Il y a encore deux ans, le terrorisme leur était étranger. Les Burkinabés regardaient avec tristesse leurs frères maliens et nigériens compter leurs morts, mais ils se pensaient épargnés. Le 15 janvier 2016, les attentats de Ouagadougou les laissèrent sans voix, abasourdis, profondément choqués. Eux qui voyaient le terrorisme de loin, comme un phénomène réservé aux autres, comprirent qu’il avait désormais franchi leurs frontières.

Il y a eu le temps du déni, puis celui de l’acceptation. Face à la multiplication des attaques de postes de sécurité dans le nord du pays, courant 2016, les Burkinabés ont dû se rendre à l’évidence. Il allait désormais falloir composer avec la menace terroriste.

Mais à l’époque, les « hommes intègres » n’ont pas encore totalement ouvert les yeux. Pour eux, il est impossible que certains de leurs compatriotes aient participé, de près ou de loin, à ces entreprises funestes ayant tué 70 personnes depuis 2015, selon le ministère de la sécurité. Depuis toujours, le Burkina Faso est salué pour son pacifisme et pour la cohabitation parfaite entre les différentes confessions. Du jamais-vu en Afrique de l’Ouest. Et les Burkinabés tiennent à cette réputation.

Entre peur et espoir

Las, après le temps de l’acceptation est venu celui de la peur. Fin 2016, le peuple assiste, impuissant, à la création du premier groupe terroriste burkinabé de l’Histoire : Ansaroul Islam. Dans le nord-ouest du pays, le groupe d’Ibrahim Malam Dicko sème la terreur. Il tente d’imposer sa loi, allant jusqu’à entrer dans les écoles pour menacer les enseignants. La psychose s’installe.

Le pays est à la croisée des chemins. Les nouvelles autorités, élues en décembre 2015, tentent de composer avec cette nouvelle donne qui menace de faire basculer le Nord. Mais au Burkina Faso, les idées extrémistes prônées par les terroristes seront difficiles à ancrer dans les esprits. Le modèle de tolérance religieuse et de fraternité si propre à la « patrie des hommes intègres » résiste, grâce à des initiatives favorisant le dialogue entre les religions.

En mars, notre correspondante Morgane Le Cam s’est rendue dans le Nord, à Dori et à Ouahigouya, pour rencontrer les témoins de cette menace terroriste de plus en plus pressante, mais aussi les acteurs qui se battent au quotidien pour ne pas que le pays bascule. En six épisodes, Le Monde Afrique a décidé de raconter cette époque charnière, entre peur et espoir.

Le sommaire de notre série « Le Burkina à l’épreuve du terrorisme »

Dans le nord du Burkina Faso, pays longtemps épargné par le phénomène, la population vit désormais sous la menace djihadiste. Reportages et analyses.