« L’exécutif français s’apprête à désigner une très large partie des membres de l’Assemblée législative » (Photo: Emmanuel Macron  le 26 avril à Arras). | ERIC FEFERBERG / AFP

TRIBUNE. Emmanuel Macron a d’ores et déjà contribué à rénover la politique française en faisant émerger un mouvement neuf, des têtes nouvelles, et en mettant à la retraite une bonne partie des vieux cadres socialistes et républicains qui se partageaient le pouvoir depuis trente ans. Souffle démocratique incontestable. Mais cela ne résout pas toutes les questions sur la démocratie posées par En marche ! et son fondateur.

La structure du mouvement est certainement la plus verticale de tous les grands partis politiques français. Les leaders sont tous désignés d’en haut sans aucune concertation locale. Plus significatif encore : la totalité des candidats à la députation est sélectionnée par une commission centrale, leur profil devant correspondre à des critères définis par Emmanuel Macron. Ce centralisme est quasi unique, tandis que la plupart des partis pratiquent un mode de désignation par la base qui est ensuite plus ou moins « validée » et « corrigée » par le sommet. L’exécutif français s’apprête donc à désigner une très large partie des membres de l’Assemblée législative.

Ces futurs députés sans base locale, qui seront paradoxalement affaiblis par la saine réforme du non-cumul des mandats, ne seront redevables qu’envers le président élu. L’on peut imaginer que, dans l’optique de leur éventuelle désignation pour un nombre réduit de circonscriptions — Emmanuel Macron envisageant de ramener le nombre de députés de 577 à 300 —, ils se montreront d’une docilité absolue. Premier signe très inquiétant dans une démocratie où l’équilibre des pouvoirs reste précaire.

Sous la houlette de hauts fonctionnaires

Cette inquiétude ne peut pas manquer d’être aggravée par l’examen de l’entourage du nouveau président. A l’image de celui-ci, il est très largement constitué de hauts fonctionnaires, qu’Emmanuel Macron a croisés au cours de ses années à Bercy, à l’Elysée et autres ministères.

Le futur exécutif sera donc sous la houlette de ces hauts fonctionnaires expérimentés, dont beaucoup participaient au précédent gouvernement et n’auront même pas à faire leurs cartons. Hauts fonctionnaires expérimentés et bénéficiant de la confiance du président versus députés inexpérimentés et devant tout à ce même président. Le match s’annonce tellement déséquilibré qu’on en frémit.

La France souffre depuis longtemps de son excessive centralisation autour de l’exécutif et de l’absence de contre-pouvoirs, législatifs et juridiques. On peut craindre que les timides tentatives engagées ces dernières années — question prioritaire de constitutionnalité, limitation à un seul 49.3 par session —, ne soient balayées par le nouveau président. Sur ce sujet, on attend de lui des gestes forts et pas seulement une cosmétique « loi de moralisation de la politique française ».

L’ONG CleanTuesday, association créée en 2008, promeut et développe les technologies propres (« Cleantech »).