Eliott Lepers, entouré d’électeurs, devant le siège d’En marche ! où ils voulaient remettre la liste des 34 000 personnes qui ont envoyé un « deuxième bulletin » virtuel à Emmanuel Macron. | CÉCILE BOUANCHAUD / « LE MONDE »

Au premier tour de l’élection présidentielle, Laurent a voté pour Benoît Hamon. Marie-Céline, elle, a choisi Jean Lassalle. Quant à Séverine, dès le 23 avril, elle a fait le choix du vote utile, en glissant dans l’urne un bulletin en faveur du candidat d’En marche !. Au second tour, dimanche 7 mai, tous ont voté pour Emmanuel Macron, qui a été élu président de la République avec 66,1 % des voix.

Au lendemain de cette élection, marquée par une abstention record, Laurent, Marie-Céline, Séverine et une dizaine d’autres électeurs, aux profils et aux âges variés, ayant tous voté Emmanuel Macron « sans conviction », ont tenu à faire une mise au point devant le siège d’En marche !, dans le 15arrondissement de Paris : « Nous avons voté pour Emmanuel Macron, mais ce n’est en rien un vote d’adhésion. »

Comme eux, près de 35 000 électeurs ont participé à l’opération « Deuxième bulletin », une idée lancée durant l’entre-deux-tours par l’organisation OPEN France et Elliot Lepers, ancien militant écologiste, coutumier de ce genre d’actions numériques.

Le concept ? Inviter les électeurs sur les réseaux sociaux à remplir un bulletin virtuel, le « bulletin des convictions », en sélectionnant les priorités qu’ils aimeraient voir porter par M. Macron durant son quinquennat. Parmi ces priorités, neuf grands principes, divisés en trois catégories : « Une France juste », « Une France durable », « Une France démocratique ».

« L’idée était de faire barrage au Front national en votant pour Emmanuel Macron, mais en soulignant que nous ne soutenons pas son projet, que nous restons une force d’opposition citoyenne, pour ne pas perdre cinq ans de plus », résume Elliot Lepers, qui était, au côté de la militante féministe Caroline de Haas, l’un des initiateurs de la pétition contre la loi travail signée par plus de 1,3 million de personnes.

Cette fois le projet du deuxième bulletin n’a pas abouti à un mouvement social – « nous ne voulons pas être instrumentalisés par les syndicats et les partis », explique M. Lepers –, mais les signataires étaient invités à se rendre, lundi, devant le siège d’En marche ! pour remettre à l’équipe de M. Macron les noms des 34 247 électeurs ayant rempli un deuxième bulletin.

La loi travail dans les esprits

Leur principale préoccupation ? La loi travail, que le nouveau président compte réformer par ordonnances, d’ici à l’été. « Nous voulons lui rappeler que, selon les sondages, trois quarts des Français étaient opposés à la loi travail », résume M. Lepers.

Séverine, larges lunettes et manteau rouge, précise qu’elle n’est « pas foncièrement opposée à son programme, mais à sa future façon de gouverner », en référence à la volonté du président élu de faire passer sa loi travail sans passer par un vote devant le Parlement.

« Moi, je veux de la démocratie. Je veux lui rappeler en tant que citoyenne que j’ai des droits. »

Tous évoquent également la nécessité de mettre l’accent sur l’écologie, dénonçant le programme trop timide de M. Macron, notamment sur le diesel et la sortie du nucléaire.

Encore faut-il que le message soit reçu. Lundi, les électeurs se sont heurtés à un barrage policier les empêchant d’accéder au siège d’En marche !. Par chance, les électeurs ont croisé Benjamin Griveaux, porte-parole du mouvement. Peu enclin à engager le dialogue, il les a invités à lui « envoyer un mail ».

M. Lepers et son équipe envisagent de nouvelles actions très prochainement. « Nous ne voulons pas faire comme avec François Hollande, nous réveiller après la bataille, après la déchéance de nationalité et la loi travail. Nous serons vigilants dès le début du quinquennat, lors de la constitution de son gouvernement, puis lors de la réforme de la loi travail. » Sur les 34 000 électeurs qui ont adressé un deuxième bulletin à Emmanuel Macron, 23 000 se sont portés volontaires pour participer à de prochaines actions.

Macron président : une manifestation contre sa « politique antisociale »
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