Arrivée d’Emmanuel Macron au Louvre, dimanche 7 mai. | Philippe Lopez / AP

On a l’impression qu’Emmanuel Macron va finir par embrasser l’écran. Ce jour-là, il suit à la télévision la conférence de presse de François Bayrou, qui lui apporte son soutien. « Il fait ça très bien », susurre-t-il avec un brin d’émotion en n’arrêtant pas d’ajuster sa fine cravate noire. Quelques instants plus tôt, le candidat d’En marche ! a annoncé à son équipe de campagne que le président du MoDem allait appeler à voter pour lui dès lui premier tour. « Ça ne sort pas d’ici », lance-t-il à son staff, alors que quelqu’un pianote déjà sur son téléphone portable. Plus tard, on voit M. Macron dicter sa déclaration à l’AFP après l’intervention de M. Bayrou.

Ces scènes sont extraites d’Emmanuel Macron, les coulisses d’une victoire, un documentaire sans voix off de quatre-vingt dix minutes que doit diffuser TF1 lundi 8 mai à 21 heures. Pendant cinq mois, Yann L’Hénoret a suivi avec une caméra Emmanuel Macron, qui portait en permanence un micro-cravate. Le réalisateur, à qui l’on doit le film Dans l’ombre de Teddy Riner (2016), a obtenu du candidat de pouvoir capter tous ses faits et gestes. Seuls les moments privés ont échappé à son regard. Le Monde a pu visionner vingt-cinq minutes de ce film dont le montage ultime a été effectué dans la nuit de dimanche à lundi.

On y découvre un Emmanuel Macron détendu, calme et déterminé. Alors que Paris bruisse de rumeurs après que François Fillon a annulé à la dernière minute sa visite au Salon de l’agriculture en raison de l’annonce probable de sa mise en examen, M. Macron ne semble pas perturbé par un possible renoncement du candidat désigné par la primaire de la droite. « Il ne renoncera pas », assure-t-il, pendant que son entourage s’agite.

Quelques minutes avant le début du débat qui oppose les cinq principaux postulants à l’Elysée, M. Macron plaisante, comme un enfant, mimant un combat de boxe dans sa loge. A deux semaines du premier tour, il est plus grave. « Mes enfants, il reste quinze jours », commence-t-il en badinant avant de marteler : « Ça doit vibrer, on peut se faire déballonner. » « On a trois programmes à pilonner », particulièrement celui de Jean-Luc Mélenchon, précise-t-il.

La trajectoire d’un homme

Le spectateur assiste à tous les moments-clés de la campagne : du renoncement de François Hollande jusqu’à la victoire finale, en passant par la gestion de ses déclarations contestées sur La Manif pour tous ou celles sur la colonisation.

Ce n’est pas la première fois qu’un candidat est suivi tout au long de sa campagne par une caméra de télévision. Raymond Depardon l’avait fait avec Valéry Giscard d’Estaing (1974, une partie de campagne). Yann L’Hénoret s’est inspiré du film The War Room, réalisé en 1993 par Chris Hegedus et Donn Alan Pennebaker, sur l’ascension de Bill Clinton. Mais Emmanuel Macron, les coulisses d’une victoire est novateur à bien des égards. C’est la première fois qu’un film de campagne est diffusé aussi rapidement — il aura fallu attendre près de trente ans pour voir celui sur Giscard. Le candidat d’En marche ! n’a pas eu de droit de regard sur le montage. En revanche, pendant le tournage, il pouvait couper son micro-cravate à tout instant, « ce qu’il n’a jamais fait », assurent les équipes de production.

Au départ, il ne s’agissait pas de faire un film politique, mais de raconter la trajectoire d’un homme qui n’était pas le favori de cette élection. Les circonstances ont fait de cette coproduction entre Troisième œil Productions et Black Dynamite Production un document exceptionnel. Seules 1 % des prises de vues ont été utilisées. Les rushes pourraient être remontés pour une autre version. La production est en discussion avec Netflix pour un format plus long.

Le film actuel sera rediffusé mardi 9 mai à 20 heures sur LCI. Commencé sans diffuseur, Emmanuel Macron, les coulisses d’une victoire avait été proposé à toutes les chaînes. En acceptant la première le projet, TF1 a réussi un très beau coup.