La Bretagne a déjà connu un épisode de sécheresse en novembre 2015, comme ici, sur le lac de Drennec (Finistère). | FRED TANNEAU / AFP

Face à la sécheresse qui persiste depuis cet hiver en Bretagne, la préfecture des Côtes-d’Armor a pris un arrêté le 11 mai visant à économiser l’eau potable. Désormais, entre 10 heures et 18 heures, il sera interdit d’arroser les pelouses et jardins, les terrains de sport ou encore les champs de culture. Pierre Bessin, directeur départemental des territoires et de la mer, fait le point sur la situation.

Comment qualifiez-vous cet épisode de sécheresse ?

La situation est absolument exceptionnelle, c’est probablement la plus grave sécheresse connue de l’histoire. Même les années 1976 et 1990, qui servent de référence, n’ont pas eu un tel déficit pluviométrique. En temps normal, les mois de septembre et octobre permettent aux nappes phréatiques de se recharger. Mais cette année, il est tombé seulement 320 mm d’eau sur cette période, soit 36 % de moins que la normale. A cause de sa géologie faite de roches fracturées, le sous-sol de la Bretagne contient peu de nappes et celles-ci ne sont pas profondes. C’est l’inverse du bassin parisien, où les réserves sont immenses.

Les conséquences de ce déficit pluviométrique sont-elles déjà visibles ?

Pour l’instant, la sécheresse se voit peu mais les agriculteurs risquent d’être particulièrement touchés dans les prochains mois. Certains voient déjà leurs stocks fourragers diminuer fortement. Le risque est réel si le temps sec continue car l’herbe ne pousserait plus suffisamment. Les industriels aussi risquent de manquer d’eau. En Bretagne, ces deux secteurs ont l’habitude de puiser dans des forages privés. Une fois ceux-ci épuisés, ils pourraient soudainement se reporter sur le réseau de distribution d’eau potable.

Nos données sur la consommation d’eau laissent présumer que certaines de ces nappes sont déjà à sec. Paradoxalement, les quatre barrages qui alimentent la majorité du département sont pleins car nous avons fait l’effort de constituer des stocks suffisants pour passer l’été sans difficulté. Pour cela, il a fallu retenir les débits, ce qui explique le faible niveau des rivières.

S’agit-il seulement de mesures de prévention ?

Disons que nous en sommes plutôt au stade de l’urgence. Les mesures de prévention ont été mises en place dès janvier par le comité sécheresse [interdiction de lavage des véhicules, des bâtiments et de la voirie, fermeture des fontaines publiques, réduction des débits pour augmenter le stock des barrages].

Les restrictions supplémentaires sont assez simples à mettre en œuvre. Par exemple, nous interdisons l’irrigation agricole et l’arrosage des pelouses entre 10 heures et 18 heures car c’est à ce moment-là que l’évapotranspiration des plantes est la plus forte. Même si la population bretonne est globalement très sensible aux problématiques liées à l’eau, il y a encore un travail de sensibilisation à mener auprès de certaines communes. Toutes ces mesures n’ont rien d’extraordinaire, elles existent depuis 1992 avec la loi sur l’eau. Quand à la date de leur levée, nous ne pouvons pas nous prononcer pour le moment, elle sera dictée par les conditions météorologiques.