Syrie : premières images suite à la possible attaque au gaz chimique dans le nord-ouest du pays
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Au moins soixante-dix personnes, dont des enfants, ont été tuées, mardi 4 avril, dans un bombardement aérien qui a émis du « gaz toxique » à Khan Cheikhoun, une ville du nord-ouest de la Syrie tenue par les rebelles, a fait savoir au Monde la défense civile syrienne, les casques blancs. L’attaque a également fait 170 blessés, dont des enfants peinant à respirer sous leurs masques à oxygène, leur corps saisi de convulsions.

  • Paris met en cause la responsabilité des alliés d’Assad

La France a appelé à une réunion d’urgence du Conseil de sécurité de l’ONU. « L’utilisation d’armes chimiques constitue une violation inacceptable de la convention sur l’interdiction des armes chimiques et un nouveau témoignage de la barbarie dont le peuple syrien est victime depuis tant d’années », a déclaré le ministre des affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault.

Pour sa part, le président de la République, François Hollande, a mis en cause la responsabilité « politique, stratégique et morale » des soutiens du régime de Bachar Al-Assad.

« Une fois encore le régime syrien va nier l’évidence de sa responsabilité dans ce massacre. Comme en 2013, Bachar Al-Assad compte sur la complicité de ses alliés pour bénéficier d’une impunité intolérable. Ceux qui soutiennent ce régime peuvent une nouvelle fois mesurer l’ampleur de leur responsabilité politique, stratégique et morale. »
  • Moscou dément être impliqué

« Les avions de l’armée de l’air russe n’ont mené aucune frappe dans la zone de la localité de Khan Cheikhoun », a assuré le ministère de la défense russe dans un communiqué.

  • Londres accuse le régime

Boris Johnson, le ministre des affaires étrangères britannique, a réagi au bombardement sur son compte Twitter : « Horribles rapports d’une attaque aux armes chimiques à Idlib en Syrie. Une enquête doit avoir lieu sur l’incident et les auteurs doivent rendre des comptes », a-t-il écrit.

« Si nous ne pouvons pas encore être certains de ce qui s’est passé, cela a toutes les caractéristiques d’une attaque du régime qui a utilisé de façon répétée des armes chimiques », a-t-il ajouté dans un communiqué.

  • Silencieux, Donald Trump est pris à partie

Ni la Maison Blanche ni le département d’Etat n’avaient officiellement réagi mardi en milieu de matinée (heure locale) à l’attaque. Partisan de longue date d’un engagement plus important en Syrie, le sénateur John McCain a une nouvelle fois appelé le président américain à « armer l’Armée syrienne libre », principale force d’opposition en dehors des groupes islamistes, en ajoutant :

« Bachar Al-Assad et ses amis, c’est-à-dire les Russes, font attention à ce que les Américains disent. Je suis sûr qu’ils se sentent encouragés par le retrait des Etats-Unis et les ouvertures vis-à-vis des Russes. C’est un nouveau chapitre honteux de l’histoire américaine. »

« Assad est en train de tester le président Trump et notre secrétaire d’Etat, Rex Tillerson. Nous ne pouvons pas ne rien faire », a estimé le sénateur républicain John Kennedy, sur CNN.

Le parlementaire démocrate Eliot Engel s’est quant à lui dit « horrifié » par l’attaque. « Maintenant que Donald Trump a mis la superpuissance mondiale sur la touche, j’ai peur de ce qui peut arriver au peuple syrien », a-t-il déclaré.

Le gouvernement syrien, accusé par plusieurs témoins et rapports d’enquête de l’ONU, a toujours démenti toute utilisation des armes chimiques dans la guerre. A Khan Cheikhoun, le 4 avril. | AMMAR ABDULLAH / REUTERS

  • L’ONU veut identifier les responsabilités

La Coalition nationale syrienne, importante composante de l’opposition, a réclamé au Conseil de sécurité des Nations unies (ONU) de « convoquer une réunion urgente après ce crime et d’ouvrir une enquête immédiate ». L’opposition accuse le « régime du criminel Bachar » d’avoir mené des raids sur la ville de Khan Cheikhoun avec des « obus contenant du gaz chimique ».

Staffan de Mistura, l’envoyé spécial des Nations unies pour la Syrie, a assuré que l’ONU chercherait à « clairement identifier les responsabilités » et à faire « rendre des comptes » aux auteurs de l’attaque « chimique » dans le nord-ouest de la Syrie. « De ce que nous comprenons, c’était une attaque chimique et elle était aérienne », a précisé M. de Mistura lors d’un point de presse à Bruxelles en marge d’une conférence internationale sur l’avenir de la Syrie.

L’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques, sise à La Haye, est en train de « rassembler et analyser des informations de toutes les sources disponibles » et rapportera ensuite ses conclusions.

Mandatée par l’ONU, l’organisation responsable de la destruction des armes chimiques à travers le monde est chargée d’enquêter sur de telles allégations en Syrie depuis que le gouvernement de Bachar Al-Assad a ratifié la Convention sur l’interdiction des armes chimiques en 2013.

  • Pour Ankara, le processus de paix est menacé

Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a déclaré à Vladimir Poutine, lors d’un entretien téléphonique, que l’attaque « chimique » commise dans la matinée en Syrie était « inhumaine » et menaçait « tous les efforts fournis dans le cadre du processus d’Astana » visant à une fin du conflit. MM. Erdogan et Poutine ont aussi convenu qu’il était « nécessaire de produire des efforts communs pour que se poursuive le cessez-le-feu », régulièrement violé, selon les mêmes sources.

  • La Commission européenne dénonce la responsabilité de Damas

Pour la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, le régime de Damas porte la « principale responsabilité » de l’attaque « chimique », a-t-elle déclaré en marge d’une conférence internationale à Bruxelles sur la reconstruction de la Syrie.

Le gouvernement syrien, accusé par plusieurs témoins et rapports d’enquête de l’ONU, a toujours démenti toute utilisation des armes chimiques dans une guerre qui a déjà fait plus de 320 000 morts depuis mars 2011. Il a ratifié la convention sur l’interdiction des armes chimiques en 2013.