Huitième titre de champion de France : ça valait bien quelques confettis. | BORIS HORVAT / AFP

Impensable en début de saison, le titre de l’AS Monaco a été celui d’une équipe jeune, joueuse et construite pièce par pièce par l’entraîneur portugais Leonardo Jardim et son prédécesseur Claudio Ranieri. Une victoire réjouissante, qui ne doit pas non plus faire oublier les spécificités fiscales et le modèle économique particulier de cet AS Monaco.

2,81

C’est la moyenne de buts par match de l’AS Monaco, qui a un peu faibli en deuxième partie de saison mais reste exceptionnelle. Avant la dernière journée (déplacement à Rennes), c’est la plus élevée dans l’histoire récente devant celle du Paris-Saint-Germain l’an dernier : Monaco a déjà inscrit 104 buts contre 102 pour Paris. Il aurait fallu marquer plus de trois buts par match pour battre le record du Racing Club Paris, auteur de 118 buts en 1959-1960.

6,93

Kylian Mbappé n’est pas pour rien dans ce rythme incroyable qui a ridiculisé certaines équipes de Ligue 1, reparties de Louis-II avec un lourd supplément bagages (6 buts pour Montpellier et Nancy, 7 pour Rennes en Coupe de la Ligue). Mbappé a pourtant été remplaçant durant la première partie de la saison, en raison de son jeune âge, ce qui a poussé son père à s’en plaindre publiquement.

Avant un dernier match à disputer, il a atteint un ratio de 15 buts en 16 titularisations, plus huit passes décisives. Kylian Mbappé, 18 ans, a donc été décisif toutes les 61 minutes en moyenne.

But Kylian MBAPPE (19') / AS Monaco - AS Saint-Etienne (2-0) - / 2016-17

Ses notes dans le journal L’Equipe ont reflété sa régularité au plus haut niveau : sa moyenne est de 6,93 par match, du jamais-vu de mémoire de lecteur du quotidien sportif – mais peut-être serons-nous démentis par ses archivistes. N’ayant pas été noté sur au moins la moitié des rencontres, Mbappé ne figurera pas au sommet de ce classement en fin de saison. Celui-ci est dominé par son coéquipier Thomas Lemar, avec 6,39 de moyenne.

31

En marquant – fort joliment – le premier but de la rencontre face à Saint-Etienne mercredi, Kylian Mbappé a permis à l’ASM de battre un record de la Ligue 1 : le nombre de matches consécutifs en marquant au moins un but (31). Il était détenu par l’Olympique de Marseille depuis… soixante-dix-neuf ans.

Nice, lors de la sixième journée le 21 septembre, est la seule équipe à être restée solide face à l’attaque monégasque. Monaco avait pourtant cadré neuf tirs ce soir-là.

AS Monaco - OGC Nice (3-0) - Résumé - (ASM - OGCN) / 2016-17

92 points

En attendant la dernière journée, l’AS Monaco a déjà atteint le deuxième total de points dans le championnat de France de première division. Le premier est détenu depuis l’an dernier par le Paris-Saint-Germain, avec 96 points. Une victoire à Rennes, samedi, n’y suffirait donc pas.

Où Monaco a-t-il laissé filer ce record ? Pas dans la dernière ligne droite en tout cas : les Monégasques restent sur onze victoires consécutives, série en cours. Monaco a subi trois défaites cette saison en championnat, toutes en première partie de saison : contre Lyon (1-3) et à Toulouse (3-3) et Nice (4-0).

145 millions

C’était le budget de Monaco cette saison, selon L’Equipe. Loin des 500 millions estimés pour le Paris-Saint-Germain. Un écart qui justifiait le cinquième sacre annoncé du club de la capitale, soutenu par le fonds souverain qatari.

Lorsque l’homme d’affaires russe Dmitri Rybolovlev est arrivé dans la Principauté en 2011, il a investi massivement. Le fair-play financier mis en place par l’UEFA a forcé le club à « redimensionner son projet », comme il l’a lui-même expliqué. Lorsque l’UEFA a sanctionné Monaco en 2015 pour ses budgets en déficit, le club s’est engagé à être à l’équilibre en 2016-17, sous peine d’une amende de dix millions d’euros.

Dmitri Rybolovlev a racheté le club en 2011, mais l’UEFA a freiné l’appétit de titres du milliardaire russe. | BORIS HORVAT / AFP

Il a ainsi fait passer son budget prévisionnel, cette saison, de 250 millions à 145 millions d’euros. Ce qui reflète davantage la réalité des rentrées d’argent de l’ASM, très handicapé par sa billetterie et ses faibles revenus en produits dérivés. Monaco reste sous surveillance de l’UEFA jusqu’à la saison prochaine.

Les bénéfices tirés de son excellent parcours en Ligue des champions devraient lui permettre d’afficher un budget en hausse la saison prochaine.

La différence entre les deux clubs se reflète aussi dans la masse salariale totale, 3,5 fois inférieure à celle du Paris-Saint-Germain la saison dernière selon les chiffres de la Direction nationale du contrôle de gestion (DNCG). Un rapport qui devait être sensiblement inférieur cette saison, Monaco s’étant alourdi des salaires de Falcao, Benjamin Mendy et Djibril Sidibé, tandis que Paris s’était allégé de ceux de Zlatan Ibrahimovic et David Luiz.

0 %

C’est le taux d’impôt sur le revenu dont s’acquitte l’AS Monaco pour ses joueurs étrangers, un avantage considérable puisque sept de ses dix plus gros salaires ne sont pas Français. Par ailleurs, l’AS Monaco n’a pas été concernée par la taxe exceptionnelle sur les hautes rémunérations, appliquée en 2013 et 2014, économisant chaque année une vingtaine de millions d’euros.

En 2014, la Ligue de football professionnel (LFP) avait obtenu de l’AS Monaco un versement de 50 millions d’euros pour compenser sa situation fiscale. Mais le Conseil d’Etat a jugé la transaction illégale et cassé cet accord, pour la plus grande joie du trésorier de l’ASM.

3

C’est le nombre de joueurs formés à l’AS Monaco parmi les 18 champions de France ayant disputé au moins cinq rencontres : Kylian Mbappé, Valère Germain et le Malien Almamy Touré. Au plus haut niveau européen, il fait figure de bon élève, comme le montrait une étude de l’observatoire du football CIES au printemps. Mais dans l’absolu, la formation monégasque pèse peu dans l’effectif champion de France.

Monaco est traditionnellement un club formateur (Emmanuel Petit, Thierry Henry, Lilian Thuram et David Trezeguet en sont issus), encore classé cinquième dans la hiérarchie établie par la Fédération française de football la saison dernière. Son équipe juniors a remporté l’an dernier la Coupe Gambardella, Coupe de France des 18 ans et moins, avec Kylian Mbappé.

Mais comme au Paris-Saint-Germain, les objectifs élevés de l’ASM et son activité sur le marché des transferts rendent difficile l’éclosion de ses meilleurs talents du centre de formation.

26

C’est le nombre de mouvements réalisés par l’AS Monaco sur les marchés des transferts d’été et d’hiver, cette saison. Douze arrivées et quatorze départs. La réalité d’un club qui s’est fait une spécialité d’acheter de jeunes joueurs dans l’espoir de les mettre en valeur et d’en tirer un bénéfice financier.

Les recrues du marché estival des transferts 2015 de l’AS Monaco, avec le vice-président Vadim Vasilyev. Hormis Thomas Lemar, aucune ne s’est véritablement imposé dans la Principauté. | VALERY HACHE / AFP

Parfois, cela marche : Anthony Martial, revendu 50 millions d’euros (hors bonus) à Manchester United, ou Bernardo Silva, qui quittera sans doute le Rocher cet été pour une somme équivalente. Mais derrière ces réussites se cachent beaucoup de destins moins brillants, de joueurs installés dans une concurrence terrible et cirant le banc ou étant envoyés en prêt dans d’autres clubs. Exemple : le gardien Paul Nardi, acheté à l’âge de 20 ans alors qu’il était l’un des meilleurs espoirs français, et depuis successivement prêté à Nancy, Rennes et au Cercle Bruges.

Ce trading de joueurs, qui apparente l’AS Monaco à une place de bourse, est le modèle économique du club. Mais c’est en refusant de se débarrasser de ses titulaires l’été dernier que le club a réalisé sa meilleure saison depuis le rachat par Dmitri Rybolovlev.

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Nombre de joueurs de l’AS Monaco qui ont célébré le titre de champion de France avec leur téléphone portable mercredi soir. Dont Thomas Lemar, le nez dessus. (Oui, on est un peu vieux jeu.)