Le collectif « Pou La Gwiyann dékolé », à l’origine du mouvement de grève générale qui a démarré le 25 mars en Guyane, annonce un « blocage général » à partir de lundi. Les barrages érigés dans les villes guyanaises seront ainsi ouverts dimanche de 7 h 00 (12 h 00 à Paris) à minuit (5 h 00 lundi), puis il y aura « fermeture totale jusqu’à nouvel ordre », avec « interdiction », même pour les personnes voulant passer « à pied », « à moto » ou « à vélo », de les franchir, a annoncé l’un de ses cadres sur la radio Péyi.

Après les échauffourées qui ont éclaté vendredi devant la préfecture de Guyane, où des manifestants ont gravement blessé un policier, la situation était beaucoup plus calme samedi à Cayenne. Le collectif « Pou La Gwiyann dékolé » (Pour que la Guyane décolle) a néanmoins annoncé un durcissement des blocages, mécontent notamment du montant de l’aide de plus de 1 milliard d’euros débloquée par le gouvernement vendredi. Le collectif réclame 2,1 milliards d’euros supplémentaires.

Le contrôle des barrages s’était fait jusqu’alors avec une certaine souplesse. Son durcissement a suscité de nombreuses réactions sur les réseaux sociaux, où un fossé semble apparaître à propos du maintien du blocage. « Il n’est pas tolérable de se voir refuser le droit de circuler librement sur le territoire. (…) Une partie de la Guyane a peur de s’exprimer », affirment les signataires d’une pétition en ligne qui a recueilli un millier de paraphes. Environ 700 internautes font désormais partie d’un groupe Facebook intitulé « Stop aux barrages en Guyane ».

La Guyane connaît depuis plus de deux semaines un mouvement social marqué par des revendications sécuritaires, sanitaires et éducatives. Une « grève générale illimitée » a été décrétée le 25 mars, paralysant l’activité économique. Le blocage du port de Cayenne provoque des pénuries, notamment celle de produits frais.

Le policier blessé reçoit le collectif contre la délinquance

Le commissaire Joël Terry, numéro 2 de la police en Guyane blessé vendredi, a reçu samedi sur le seuil de sa chambre d’hôpital quelques dizaines de membres des « 500 frères contre la délinquance », très actifs durant la manifestation.

Des heurts sont en effet survenus vendredi 7 avril devant la préfecture de Guyane, où des centaines de personnes s’étaient rassemblées. L’administration, craignant une possible « invasion » du bâtiment, à l’image de l’occupation mardi du centre spatial de Kourou, a refusé de recevoir une délégation du collectif, qui avait pourtant rendez-vous avec le préfet, ce qui a attisé les tensions.

Plusieurs policiers ont été frappés et le commissaire Joël Terry, « blessé lourdement à la clavicule », est resté « inconscient au sol pendant une dizaine de minutes », a précisé vendredi soir Laurent Lenoble, directeur de cabinet du préfet de Guyane.

Debout, visiblement affaibli et le bras relié à une perfusion, le numéro 2 de la police en Guyane a reçu samedi une délégation des « 500 frères » devant sa chambre d’hôpital. La rencontre a été filmée par la chaîne Guyane première, qui l’a retransmise en direct via Facebook live.

« Les valeurs que nous partageons sont bien plus importantes que nos différences », a déclaré l’officier. Il a exprimé son « respect » des « 500 frères » puis serré la main de ses nombreux membres présents, presque tous cagoulés. « Les forces de l’ordre ne sont pas nos ennemies. On se bat pour qu’elles travaillent dans de meilleures conditions », a dit leur porte-parole Mikaël Mancée, un policier en disponibilité, depuis l’hôpital.

Des gaz lacrymogènes ont été utilisés pour « extraire » l’officier, selon M. Lenoble, renforçant la colère de la foule, qui a ensuite jeté pierres et bouteilles contre la préfecture. Une courte vidéo des heurts de vendredi, accessible sur les réseaux sociaux, montre deux membres des « 500 frères », dont M. Mancée, devant la préfecture, tentant de protéger un policier que semblent agresser d’autres membres du collectif. Le ministre de l’Intérieur, Matthias Fekl, a « condamné avec la plus grande fermeté les violences commises contre les forces de l’ordre ». La préfecture a annoncé samedi avoir saisi le procureur de la République.