Le contrat prévoit la vente ferme de trente 737 Max, plus une option sur trente appareils supplémentaires. | JASON REDMOND / REUTERS

Le constructeur aéronautique américain Boeing, en annonçant, mardi 4 avril, un contrat portant sur la vente soixante avions de type 737 MAX à la compagnie aérienne Iran Aseman Airlines, pose un problème de taille à la Maison Blanche, qui a le dernier mot sur ce type d’accord. L’hostilité du président des Etats-Unis, Donald Trump, à l’égard de l’Iran, et plus particulièrement de l’accord sur le nucléaire iranien signé en 2015 par son prédécesseur, va-t-elle s’effacer face à l’opportunité de faire du commerce avec ce pays, et donc de créer des emplois aux Etats-Unis ?

C’est la première fois que le cas de figure se produit depuis la prise de fonctions de M. Trump, le 20 janvier. Certes, Boeing avait déjà annoncé la vente de quatre-vingts avions, pour une valeur de 16,6 milliards de dollars (15,55 milliards d’euros), à Iran Air en décembre 2016. Mais, à l’époque, M. Obama, qui avait été l’un des principaux artisans de l’accord sur le nucléaire avec l’Iran, occupait encore la Maison Blanche.

L’une des contreparties du compromis trouvé en 2015 entre l’Iran, les Etats-Unis, la Russie, la Chine, la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne consistait à lever les sanctions économiques imposées à Téhéran contre un engagement de sa part de limiter sa capacité à se doter d’armes nucléaires et d’accepter des inspections internationales pour en vérifier l’application. M. Trump a dénoncé, à de multiples reprises, ce compromis qui, selon lui, laisse les mains libres à un Etat qui sponsorise le terrorisme et déstabilise le Moyen-Orient. Le président états-unien a laissé entendre qu’il pourrait revenir sur cet accord.

Une vente susceptible de créer 18 000 emplois

Le problème, c’est que, dans le même temps, M. Trump a aussi promis qu’il ferait tout ce qui est dans son pouvoir pour créer de l’emploi dans l’industrie américaine. Or, c’est bien le sujet de l’annonce faite par Boeing, la vente de soixante 737 MAX serait susceptible de créer 18 000 emplois aux Etats-Unis.

Cette annonce survient alors que les relations diplomatiques entre Washington et Téhéran restent extrêmement tendues. En mars, les Etats-Unis ont imposé de nouvelles sanctions, considérant que l’Iran s’était mis dans l’illégalité en procédant à des tirs de missile. Par ailleurs, l’Iran fait partie de la liste de pays dressée par M. Trump dont les ressortissants n’auraient désormais plus le droit de pénétrer sur le sol américain ; une mesure qui est actuellement bloquée par la justice américaine.

La vente des Boeing ne peut se faire que si le Bureau du contrôle sur les actifs étrangers (Office of Foreign Assets Control of the Treasury Department) donne son aval. La transaction s’annonce d’autant plus compliquée que certaines sanctions contre l’Iran, comme la possibilité pour une entreprise du pays de passer par le système bancaire américain pour régler un contrat, restent encore en vigueur. Cela implique qu’Iran Aseman Airlines devra faire appel à un établissement non américain, tandis que le paiement devra s’effectuer dans une autre devise que le dollar.

La pression des parlementaires

Mais le principal obstacle risque d’être politique. Une partie de la majorité républicaine au Congrès ne cache pas son hostilité à faire du commerce avec l’Iran. Mardi, le représentant républicain de l’Illinois, Peter Roskam, a qualifié de « scandaleux » l’accord annoncé par Boeing, soulignant qu’il coïncidait avec la révélation que le président syrien, Bashar Al-Assad, qui est soutenu par Téhéran, est accusé d’avoir perpétré une attaque à Khan Cheikhoun, une ville tenue par les opposants à son régime. M. Roskam a appelé M. Trump à faire « tout ce qui est en son pouvoir » pour arrêter la vente des Boeing.

Le contrat prévoit la vente ferme de trente 737 Max, plus une option sur trente appareils supplémentaires. Au prix catalogue, susceptible de faire l’objet de ristournes, le montant de l’accord s’élève à 6 milliards de dollars (5,62 milliards d’euros). Si la Maison Blanche donne son accord, le premier avion pourrait être livré d’ici à 2022.

Le contrat concerne également le groupe français Safran, qui fabrique les moteurs de l’appareil dans le cadre de son entreprise commune avec General Electric. Quant à Airbus, le constructeur aéronautique, européen il n’a pas les mêmes contraintes que Boeing et a déjà signé un contrat avec Iran Air portant sur cent appareils.