La quinzaine de l’entre-deux-tours a été ponctuée par quelques face-à-face tendus entre les deux finalistes de la présidentielle. Et les attaques ont commencé dès le soir du premier tour.

  • Le « moment de cœur » du « fêtard de La Rotonde »

Emmanuel Macron au restaurant La Rotonde, à Paris, le 23 avril. | GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP

Lui appelle ça un « moment de cœur ». Le soir de sa victoire du premier tour, Emmanuel Macron recevait des invités dans « sa » brasserie : La Rotonde, célèbre brasserie parisienne, dans le quartier Montparnasse. Dans ce restaurant où il a ses habitudes depuis quelques années, du temps où il était encore banquier, se retrouvent soutiens politiques, conseillers…. et personnalités du showbiz et du spectacle, comme Line Renaud, Stéphane Bern ou encore Pierre Arditi.

Des festivités critiquées le soir-même par ses adversaires, qui, comme Gérald Darmanin (LR) y voit une fête « indécente », étant donné la présence du FN au second tour. D’autres la comparent à la soirée « bling bling » de Nicolas Sarkozy au Fouquet’s, le soir de sa victoire en 2007, en présence de tout le CAC 40.

Le candidat d’En Marche !, lui, tente de déminer la polémique en sortant de La Rotonde, vers 2 heures du matin : « si vous n’avez pas compris que c’était mon plaisir, ce soir, d’inviter mes secrétaires, mes officiers de sécurité, les politiques, écrivains (…), qui depuis le premier jour m’accompagnent, c’est que vous n’avez rien compris à la vie ! (...) Je n’ai pas de leçons à recevoir du petit milieu parisien. »

Mais Marine Le Pen ne s’y trompe pas. Le lendemain, elle renvoie Emmanuel Macron à l’image mondaine et élitiste de sa brasserie. Alors qu’elle est en déplacement de campagne sur un marché du Pas-de-Calais, à Rouvroy, la candidate du Front national lance à la volée : « C’est sûr que ça change de La Rotonde (...) Moi, je suis la candidate du peuple. »

Elle continue d’ailleurs à faire référence à cette soirée durant les deux semaines de l’entre-deux-tours, jusqu’à trouver un surnom à son adversaire lors de son dernier meeting de campagne, le 1er mai : « le fêtard de La Rotonde. »

  • Whirlpool

Face-à-face entre Le Pen et Macron à Whirlpool : le récit en images
Durée : 03:13

Guerre d’image sur le parking de Whirlpool, à Amiens. Mercredi 26 avril, les deux candidats se sont rendus l’un après l’autre sur le site de l’usine de sèche-linge qui doit fermer en 2018, pour être délocalisée en Pologne. Quelques 290 emplois directs sont menacés.

13 heures : Visite surprise – et éclair – de Marine Le Pen sur le parking de l’usine, sous les applaudissements et les hourras. Quelques selfies et la candidate du FN repart, vingt minutes plus tard, après avoir promis de sauver l’usine. Une provocation sur les terres d’Emmanuel Macron alors que celui-ci est justement, au même moment, en train de rencontrer l’intersyndicale, à l’invitation de cette dernière, à la chambre de commerce de la Somme.

L’effet miroir est rude pour le candidat d’En marche ! qui renvoie l’image d’un candidat froid qui préfère les institutions syndicales au contact avec les salariés, alors que celle du Front nationale apparaît comme la candidate des ouvriers. Mais la séquence n’est pas finie.

Retour sur le parking de l’usine. Peu après 15 heures, toujours à l’invitation des syndicats, Emmanuel Macron se rend auprès des ouvriers, accueillis par les sifflets et les « Marine présidente ». Il parvient finalement à calmer la tension en allant discuter avec eux, loin des caméras des médias. Son équipe de campagne filme la séquence, et le candidat qui démonte le programme de son adversaire et son « clientélisme ». Le match, mal engagé pour le candidat d’En marche !, se rééquilibre peu à peu.

  • La pêche, le poulpe et l’euro

Marine Le Pen démarre fort son entre-deux-tours et tente d’imposer une guerre d’images et de mouvements à son adversaire. Après une visite surprise à Amiens sur le parking de l’usine Whirlpool, la candidate frontiste se rend le lendemain, à l’aube, au Grau-du-Roi pour parler de la situation des pêcheurs. Accompagnée du député d’extrême droite Gilbert Collard, la candidate frontiste est montée à bord du chalutier de Charles Piot – baptisé Grâce de Dieu II –, un candidat Front national aux élections régionales de 2015.

Au cours de ce déplacement, Marine Le Pen assène qu’elle souhaite sauver « la pêche, car elle est en grand danger à cause des politiques européennes et faire découvrir cette vaste étendue qu’est la mer, cette zone économique exclusive qui est en jachère, qui n’a jamais bénéficié d’une vision de la part de nos dirigeants ». Mais alors qu’elle se trouve encore sur le bateau, Emmanuel Macron réplique immédiatement via son compte Twitter.

Les réseaux sociaux, eux, auront surtout retenu de cette séquence les images de Marine Le Pen et de Gilbert Collard s’amusant avec un poulpe sur le bateau.

  • 1er mai

Un duel à distance. Dans la dernière ligne droite de cet entre-deux-tours, il est l’heure pour les deux candidats de porter l’estocade.

En cette journée de fête du travail, chacun tient son dernier grand meeting de campagne : l’une à Villepinte (Seine-Saint-Denis), l’autre à La Villette, à Paris. Et les critiques sont acerbes. Marine Le Pen attaque la première à la mi-journée et détourne contre Emmanuel Macron la diatribe lancée par François Hollande en 2012, lors de son discours du Bourget : « L’adversaire du peuple français, c’est toujours le monde de la finance, et cette fois il a un nom, il a un visage, il a un parti, il présente sa candidature, il s’appelle Emmanuel Macron. »

Pour la candidate frontiste, l’ancien ministre de l’économie, « c’est François Hollande qui veut rester. Sa philosophie, c’est En marche ou crève ! C’est en marche vers plus de précarité (...) d’ubérisation (...) de Tafta, la déréglementation de toutes les professions… »

Quelques heures plus tard, Emmanuel Macron réplique à La Villette. Pour le candidat d’En marche !, le projet de Marine Le Pen est « un projet de repli, du protectionnisme, de l’isolationnisme, du nationalisme. Celui-ci conduit à une chose : guerre économique, misère et guerre tout court. » Et à l’ancien ministre de l’économie de lancer la dernière banderille de la journée contre son adversaire :

« Aujourd’hui, le combat est bien celui entre les deux projets choisis par les Français, strictement opposés. Celui d’une France patriotique, exigeante réformatrice (...) et de l’autre, celui d’une France réactionnaire, nationaliste, qui joue des colères du peuple. Le FN c’est le parti de l’anti-France. »
  • Le débat de l’entre-deux-tours

Un dernier violent face-à-face a opposé les deux finalistes de l’élection présidentielle, au cours du débat de l’entre-deux-tours, mercredi 3 mai. Deux heures et demie d’échange durant lesquelles les noms d’oiseaux et les accusations ont fusé.

« L’enfant chéri du système et des élites », « Hollande junior », « le candidat de la mondialisation sauvage », « la froideur du banquier d’affaires », « candidat à plat ventre »... Marine Le Pen a attaqué frontalement Emmanuel Macron, celui-ci tentant de rester sur le fond des dossiers et de pointer les incohérences de son adversaire.

La candidate du Front national a d’ailleurs multiplié les fausses informations tout au long de la soirée. Cette stratégie qui semblait délibérée, pour empêcher un débat de fond en forçant M. Macron à répondre à des attaques souvent mensongères, n’était pas sans rappeler celle de Donald Trump durant la campagne américaine.

Présidentielle 2017 : le débat entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen résumé en 5 minutes
Durée : 05:07