Dans une vitrine des Champs-Elysées après l’attaque terroriste de jeudi 20 avril. | Christophe Ena / AP

Editorial du « Monde ». Ce n’est pas une découverte. Depuis plus de deux ans, les terroristes islamistes ont fait de la France la cible privilégiée de leurs tueries et ils ont démontré, dans ce sinistre « djihad », un redoutable sens du symbole. Janvier 2015, les dessinateurs et journalistes de Charlie Hebdo, en même temps que les juifs de l’Hyper Cacher à Paris. Novembre 2015, les spectateurs et flâneurs du Stade de France, du Bataclan et des terrasses de cafés parisiens. Juin 2016, les deux fonctionnaires de police exécutés à Magnanville. 14 juillet 2016, la promenade des Anglais, à Nice, dévastée le soir de la fête nationale. Juillet 2016 encore, le père Jacques Hamel, assassiné dans son église de Saint-Etienne-du-Rouvray. Sans compter les tentatives contre des militaires qui ont échoué au Musée du Louvre et à l’aéroport d’Orly en février et en mars.

L’attaque menée à Paris, dans la soirée du 20 avril, le démontre à nouveau. En quelques secondes, ce sont trois symboles qui ont été visés. Les victimes d’abord : des policiers, chargés de la sécurité des Parisiens, tué pour l’un et grièvement blessé pour l’autre. Le lieu, ensuite, qui assure à cet attentat un écho planétaire : les Champs-Elysées, cette avenue mondialement connue et parcourue chaque année par des millions de touristes. La date, enfin : à trois jours du premier tour de l’élection présidentielle, le tueur était assuré de rappeler aux Français la menace désormais permanente qui pèse sur eux et de dramatiser le climat de ce grand rendez-vous démocratique.

Trois réponses s’imposent

Le président de la République l’a rappelé peu après ce nouvel attentat. Face à cette violence obsessionnelle, trois réponses s’imposent : la solidarité sans faille à l’égard des forces de sécurité, qui ont la mission de protéger, en première ligne, les citoyens et les institutions ; la cohésion sans faille de la nation face à des tueurs qui cherchent, à tout prix, à l’affoler, la diviser, la fracturer ; la détermination sans faille de l’Etat et de tous les services qui y concourent à traquer, combattre et neutraliser ceux qui sont engagés dans une guerre sans merci contre notre pays.

François Hollande a eu raison. La France et les Français ne doivent pas tomber dans le piège qui leur est tendu par les tueurs commandités ou franchisés par l’organisation Etat islamique. Ils ne doivent ni basculer dans la panique ni s’en remettre à ceux – la présidente et candidate du Front national en tête – qui veulent appliquer aux djihadistes, réels ou supposés, la loi du Talion que ceux-ci entendent exercer contre la France en général et contre ses forces de sécurité en particulier.

Le risque zéro n’existe pas

La protection des citoyens est un impératif catégorique. Personne ne l’ignore. Chacun, pour peu qu’il soit de bonne foi, reconnaît que les moyens et les résultats de la lutte antiterroriste sont, désormais, au premier rang des priorités et des efforts des pouvoirs publics. Après bien d’autres, l’attentat déjoué à Marseille il y a trois jours seulement l’a de nouveau démontré. Mais chacun sait également que, face à cette menace diffuse et acharnée, le risque zéro n’existe pas.

Ce n’est pas une raison pour oublier que la France est un Etat de droit et que le plus sûr moyen de le défendre est d’en respecter, autant que d’en faire respecter, les valeurs et les règles. L’on veut croire que les Français ne céderont pas, au moment de choisir leur prochain président, aux apprentis sorciers qui voudraient s’en affranchir.