Si le renouvellement est en marche, la recomposition se fait attendre. Malgré son envie de briser les clivages, La République en marche ! n’a pour le moment pas réussi à attirer des personnalités importantes de la droite. Au milieu des 428 candidats finalement investis, jeudi 11 mai, on reconnaît certes quelques juppéistes comme Aurore Bergé, ancien membre de l’équipe du maire de Bordeaux et conseillère municipale à Magny-les-Hameaux (Yvelines), investie dans la 10e circonscription des Yvelines. Mais aussi Marie Guevenoux (9e de l’Essonne), ancienne présidente des jeunes de l’UMP et chargée de la collecte des dons pour la campagne d’Alain Juppé pendant la primaire, ou encore Blaise Mistler (4e circonscription de la Manche), ancien collaborateur de Jean-Pierre Raffarin et de Dominique de Villepin.

Pas de gros poissons donc. Aucun député sortant issu de LR, ni aucun candidat investi par la droite n’a pour le moment délaissé son camp. Ce qui ne veut pas dire que les choses sont figées. La stratégie des équipes de M. Macron a été de temporiser en ne mettant pas de candidats La République en marche ! face à certaines personnalités susceptibles de basculer. C’est le cas à la fois pour les juppéistes Gilles Boyer dans la 8e circonscription des Hauts-de-Seine, Thierry Solère dans la 9e circonscription de Hauts-de-Seine et Pierre-Yves Bournazel dans la 18e circonscription de Paris ; mais aussi pour Bruno Le Maire dans la 1re circonscription de l’Eure, ainsi que ses soutiens Franck Riester dans la 5e circonscription de Seine-et-Marne et Laure de La Raudière dans la 3e circonscription d’Indre-et-Loire. En Seine-Maritime, la formation de M. Macron n’a pas non plus présenté à ce stade de candidat contre Agnès Firmin-Le Bodo, candidate dans la circonscription du juppéiste Edouard Philippe, qui ne se représente pas et fait figure de prétendant au poste de premier ministre. Idem dans la circonscription de Benoist Apparu (la 4e de la Marne), un autre fidèle du maire de Bordeaux, qui ne brigue pas non plus de nouveau mandat parlementaire.

De quoi leur laisser du temps pour réfléchir. La République en marche ! ne pouvait de toute façon pas faire autrement. La plupart de ces personnalités ont en effet posé un préalable avant de rejoindre M. Macron : que le premier ministre nommé soit issu de la droite ou du centre droit. Hors de question de lâcher son étiquette LR sans être sûr de la zone d’atterrissage. Et cette nomination n’interviendra que dimanche ou en début de semaine prochaine.

« Semer la zizanie au sein de la droite »

Lors de sa conférence de presse, Richard Ferrand a donc précisé que les derniers candidats seraient investis d’ici à mercredi prochain pour maintenir « vivant un espace permettant à la recomposition du paysage politique français de se concrétiser encore ». Cet affichage en creux des noms désirés a irrité certains des candidats LR visés. Même si leurs noms circulaient déjà depuis plusieurs jours, ils se retrouvent un peu plus dans la lumière. « L’objectif, c’est de semer la zizanie au sein de la droite », souffle l’un d’entre eux, en se montrant mal à l’aise d’être « soupçonné de vouloir aller chercher Macron ».

Pour Nathalie Kosciusko-Morizet, la situation a évolué. Dans un premier temps, la liste des candidats investis par La République en marche ! ne faisait apparaître aucun candidat dans sa circonscription, la 2e de Paris. Mais près de deux heures plus tard, une liste mise à jour a été envoyée aux médias avec Gilles Le Gendre, un candidat pro-Macron face à NKM.

Au parti LR, on observe ces tentatives de débauchage avec beaucoup d’attention. Le secrétaire général du parti, Bernard Accoyer, a passé du temps ces derniers jours à parler avec de nombreux candidats investis qui ont été contactés par les équipes Macron. « En marche ! procède à une synthèse très hollandaise du renouvellement. 100 % des parlementaires investis par En marche ! sont des socialistes ! » a-t-il dénoncé en se réjouissant que « toutes les tentatives de débauchage de ces derniers jours aient échoué ». Même ton ironique du côté de François Baroin, chef de file LR pour les législatives. « Il ne faut pas confondre une logique d’alliance politique et la recomposition politique. Cette recomposition interviendra. Ce sont les Français qui la feront. Le reste, ce ne sont pas des prises de guerre, ce sont plutôt des prises d’otages », a-t-il asséné lors d’un déplacement dans le Nord où il a dénoncé « une opération de recyclage du Parti socialiste en déshérence ».