Une jeune fan de la chanteuse Ariana Grande, le 23 mai 2017, au lendemain de l’attentat commis dans une salle de concert à Manchester. | OLI SCARFF / AFP

Pour Katy Hilton, c’en est trop. La veille, lundi 22 mai, la jeune fille de 13 ans a été prise de terreur en entendant la puissante déflagration. Mais elle a su se ressaisir immédiatement pour fuir la salle de la Manchester Arena avec son amie et leurs mères respectives. Ce n’est que douze heures plus tard que l’émotion remonte finalement à la surface. Alors qu’elle raconte son histoire, les larmes commencent à couler sur ses joues. D’abord doucement, puis de façon incontrôlable, dans un torrent de sanglots. Elle se blottit dans les bras de sa mère, rappelant par ce geste son très jeune âge.

« Je les ai attrapées par la main et on a couru le plus vite possible, pour partir très loin », témoigne Lisa, une mère de famille

Katy et son amie Kelly Dixon, 12 ans, attendaient ce concert d’Ariana Grande depuis plusieurs mois, de quoi justifier le déplacement de quatre heures entre Sunderland, où elles habitent, et Manchester. La chanteuse pop américaine est leur idole. Kelly l’avait déjà vue en concert il y a deux ans. « Cette fois-ci, l’ambiance était bien meilleure », dit-elle.

A la fin du concert, vers 22 h 30, les deux amies étaient juste devant la scène. Leurs mères les attendaient dans le foyer, à l’extérieur de la salle, là où les souvenirs sont en vente. « J’ai entendu une explosion, mais je croyais que c’était des ballons qui avaient éclaté, témoigne Katy. Et puis, on a entendu des gens crier : “Bombe, bombe ! »

Paniquées, les deux jeunes filles sont parties à la recherche de leurs mères. « On les a cherchées pendant cinq minutes. C’était les cinq minutes les plus longues de ma vie, se rappelle Lisa, la mère de Katy. Ensuite, je les ai attrapées par la main et on a couru le plus vite possible, pour partir très loin. » Ce n’est qu’à trois heures du matin qu’elles ont retrouvé leur hôtel, après s’être perdues dans la ville.

L’attentat terroriste qui a frappé le concert d’Ariana Grande à Manchester, faisant au moins 22 morts et 59 blessés, a frappé en plein cœur un public très jeune. Une attaque « révoltante », qui a visé « de jeunes personnes sans défense », a condamné la première ministre Theresa May devant Downing Street mardi. Des adolescentes pour la plupart, voire des pré-adolescentes encore à l’école primaire. Toutes n’ont pas eu la chance de Katy et Kelly. Des « enfants » font partie des personnes décédées, a révélé la police de Manchester. Une petite fille de 8 ans, Saffie Rose Roussos, a été l’une des premières victimes identifiées.

Attentat-suicide lors d’un concert à Manchester
Durée : 01:02

Certaines familles vivent une angoisse insoutenable. Mardi, à la mi-journée, Charlotte Campbell n’avait toujours pas retrouvé sa fille Olivia, 15 ans. Elle a remué ciel et terre, fait appel aux réseaux sociaux, rencontré des dizaines de bonne volonté pour l’aider, multiplié les témoignages dans les médias. Mais, pour l’instant, toujours pas de nouvelles. « Elle était avec son ami Adam, témoignait sur la BBC la mère, la voix cassée par l’émotion. Adam a été trouvé, il est à l’hôpital, mais Olivia n’a pas été trouvée. » Sur Twitter, le mot-clé #missingManchester s’est propagé, pour tenter de la retrouver, ainsi que d’autres adolescentes qui restent portées disparues.

« C’était horrible »

Molly Moore, 14 ans, a eu plus de chance. Elle est venue de Derby accompagnée de sa mère. « J’attendais ce concert depuis 208 jours », précise-t-elle, après avoir assuré le décompte jour par jour depuis l’achat de ses billets. Mardi matin, elle portait encore le sweatshirt d’Ariana Grande qu’elle arborait fièrement la veille. Autour du cou pendait la pochette transparente avec son billet de concert. « C’était horrible. Je suis encore sous le choc », murmure l’adolescente, qui n’en peut plus de sommeil et de colère contenue.

Elle et sa mère se sont retrouvées bloquées dans la Manchester Arena après l’explosion de la bombe. La police a pris soin d’elles, venant les informer toutes les demi-heures de l’évolution de la situation. « Mais ce n’est que très tard, en voyant un écran de télévision, qu’on a compris l’ampleur de la situation, explique Karen Moore. Avant, on ne savait pas qu’il y avait des morts. »

Et c’est à 6 heures du matin seulement qu’elles ont pu sortir de la salle de concert et rentrer à leur hôtel. Au coin de la rue, là où le quartier est bouclé, elles passent alors à côté d’un grand panneau publicitaire électronique. Dessus, sur fond de drapeau de l’Union Jack, ces simples mots : « Pray for Manchester ».

Retour en images sur le drame de Manchester