Julian Assange en 2012 au balcon de l’ambassade d’Equateur, dans le quartier londonien de Knightsbridge. | WILL OLIVER / AFP

La victoire de Lenin Moreno à l’élection présidentielle équatorienne éclaircit quelque peu l’avenir de Julian Assange, réfugié dans l’ambassade londonienne d’Equateur depuis 2012. Même si les résultats sont contestés par le candidat de la droite, Guillermo Lasso, le dernier décompte, fourni lundi 3 avril par le Conseil national électoral (CNE) et portant sur la quasi-totalité des bulletins, donne l’ancien bras droit de Rafael Correa vainqueur avec 51,12 % des voix.

C’est un soulagement pour le fondateur de WikiLeaks, qui vit reclus dans l’ambassade depuis qu’il y a pénétré et obtenu l’asile politique il y a cinq ans. Guillermo Lasso avait promis que M. Assange devrait quitter les locaux diplomatiques les plus célèbres de ce pays d’Amérique latine sous trente jours s’il accédait à la présidence.

« Le peuple équatorien a payé un prix qu’il ne devrait pas avoir à supporter. Nous inviterons cordialement Monsieur Assange à quitter l’ambassade dans les trente jours suivant notre arrivée au pouvoir », avait déclaré M. Lasso dans une interview au quotidien britannique The Guardian, avant d’adoucir sa position.

« J’invite cordialement Lasso à quitter l’Equateur dans les trente jours (avec ou sans ses millions des paradis fiscaux) », s’est d’ailleurs amusé M. Assange dans la nuit de dimanche à lundi sur son compte Twitter, en référence à des révélations de la presse argentine sur de possibles comptes offshore détenus par le candidat de la droite. Le fondateur de WikiLeaks a aussi « félicité », toujours sur Twitter, le candidat victorieux, l’ancien président, Rafael Correa, ainsi que plusieurs ministres.

Une situation qui reste précaire

La situation de M. Assange reste toutefois délicate, malgré la victoire de la gauche. Car si Lenin Moreno, le vainqueur, a promis de faire honneur à l’asile accordé à M. Assange par son prédécesseur, « nous resterons vigilants et demanderons à M. Assange, dans ses déclarations, de respecter nos pays frères et amis », a-t-il averti.

Avant les élections, les autorités équatoriennes ont pointé la précarité de la situation, à la fois pour M. Assange lui-même et pour l’équipe diplomatique. « Nos équipes ont passé des moments difficiles. Il y a un coût humain. Il s’agit probablement de l’ambassade la plus surveillée de la planète », expliquait il y a peu Guillaume Long, le ministre équatorien des affaires étrangères.

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Au mois d’octobre, en pleine polémique sur la publication des courriels issus de la campagne d’Hillary Clinton, la connexion Internet de M. Assange avait été coupée. « Le gouvernement équatorien respecte le principe de non-intervention dans les affaires internes des autres pays. Il n’interfère pas dans les processus électoraux, ni ne favorise un candidat en particulier », s’était justifié le gouvernement de Quito.

Julian Assange a demandé – et obtenu – l’asile dans l’ambassade pour échapper à un mandat d’arrêt européen émis par la Suède au sujet d’accusations de viol et d’agression sexuelle. Une partie des faits pour lesquels la police suédoise souhaite l’interroger a été prescrite l’été dernier, mais il demeure sous le coup d’une accusation de viol. Après des mois de négociations, des enquêteurs suédois ont, en décembre, finalement interrogé M. Assange depuis l’ambassade équatorienne. Le fondateur de WikiLeaks, qui nie les accusations portées contre lui, estime que se rendre en Suède l’exposerait à une extradition vers les Etats-Unis, où la justice enquête sur la publication, en 2010 par WikiLeaks, de milliers de documents internes à l’armée.