Chez Arc International à Arques (Pas-de-Calais), en juin 2016. | PHILIPPE HUGUEN / AFP

Un premier dossier social déminé ! Vendredi 19 mai, Bruno Le Maire, le nouveau ministre de l’économie, s’est rendu au siège du verrier Arc International, à Arques, dans le Pas-de-Calais. Objectif : saluer le déblocage de 35 millions d’euros pour financer le groupe à la trésorerie exsangue. « Cette nuit, une solution a été trouvée pour redonner une perspective économique pour la société. » Le tout nouveau patron de Bercy a néanmoins reconnu que cet accord est le fruit du travail de ses prédécesseurs.

Pour le leader des arts de la table, c’est un soulagement. « C’est une bonne nouvelle, car on avait absolument besoin de cash pour juin, indique Frédéric Specque, secrétaire du CE (CGT). Ces 35 millions sont une bouffée d’oxygène, mais il va falloir rester vigilants pour voir comment l’entreprise va regagner en profitabilité. »

« C’est un signe fort qui illustre la confiance renouvelée que portent nos investisseurs à notre stratégie », convient Tim Gollin, directeur général du Groupe Arc. Pour Tristan Borne, le directeur général du site, qui réalise 450 millions d’euros de chiffres d’affaires avec 5 300 salariés, « le redressement est là, maintenant, nous devons l’amplifier en poursuivant les investissements pour améliorer la compétitivité du site. »

Le groupe a changé de stratégie

Le groupe américain Glass Holding, actionnaire principal de la société, apporte 10 millions d’euros sur les 35 millions investis dans l’entreprise. Les 25 millions restants viennent du consortium de fonds souverains, mené par celui de Russie et CDC International Capital, qu’avait mobilisés, en juin 2016, Emmanuel Macron, quand il était encore ministre de l’économie.

A l’époque, le consortium s’était engagé à investir jusqu’à 200 millions d’euros sous forme d’obligations convertibles afin de moderniser les usines d’Arc international et de créer un second site de production en Russie. Avant la nouvelle tranche débloquée vendredi, l’entreprise du Pas-de-Calais avait déjà consommé 50 millions d’euros.

Depuis la fin de 2016, la trésorerie de l’entreprise s’était fortement dégradée. A cela, plusieurs raisons. Le groupe a changé de stratégie. Au lieu de viser les seuls marchés de niche à fortes marges, il a décidé de saturer ses usines, afin d’adresser des marchés moins lucratifs, mais qui permettaient de mieux couvrir des coûts fixes de ses usines. Depuis sa reprise en 2015, les ventes de verres ont bien bondi de 20 %, mais les revenus ont progressé bien moins rapidement.

Dans le même temps, les attentats ont fortement pesé sur l’industrie du tourisme, l’un des débouchés importants d’Arc, ce qui a grevé les comptes, tout comme la décision d’anticiper certains investissements. Alerté tardivement, le comité interministériel de restructuration industrielle s’est de nouveau saisi du dossier, fin avril.

Poursuivre le redressement

Cependant, après discussions, « tout a commencé à rentrer dans l’ordre, lors du conseil d’administration, mi-mai, reprend Tristan Borne. Alors qu’en 2016 le site a dégagé 20 millions de résultat d’exploitation, nous en avons dégagé 10 millions sur les quatre premiers mois de 2017. Nous avons retrouvé notre trajectoire financière, ce qui a rassuré nos financeurs. »

« Si les résultats ont été en deçà des attentes en 2016, début 2017, les actions menées par la direction d’Arc ont porté leurs fruits, salue Laurent Vigier, de CDC International Capital. La définition d’un plan ambitieux de transformation et le renforcement de l’équipe de direction chargée de le mettre en œuvre ont été des éléments déterminants pour mettre en place une seconde tranche de financement. »

Pour Arc International, il faut poursuivre le redressement. « Grâce aux investissements récents, nous avons modernisé plusieurs fours, mais nous avons encore beaucoup de leviers d’amélioration de la compétitivité de notre site. Par exemple, nous souhaitons revoir notre organisation logistique, qui est aujourd’hui mal adaptée et nous coûte jusqu’à 30 millions d’euros par an. »

A plus long terme, les effectifs du site, dont l’âge moyen est de 51 ans, devraient également fondre du fait des départs naturels de salariés à la retraite. « Nous faisons attention aux profils des salariés qui partent, mais dans notre modèle d’affaires, la baisse des effectifs de 5 300, aujourd’hui, à 4 000, d’ici à 2020, devrait baisser également les coûts de l’entreprise. »