Jean-Michel Fauvergue le 10 mai. | FRANCOIS GUILLOT / AFP

« C’est un véritable chef de guerre. » La formule revient comme un credo dans chacune des interviews de Jean-Michel Fauvergue lorsqu’il parle d’Emmanuel Macron. Dans la bouche de l’ancien patron du RAID, l’unité d’intervention d’élite de la police, le propos fait autorité. Ce n’est sûrement pas un hasard si cette figure de l’antiterrorisme faisait partie des tout premiers candidats aux législatives officiellement investis par En marche ! Certains y voient une prise de guerre. Une guerre de l’image puisque en termes de capital politique, Jean-Michel Fauvergue part de zéro. Son atout, c’est sa maison d’origine, le ministère de l’intérieur, au sein duquel le jeune président de la République ne dispose pas des réseaux internes d’un Nicolas Sarkozy. Les soutiens qui se sont manifestés jusque-là en faveur de M. Macron sont des cadres retraités de la police.

Jean-Michel Fauvergue, 60 ans, est donc la caution musclée de l’équipe de campagne législative du nouveau chef de l’Etat. « Je suis policier depuis trente-neuf ans et, ces quatre dernières années, j’ai vécu tous les événements que vous connaissez », résume l’intéressé. L’assaut de l’Hyper Cacher contre Amedy Coulibaly et celui du Bataclan mais aussi celui de Saint-Denis, où s’était retranchée une partie du commando du 13 novembre. M. Fauvergue explique avoir apporté son analyse pour l’élaboration du programme d’En marche !, « en particulier sur l’antiterrorisme ».

« Tolérance zéro »

Aujourd’hui, il est candidat dans la 8e circonscription de la Seine-et-Marne : « J’y vis depuis vingt ans, je ne suis pas hors sol. » Au sein du ministère de l’intérieur, son entrée en politique est regardée avec curiosité. M. Fauvergue bénéficie d’un capital sympathie certain mais il n’est pas décrit en grand stratège ou communicant. Le contenu de ses récents comptes Twitter et Facebook l’atteste. Lui-même se dit d’un « naturel très discret ». En interne, son départ du RAID, annoncé dès le mois de mars alors qu’il ne devait prendre sa retraite qu’à l’automne 2017, se comprend surtout à la lumière du mauvais traitement qui lui était réservé depuis quelque temps place Beauvau.

En cause : le compte rendu erroné qu’il a fait de l’assaut de ses hommes à Saint-Denis le 18 novembre, repris sans réserve et publiquement par le ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve. Au lendemain de l’intervention, M. Fauvergue lui-même est envoyé sur le front médiatique où il raconte comment ses hommes ont neutralisé deux terroristes et leurs complices, au bout de sept heures. Il parle de l’opération « la plus violente » qu’il ait connue, des « rafales incessantes » de Kalachnikov, des « jets de grenades », des policiers blessés… On apprendra rapidement que face au RAID et à leurs 1 500 munitions tirées, les personnes présentes dans l’appartement n’avaient en réalité qu’un pistolet automatique et un gilet explosif.

Cet épisode aux accents de ridicule aurait ostracisé M. Fauvergue. Lui balaye le sujet, qu’il résume à une « polémique de journalistes » et dit avoir voulu prendre congé de son administration pour « continuer à servir [ses] concitoyens ». Il dit s’être intéressé à tous les candidats et a trouvé en M. Macron « un homme ouvert et à la puissance d’analyse très forte ». Il se retrouve dans le programme : « On est sur la tolérance zéro, le renforcement des effectifs, la création de places de prison, la coordination du renseignement directement sous le contrôle du chef de l’Etat, la judiciarisation automatique des retours de Syrie avec placement dans des environnements séparés, la continuation des frappes à l’extérieur… »

S’il a l’oreille du président, il pourrait plaider pour un commandement commun du GIGN et du RAID, les unités d’élite de la gendarmerie et de la police. Quant à la BRI, qui relève de la préfecture de police de Paris, Jean-Michel Fauvergue n’avait pas caché à son endroit un certain dédain, devant la commission d’enquête parlementaire sur les attentats. La concurrence entre les deux unités est notoire. A propos de l’intervention au Bataclan, où la BRI était à la manœuvre et le RAID en appui, M. Fauvergue disait : « De fait, quelque chose ne va pas lorsqu’un groupe spécialisé de compétence nationale se met à la disposition d’un groupe non spécialisé de compétence locale. »