Pony Ma, le fondateur et PDG de Tencent, à Hongkong, le 23 septembre 2016. | ANTHONY WALLACE / AFP

Les deux hommes les plus puissants de l’Internet chinois portent le même nom mais ne sont pas frères. Ou plutôt frères ennemis, à la manière de Google, Amazon ou Facebook. Jack Ma, le fondateur d’Alibaba, aime la lumière, exposer ses talents en public et s’afficher au côté de Donald Trump. Pony Ma, le dirigeant de Tencent, est beaucoup plus discret et ne cherche pas les mondanités.

Cet ingénieur a pourtant réussi à s’introduire dans les poches de la quasi-totalité de ses concitoyens, pourvu qu’ils possèdent un téléphone mobile. Plus d’un milliard de personnes sur la planète utilisent sa messagerie WeChat, et presque 800 millions le font quotidiennement, souvent plus d’une heure et demie par jour. C’est avec Facebook, le réseau social le plus étendu au monde. Dans les économies de réseau, la croissance s’accélère avec la taille… et les perspectives de bénéfices aussi.

Sur le seul premier trimestre de l’année, les profits de Tencent ont bondi de 58 % et ses ventes de 55 %.

Sur le seul premier trimestre de l’année, les profits de Tencent ont bondi de 58 % et ses ventes de 55 %. De la publicité bien sûr, comme Google ou Facebook, mais à la différence de ces deux-là, la firme créée à Shenzhen, près de Hongkong, en 1998, la même année que Google, a diversifié ses revenus bien au-delà. Son système de paiement sur mobile est utilisé par 600 millions de Chinois chaque mois.

Un marché 28 fois plus développé qu’aux Etats-Unis

C’est à ce jour le système le plus répandu au monde. Son seul concurrent sérieux est l’autre Ma, Jack, avec Alipay, longtemps leader incontesté de ce secteur, et dont la filiale Ant Financial cherche à s’introduire à la Bourse de New York.

Selon la firme de recherche iResearch, citée par le Financial Times, le marché des paiements par smartphone serait 28 fois plus développé en Chine qu’aux Etats-Unis. On peut désormais régler ses factures avec WeChat dans les casinos de Las Vegas.

Tencent compte aussi sur les jeux vidéo. Honor of Kings a été l’application mobile la plus téléchargée dans le monde en ce début d’année. La firme n’a pas hésité l’an dernier à débourser 8,6 milliards de dollars pour mettre la main sur la start-up finlandaise Supercell, créatrice du jeu Clash of Clans.

Tencent rassemble à lui seul la puissance de Facebook, de sa filiale WhatsApp, de Spotify et d’ApplePay.

Au total, elle aurait dépensé près de 40 milliards de dollars ces deux dernières années en acquisitions partout dans le monde. En début de semaine, elle a en outre signé un accord avec Universal pour reprendre son catalogue musical sur ses différentes plates-formes d’écoute en continu (streaming), comme elle l’avait déjà fait avec les deux autres grandes majors du secteur.

Aujourd’hui, fort de son marché intérieur considérable, de ses moyens financiers et de son dynamisme, Tencent rassemble la puissance de Facebook, de sa filiale WhatsApp, de Spotify et d’ApplePay.

Son principal concurrent est désormais son voisin Jack Ma, et la valorisation de Tencent – plus de 320 milliards de dollars – dépasse désormais celle d’Alibaba. A eux deux, ils sont la preuve vivante que la domination américaine sur l’Internet n’est pas une fatalité.