » dans les domaines économique et sécuritaire. La lutte contre le groupe djihadiste Etat islamique (EI), mais aussi la façon dont la Maison Blanche entend esquisser des propositions sur le conflit israélo-palestinien, devraient d’ailleurs être au cœur des discussions.

Mais la rencontre donnera aussi de précieuses indications sur la façon dont le nouvel occupant de la Maison Blanche entend aborder la question des droits de l’homme avec des dirigeants montrés du doigt sur ce thème. Son équipe a déjà donné une indication : ce sera de façon « privée et discrète ». « Nous pensons que c’est la façon la plus efficace d’aborder ces sujets », a indiqué un responsable américain.

Une approche qui a provoqué l’indignation des ONG de défense des droits de l’homme. « Inviter M. Sissi pour une visite officielle à Washington au moment où des dizaines de milliers d’Egyptiens croupissent en prison et où la torture est de nouveau à l’ordre du jour est une étrange façon de bâtir une relation stratégique stable », a estimé Sarah Margon, responsable de Human Rights Watch à Washington.

Aide militaire

L’administration Obama avait gelé son aide militaire à l’Egypte, en 2013, après la destitution du président islamiste Mohamed Morsi et la répression sanglante de ses partisans. Mais le rôle incontournable de l’Egypte, le plus peuplé et le mieux armé des pays arabes, avait poussé la Maison Blanche à infléchir sa position et à reprendre les livraisons d’armes lourdes en 2015.

Les Etats-Unis allouent chaque année environ 1,5 milliard de dollars (1,4 milliard d’euros) d’aide à l’Egypte, dont 1,3 milliard de dollars dans le domaine militaire. La Maison Blanche, qui vient de lancer un débat budgétaire qui s’annonce houleux sur fond de réduction drastique de l’aide internationale, a promis de maintenir un niveau d’aide « fort » à l’Egypte, mais ne s’est engagée sur aucun chiffre.

Sur le plan politique, la nouvelle administration républicaine serait-elle prête à désigner la confrérie des Frères musulmans, de Mohamed Morsi, comme une « organisation terroriste » ? « Le président souhaite entendre la position du président Sissi sur le sujet », a répondu, prudent, un haut responsable américain avant la visite. « Comme d’autres pays, nous avons des inquiétudes concernant diverses activités des Frères musulmans dans la région. »