Le calendrier se joue encore de la politique. En 2017 comme en 2012, l’élection présidentielle est en partie perturbée par les vacances scolaires de Pâques, jusqu’au 2 mai dans la zone A de Bordeaux ou Lyon, mais aussi par le week-end prolongé du 7 mai. La crainte d’une désertion des isoloirs se révèle toujours aussi palpable avant le premier tour du 23 avril. Pour anticiper l’absence supposée d’une partie de leurs électeurs, les formations politiques vantent les mérites du vote par procuration allant même jusqu’à l’organiser.

Cette gestion interne des procurations par les partis, chargés de mettre en relation mandants et mandataires d’une même commune, remonte à 2012 et à la diffusion d’un clip réalisé par le Parti socialiste (PS). Généralisée depuis, la pratique se repose beaucoup sur la viralité des réseaux sociaux afin de sensibiliser plus directement les futurs votants. En marche !, le PS ou La France insoumise de Jean-Luc Mélenchon se sont particulièrement investis sur ce terrain cette année, conscients du bénéfice qu’ils peuvent en tirer dans les urnes.

Le site Internet de Jean-Luc Mélenchon dispose, par exemple, d’une application automatisée permettant « en trois clics » de mettre en contact les partisans d’une même commune. Guillaume Royer, responsable de la plate-forme jlm2017.fr, a lancé l’outil le 22 mars, après une semaine de conception : « Le but était de créer quelque chose de très simple pour permettre aux gens de voter en préservant le secret du vote. Il y a un sens politique en allant chercher les 6 millions de personnes mal inscrites. » Le projet est une « réussite inattendue » d’après le développeur, qui évoque plus de 19 000 demandes en trois semaines.

En marche ! centralise

Si la tactique digitale des équipes des candidats se ressemble, avec une présence soutenue sur les réseaux sociaux et une rubrique dédiée sur la plupart des sites Internet, l’organisation générale peut différer. Pour sa première élection politique, En marche ! a ainsi centralisé l’ensemble de sa procédure au sein de son siège parisien, au risque de couper les membres locaux de leurs partisans sur le terrain.

« Le mouvement n’est pas encore bien structuré à ce niveau. C’est un problème. Un parti se construit dans la durée grâce à la proximité de ses adhérents », déplore un responsable élection En marche ! des Hauts-de-Seine, qui tient tout de même à souligner l’efficacité de la campagne numérique du mouvement.

Le pôle communication d’Emmanuel Macron a profité de son passage à « L’Emission politique » pour engager « le sprint final » considérant que « chaque heure mène au premier tour ». Le week-end du 8 avril a été l’occasion de constituer une équipe de travail autour du vote par procuration, considéré comme « un enjeu majeur cette année encore », avec envoi appuyé de mails aux sections.

La principale mission consiste ainsi à identifier les mandants, dont les absences tiennent surtout aux départs en vacances, ou au week-end prolongé du 7 mai, et à l’expatriation de Français vivant à l’étranger. Ces derniers y ont principalement recours pour des raisons pratiques, privés notamment du vote électronique pour l’élection présidentielle.

« Dernière ligne droite »

Pour la plupart des partis, comme Les Républicains (LR), les procurations sont gérées directement par les circonscriptions, le QG de campagne ne faisant qu’aiguiller leurs électeurs vers les fédérations départementales. Le secrétaire national LR, Bernard Accoyer, a envoyé un mail, le 10 avril, pour mobiliser les cadres autour de cette question, dans la foulée du meeting de François Fillon, Porte de Versailles. « L’élection présidentielle va se jouer dans la dernière ligne droite », écrit-il, en présage d’un résultat qu’il croit « très serré au premier tour ». Pour l’ancien président de l’Assemblée nationale, cet appel « à être en responsabilité » vise à prendre conscience du fait que « chaque voix comptera » le 23 avril.

Certains n’ont pas attendu cet appel, comme dans la deuxième circonscription de la Nièvre. Patrick Frison, le représentant du candidat LR, insiste : « Il n’y a vraiment aucun problème à trouver et des mandataires et des mandants. » En témoignent, selon lui, les quatre personnes accueillies en une matinée à sa permanence.

Chargé de l’organisation des élections, le ministère de l’intérieur n’a pas de chiffres à communiquer pour le moment car aucune statistique en temps réel n’est réalisée par les commissariats, gendarmeries et tribunaux d’instance, les autorités chargées de recevoir les procurations. Un comptage sera publié « après les opérations électorales de 2017 ». Pour les élections présidentielle et législatives de 2012, un rapport de l’Inspection générale de l’administration avait évalué à 4,9 millions le nombre de procurations établies, soit une hausse de 10 % par rapport à 2007 mais « sans garantie que l’électeur n’a pas finalement voté en personne ».