Le Scorpène est un sous-marin d’attaque conventionnel, fabriqué par les chantiers français DCNS. | MYCHELE DANIAU / AFP

La justice française enquête sur des soupçons de pots-de-vin autour d’une gigantesque commande de sous-marins passée à la France par le Brésil en 2008, pour plusieurs milliards d’euros, a rapporté samedi 20 mai Le Parisien.

Le parquet national financier (PNF) a ouvert en octobre une enquête préliminaire pour « corruption d’agents publics étrangers » autour de ce contrat signé le 23 décembre 2008, à l’occasion d’une visite de Nicolas Sarkozy, alors président de la République, à son homologue Lula, affirme le quotidien, dont l’information a également été confirmée par le Journal du Dimanche. Selon Le Parisien, « les magistrats français se demandent si des pots-de-vin n’ont pas été versés pour décrocher ce marché », suivis de rétrocommissions.

Une source proche du dossier a confirmé à l’Agence France Presse (AFP) qu’une enquête était en cours sur des soupçons de corruption autour d’une commande de sous-marins par le Brésil, sans donner plus de précisions. Contacté, le PNF n’a pour sa part « ni confirmé, ni infirmé » les informations du Parisien.

Le Brésil avait, entre autres contrats, commandé quatre sous-marins d’attaque Scorpène. Ce programme, qui vise à protéger les côtes et les gisements de pétrole en eaux très profondes du Brésil, prévoit aussi d’importants transferts de technologie, la construction d’un chantier naval, d’une base militaire et d’un sous-marin à propulsion nucléaire.

Un contrat évalué à 6,7 milliards d’euros

En 2008, une source de la présidence française avait évalué le contrat sur les sous-marins à 6,7 milliards d’euros dont 4,1 milliards pour la France, le reste allant à des entreprises brésiliennes.

Le Scorpène est un sous-marin d’attaque conventionnel, fabriqué par les chantiers français DCNS, en coopération avec l’industriel espagnol Navantia. Le constructeur naval DCNS a fait savoir à l’AFP qu’il n’avait « rien à voir avec l’affaire “lava jato” » (« lavage express »), du nom d’une tentaculaire enquête anticorruption en cours au Brésil. L’entreprise « respecte partout dans le monde scrupuleusement les règles de droit », a assuré un porte-parole.

Mais DCNS est partenaire au Brésil du géant du BTP Odebrecht, au cœur du méga scandale de corruption qui agite le pays au travers du groupe pétrolier d’Etat, Petrobras. Et Odebrecht est accusé de verser systématiquement des pots-de-vin à des responsables politiques pour truquer des marchés publics.

La patronne du PNF, Eliane Houlette, s’est rendue récemment au Brésil, avec toute une délégation dont faisait partie Thomas de Ricolfis, le chef des policiers de l’office anticorruption français (Oclciff). Dans un communiqué du 9 mai, son hôte brésilien, le procureur général de la République Rodrigo Jano, avait évoqué la possibilité de mener des enquêtes conjointes sur des « cas concrets » de corruption « intéressant les deux pays. »