L’insuffisance des précipitations hivernales compromet la recharge des nappes phréatiques. | FRANCOIS NASCIMBENI, FRANCOIS NASCIMBENI / AFP

L’été est encore loin, mais les départements de Charente, des Côtes-d’Armor et d’Ille-et-Vilaine sont déjà sous le coup d’arrêtés préfectoraux limitant les prélèvements d’eau de surface, première étape des restrictions. Les céréaliers français font part de leur angoisse d’affronter une année noire marquée par la sécheresse. La recharge des nappes souterraines grâce aux pluies tombées entre septembre 2016 et avril s’avère effectivement « faible » cette année, indique le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM). Les experts constatent une situation hétérogène au 1er avril, avec des régions « à surveiller » surtout dans la moitié nord de l’Hexagone.

La recharge hivernale en eau – déterminante pour les six mois plus chauds – est insuffisante pour plus de la moitié des nappes souterraines, 54 % précisément, qui n’ont pas pu retrouver leur niveau moyen. En 2016, à la même date, ce n’était le cas que pour 28 % d’entre elles. Et il faut noter que la situation s’est nettement redressée grâce à un mois de mars bien arrosé.

« Le Centre et le Massif central connaissent une situation à peu près conforme à la normale, de même que les Pyrénées, le Roussillon et le sud des Alpes, résume Nathalie Dörfliger, directrice du département eau, environnement, écotechnonologies au BRGM. La Beauce, le Gard, la Corse ont même un niveau supérieur à la moyenne, mais le reste du territoire accuse un déficit. » Par endroits, celui-ci excède la norme de plus de 25 %, en particulier près de la frontière du Luxembourg. Les Landes et la Champagne apparaissent aussi comme des secteurs critiques.

Forages privés

Cependant, le remplissage de certains aquifères aujourd’hui en retard indique une tendance à l’amélioration qui pourrait se confirmer si les pluies se montrent généreuses au printemps. C’est le cas des nappes de craie de Normandie et de Picardie et de certaines situées dans le bassin Adour Garonne, ou dans le sud de l’Alsace. D’autres restent au contraire orientées à la baisse alors qu’elles sont déjà nettement en deçà de leur niveau habituel : tout au long de la vallée du Rhône en particulier.

« Si l’on compare avec les trente dernières années, on constate que les déficits les plus marqués se trouvent dans les Hauts-de-France et en Bretagne », rapporte Mme Dörfliger. Dans cette région au sol granitique, les réserves souterraines se situent à moins de 100 mètres de la surface et de nombreux forages privés en prélèvent l’eau. Et, lorsque les puits se tarissent, il devient tentant de se reporter sur le réseau public d’alimentation.

Sous le sol de la métropole française, les ressources hydriques sont estimées à 100 milliards de mètres cubes dont nous prélevons environ 30 milliards de m³ par an. Les deux-tiers de l’eau potable en proviennent. Jeudi 20 avril, le BRGM a annoncé un nouvel outil scientifique capable de fournir des données sur ces gisements grâce à la télétransmission d’au moins 200 points de mesures piézométriques.

A partir d’observations sur la nature des sols et les niveaux précédents de remplissage des aquifères couplées aux données et aux prévisions météorologiques, les experts promettent une véritable « MétéEAU des nappes » d’ici deux à cinq ans.