Des chiots congelés, à la suite de l’intervention de l’huissier de justice. | Animal Cross

La sanction prononcée dans l’affaire de la Société protectrice des animaux de Pau (Pyrénées-Atlantiques) est finalement très légère. L’association Animal Cross, qui avait porté plainte devant l’ordre national des vétérinaires, accusait d’anciens soigneurs d’avoir procédé à des euthanasies « massives » de chiens et de chats et à des actes de maltraitance entre 2010 et 2014. Dans une décision rendue mercredi 17 mai, la chambre de discipline de Nouvelle-Aquitaine a jugé que la vétérinaire qui intervenait à l’époque dans l’établissement béarnais n’était pas responsable des principaux faits reprochés.

La jeune femme a reçu une peine d’avertissement pour un seul chef d’accusation, retenu partiellement. « Elle a été déclarée coupable d’avoir eu connaissance de ce que les responsables du refuge utilisaient de l’éther pour tuer chiots et chatons et de ne pas avoir dénoncé cette pratique alors que son devoir lui imposait », indique le docteur vétérinaire Olivier Ramette, le secrétaire du greffe de la chambre de discipline.

La vétérinaire a été relaxée pour les autres faits dénoncés par l’association. N’ont pas été retenues les accusations d’euthanasies massives, de non-respect du délai légal de fourrière, de produit létal injecté dans le cœur sans anesthésie préalable ou d’animaux qui s’endormaient à jamais dans des congélateurs.

Pas de « nécessité » de tuer

« Cette décision est malheureusement une nouvelle fois le signe que la qualité d’être sensible est niée à l’animal, regrette Benoît Thomé, le président d’Animal Cross, qui fait appel de la décision. Notre accusation était pourtant étayée par un constat d’huissier exécuté sur autorisation du tribunal de Pau. » Il dénonce le rôle de la direction départementale de protection des populations, qui « n’a pas contribué à la manifestation de la vérité en omettant de préciser lors de l’audience le fait qu’elle n’avait pas contrôlé si les animaux avaient été tués avant ou après le délai légal de huit jours ouvrés » – une période, prévue par le code rural, qui débute après le recueil des animaux par la fourrière et qui doit permettre à leurs propriétaires de les réclamer.

« Cette décision démontre que la vétérinaire a toujours exercé son métier de manière cohérente et professionnelle, se réjouit de son côté son avocat, Julien Soulié. Elle montre aussi le caractère excessif des actions menées par ce type d’associations, qui tirent à vue contre des gens qui ne sont pas responsables. Il y a une confusion entre la gestion de la SPA de Pau et la pratique de la vétérinaire, qui n’intervenait que comme prestataire de service. Cette affaire lui a causé des dégâts personnels. »

Animal Cross accusait la SPA de Pau d’avoir tué plus de 1 700 animaux adultes entre 2010 et 2013. En se basant sur des registres saisis par un huissier et sur des déclarations de salariés, elle estimait qu’en 2013, 56 % des chiens et des chats éliminés l’avaient été avant le délai légal. L’association jugeait en outre qu’il n’y avait pas de « nécessité » de tuer les animaux, rappelant que le chenil avait encore beaucoup de places disponibles. Enfin, elle citait des témoignages de transporteurs et de soigneurs attestant de l’utilisation d’éther pour asphyxier les bêtes.

Appel à davantage de « transparence »

Au contraire, selon la défense, la vétérinaire avait pour « seule information » le fait qu’un soigneur « allait chercher de l’éther en pharmacie ». « N’exerçant que depuis quelques mois et ne venant que tous les quinze jours à la SPA, elle n’avait pas pour mission, en plus de son travail, de mener une enquête sur l’utilisation réelle de ce produit », avait rétorqué son avocat, lors de l’audience du 10 mai. Il avait jugé que les euthanasies, lorsqu’elles avaient lieu, étaient « justifiées par l’état sanitaire dégradé des animaux » et que le délai légal était toujours respecté.

Animal Cross avait déjà été débouté d’une première plainte devant le tribunal de grande instance de Pau en juin 2016. La justice avait conclu par un simple rappel à la loi à l’égard de l’un des soigneurs, licencié en 2014. L’association, qui s’est de nouveau constituée partie civile auprès du tribunal, veut continuer le combat. Elle appelle tous les refuges à la « transparence », à publier le nombre d’euthanasies et leurs causes. Elle leur demande aussi d’accepter un « contrôle indépendant de celui des services de l’Etat ».

Le refuge de la SPA de Pau – qui fait partie de la Confédération nationale des SPA de France et non pas de la SPA historique de Paris – est aujourd’hui fermé, pour des raisons d’insalubrité. En attendant la reconstruction de l’établissement, « dans les mois qui viennent » selon les élus de l’agglomération, les animaux ont été envoyés dans une fourrière à Monein, à 20 km de Pau.