Magazine sur Canal+ à 22 h 50

Virginies Despentes avec Augustin Trapenard aux Buttes-Chaumont à Paris | Canal +

Avec Patti Smith pour prestigieuse marraine, Augustin Trapenard lançait il y a tout juste un an « 21 cm – Canal littéraire » : un magazine avec lequel, de manière vive, piquante et décalée, le journaliste est parvenu à dépoussiérer les codes de l’entretien littéraire. Et insuffler une jolie bouffée d’air frais en transformant le classique face-à-face en plateau en une promenade intimiste dans les lieux marquants ou de prédilection d’un écrivain, entrecoupée d’une petite pause bibliophile et musicale au domicile du journaliste.

Et de musique, il est forcément question avec la romancière Virginie Despentes, qui découvrit adolescente le rock, suivit vers 17 ans les Bérurier Noir dans toute la France au point d’intégrer leur service d’ordre, chanta dans un groupe de rap, et qui reconnaît aujourd’hui « avoir tout appris de la musique », notamment de « ne pas avoir peur d’appartenir à une minorité culturelle ». Minorité du reste qu’elle se verra contrainte de quitter après l’énorme succès rencontré avec Baise-moi (1993), son premier roman, encensé par les critiques rock. Un livre qu’elle compare volontiers à « un disque composé avec trois accords basiques et un marteau pour casser et sonner ».

Virginie Despentes dans les pas de Vernon Subutex | Canal+

Infusant son écriture et son imaginaire, la musique est toujours là, notamment à travers la figure de Vernon Subutex, cet ex-disquaire qui donne son nom à une formidable trilogie dont le dernier volume très attendu paraît chez Grasset, le 24 mai. Tout naturellement, c’est aux Buttes-Chaumont qu’Augustin Trapenard a choisi d’entraîner la romancière. Dans les pas de son héros déchu et d’une foule de personnages avec lesquels elle dresse la carte mentale de sa génération (elle est née en 1969), Virginie Despentes évoque l’influence des séries télé dans la composition de ce triptyque, mais aussi les auteurs qui l’ont nourrie et influencée tels Balzac, Maupassant, Dostoïevski, Tolstoï…

Si l’ex-punk reconnaît s’être assagie avec le temps, délaissant l’un de ses moteurs, la colère (« c’était devenu un problème car ça détruit ce que tu as, ce qui te plaît »), cette « prolote de la féminité », qui se refuse à voir dans la prostitution un mode de domination, n’a cependant rien perdu de son insoumission à l’ordre établi, ni sa volonté de bousculer les lignes et les repères ; à commencer par ceux qui régissent les rapports entre les femmes et les hommes. Radicalement libre, sincère et touchante, ainsi nous apparaît-elle dans le clair-obscur de cette déambulation parisienne perlée de rires et d’émotions.