Une manifestation à Caracas a encore dégénéré en heurts mercredi 26 avril. | JUAN BARRETO / AFP

Secoué par une vague de manifestations de l’opposition, le Venezuela a annoncé mercredi 26 avril son retrait de l’Organisation des Etats américains (OEA), accusée d’« ingérence » par le gouvernement du président Nicolas Maduro.

« Demain [jeudi] nous présenterons une plainte devant l’OEA et nous lancerons un processus qui prend 24 mois » pour faire sortir le pays sud-américain de cet organisme régional basé à Washington, a précisé à la télévision la chef de la diplomatie vénézuélienne Delcy Rodriguez.

L’OEA, dont le secrétaire général Luis Almagro a traité le chef de l’Etat vénézuélien de « dictateur », s’est réunie mercredi pour convoquer un mini-sommet des ministres des affaires étrangères de la région sur la crise vénézuélienne, sans préciser de date.

Mme Rodriguez avait déjà menacé mardi soir de quitter l’organisation si une telle réunion avait lieu. Début avril, elle avait accusé plusieurs pays de la région d’agir de concert en faveur d’une ingérence dans les affaires du Venezuela, pour « satisfaire les intérêts de Washington ».

De son côté, M. Almagro, l’un des plus critiques à l’international envers M. Maduro, avait annoncé à diverses reprises vouloir invoquer la charte démocratique de l’organisme pour obtenir la suspension de Caracas de l’OEA.

Des manifestations sous haute tension

Ce coup d’éclat diplomatique intervient alors que des affrontements ont à nouveau opposé mercredi la police et les opposants au gouvernement. Les deux groupes se sont faits face sur l’autoroute Francisco-Fajardo, voie d’accès à la capitale et théâtre des précédents heurts, sous une pluie de gaz lacrymogènes et jets d’eau d’un côté, de cocktails Molotov et de projectiles de l’autre.

Plusieurs autres défilés en faveur d’élections anticipées ont eu lieu à travers le pays. Vêtus de blanc et portant des drapeaux rouge, jaune et bleu du Venezuela, les antichavistes (du nom du défunt président Hugo Chavez, 1999-2013) n’avaient qu’un objectif : atteindre le cœur de Caracas, considéré comme un bastion du pouvoir, pour manifester devant les locaux du Défenseur du peuple, l’autorité devant veiller au respect des droits de l’homme.

Comme les autres fois, ils en ont été empêchés par les forces de l’ordre. Signe de l’atmosphère rendue irrespirable à cause des gaz lacrymogènes, une école proche des heurts à Caracas a dû être évacuée, a constaté l’AFP.

Un bilan de 28 morts

Jeudi, les députés de l’opposition, majoritaire au Parlement, ont prévu de tenir une séance dans un lieu public et de rendre hommage au dernier manifestant mort à Caracas.

Ramon Muchacho, le maire de Chacao, un quartier de Caracas, a dénoncé sur Twitter la mort de ce jeune homme de 20 ans, hospitalisé mercredi « sans signes vitaux » après avoir été touché à la poitrine par une cartouche de gaz. Le ministère public a confirmé ce décès. Un peu plus tôt, le parquet avait annoncé la mort dans la nuit précédente d’un homme de 22 ans blessé par balle lundi durant une manifestation à Valencia (nord).

Au total, on compte déjà 28 morts, selon le dernier bilan du parquet – 29 selon le chef de l’Etat – qui a dénombré aussi 437 blessés et 1 289 personnes arrêtées pour divers troubles et saccages. Ce bilan est le plus lourd depuis la vague de manifestations de 2014 qui avait fait officiellement 43 morts.

Presque toutes ces marches d’avril ont dégénéré en heurts et pillages. A cela s’est ajoutée la violence exercée par les « colectivos », des groupes de civils armés par le gouvernement, selon l’opposition. Par ailleurs, 14 journalistes au total ont été arrêtés et 106 agressés en quatre semaines, a rapporté le Syndicat national des travailleurs de la presse.

En réponse à ces manifestations de l’opposition, les soutiens du gouvernement ont marché en masse mercredi vers le palais présidentiel de Miraflores, pour écouter le chef de l’Etat.