A Paris, en 2012. | FRED DUFOUR / AFP

Ils ont senti le vent du boulet, les cinquante-neuf salariés d’IBM France qui devaient faire l’objet d’un licenciement sec imminent dans le cadre d’un plan social datant de 2016. Mais, finalement, « ils restent chez IBM, ils ont du travail », a fait savoir une porte-parole de la direction.

La cour administrative d’appel de Versailles a en effet confirmé, mardi 9 mai, l’annulation de l’homologation du plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) délivrée en août 2016 par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi d’Ile-de-France (Direccte).

Ce PSE, qui avait été élaboré unilatéralement par l’employeur en l’absence d’accord avec les syndicats, avait été, en première instance, retoqué par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, le 12 décembre 2016.

« Cela aurait été une première dans l’histoire d’IBM France »

En cause, la définition des catégories professionnelles touchées par la suppression de trois cent soixante postes prévue au sein de la seule entité Global Technology Services-Infrastructure Services (GTS-IS). Ces catégories servent à l’application des critères d’ordre de licenciement.

Selon les juges, la Direccte n’aurait pas dû valider le PSE dans la mesure où, pour les catégories professionnelles concernées, le périmètre de ce plan aurait dû inclure une autre entité, GTS, où se trouvent des salariés exerçant des « fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune », conformément au code du travail.

Cependant, sans attendre ces décisions de justice, la direction avait mis en œuvre ce PSE dès octobre 2016. Ce dernier prévoyait des mesures de départs volontaires, des retraites et des préretraites. Pour atteindre son objectif, la direction avait aussi prévu la possibilité de licenciements secs, « ce qui aurait été une première dans l’histoire d’IBM France », souligne Pierry Poquet, délégué syndical central UNSA, première organisation dans l’entreprise.

Face à ce risque, poursuit-il, les syndicats ont, eux aussi, pris une décision « historique, en construisant une intersyndicale qui n’a jamais été aussi large », réunissant l’UNSA, la CGC, la CFDT, la CGT, la CFTC et FO. S’est joint à eux pour aller en justice le comité central d’entreprise. Et « on a gagné », se félicite le délégué.

« Les restructurations sont permanentes »

De son côté, la direction dit qu’elle « étudie les recours possibles », qui, dans ce cas, se feraient devant le Conseil d’Etat. Celui-ci se prononcerait dans un délai d’un ou deux ans, dit un syndicaliste.

Après la décision de la cour d’appel, certains salariés s’interrogent, sur le blog de l’UNSA : « Quels sont les recours possibles pour les personnes qui ont accepté, sous l’effet de la peur du licenciement, de partir ou d’aller dans une autre entité IBM, à Lille, par exemple ? »

A quoi M. Poquet répond que, comme l’homologation a été annulée, les salariés partis dans une autre voie doivent, s’ils le demandent, « être réintégrés ou indemnisés ». « C’est la loi. »

La direction rejette, elle, toute éventualité de réintégration. Sur le blog, d’autres estiment que pour les personnes qui « ont été mises sur la touche » et qui devaient être licenciées, « cela va être dur de réintégrer IBM, alors qu’on ne veut plus d’eux ».

Les syndicats restent sur leurs gardes. Les rescapés du licenciement sec n’ont « plus de poste, plus de travail. Il faut qu’on surveille les ruptures conventionnelles » pour détecter les pressions éventuelles, dit-on à la CGT. De toute façon, « les restructurations sont permanentes », souligne le syndicat. Ce plan social était le cinquième depuis 2012. « On sait très bien qu’IBM va continuer à dégraisser : 1 000 emplois devraient être supprimés d’ici à la fin de 2018. »