Environ un million d’implants Essure ont été vendus dans le monde depuis 2011, dont 140 000 en France, selon le laboratoire Bayer HealthCare qui les fabrique. | © Ina Fassbender / Reuters / REUTERS

Le dispositif contraceptif définitif Essure, massivement utilisé en France et mis en cause pour ses nombreux effets indésirables, présente-t-il davantage de risques que de bénéfices pour les patientes ? C’est la question à laquelle s’efforcera de répondre un comité d’experts indépendants nommé par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).

Mercredi 19 avril, lors d’une réunion de travail, ouverte à la presse, au siège l’ANSM, l’association Réseau d’entraide soutien et information sur la stérilisation tubulaire (Résist), le Planning familial, l’Association nationale des centres d’IVG et de contraception (Ancic) et le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) ont livré à ce comité scientifique spécialisé temporaire (CSST) leur « retour d’expérience », tandis que l’ANSM a présenté les dernières données disponibles sur les effets indésirables signalés pour l’utilisation d’Essure.

Essure se présente sous la forme de mini-implants tubaires en nickel. Introduits sans anesthésie générale par les voies naturelles dans les trompes de Fallope, ils déclenchent une cicatrisation qui les obstruent. Mais cette méthode de stérilisation définitive et irréversible, disponible depuis 2002 et remboursée par la Sécurité sociale depuis 2005, est soupçonnée d’être à l’origine de nombreux effets secondaires neurologiques, musculaires, hémorragiques et allergiques.

Dysfonctionnements ou effets indésirables

Présidé par France Lert, spécialiste de santé publique et d’épidémiologie, et constitué de huit experts – dont trois gynécologues et un biologiste spécialiste de la toxicité des métaux –, le CSST qui doit rendre son rapport « dans le mois qui vient » en s’appuyant notamment sur les chiffres dévoilés mercredi.

Selon le docteur Brigitte Heuls, directrice des dispositifs médicaux thérapeutiques à l’ANSM, 1 087 femmes ont signalé un dysfonctionnement du dispositif ou subi un effet indésirable lié à la pose de l’implant, entre 2003 et début février 2017. Six cent quatre-vingt-deux « incidents » sont liés à l’intervention (casse ou non déploiement des implants), tandis que 457 sont survenus ultérieurement.

Certaines patientes ont été victimes des deux types d’incidents. Parmi ces « incidents », on dénombre notamment quarante grossesses, 138 migrations des implants ou perforation d’organes, 249 problèmes de saignements ou de douleurs abdominales, et 281 incidents d’une autre nature (autre type de douleur, forte fatigue, réaction allergique, dépression, etc.).

L’ANSM a également présenté les résultats d’une étude épidémiologique comparant la stérilisation par implants Essure avec celle réalisée par ligature des trompes, et conclu qu’il n’existe pas plus de risque d’affections générales avec l’une qu’avec l’autre.

Vingt mille dispositifs implantés chaque année en France

Environ un million d’implants Essure ont été vendus dans le monde depuis 2011, dont 140 000 en France, selon le laboratoire Bayer HealthCare qui les fabrique. Plus de 20 000 dispositifs sont implantés chaque année en France où, après l’âge de 40 ans, plus d’une femme sur dix recourt à la stérilisation définitive. Mais les signalements auprès de l’ANSM d’effets secondaires liés à la pose d’Essure comme à sa composition (nickel) se sont multipliés, passant, selon l’ANSM, de 42 en 2012, à 242 en 2015, puis à 162 entre janvier et octobre 2016. Trois cents autres ont été répertoriés entre début février et début avril.

Placé sous surveillance renforcée en France depuis 2015, Essure fait l’objet d’une action de groupe rassemblant des milliers de plaignantes aux Etats-Unis, et l’Agence nationale de surveillance sanitaire brésilienne (Anvisa) a suspendu sa vente, sa distribution et son utilisation, le 20 février, car le distributeur national a refusé de lui fournir des données concernant le dispositif.

Au nom du « principe de précaution », l’association Résist a demandé, en janvier, le retrait du dispositif du marché, sans être entendue par les autorités sanitaires françaises. Trois de ses membres ont déposé plainte en décembre 2016 et déclenché une procédure de demande d’indemnisation contre Bayer HealthCare. Une décision du juge des référés du tribunal de grande instance de Bobigny (Seine-Saint Denis) est attendue le 5 mai.