Des soldats turcs accusés d’avoir participé au putsch manqué de juillet 2015 arrivent à leur procès, dans la prison de Sincan, près d’Ankara, le 22 mai. | ADEM ALTAN / AFP

Le procès de 221 putschistes présumés, dont 27 généraux, s’est ouvert lundi 22 mai dans la périphérie d’Ankara. Jugés pour « violation de la Constitution », « appartenance et direction d’une organisation terroriste », les prévenus risquent de lourdes peines, le ministère public ayant réclamé « 2 988 fois la perpétuité ». Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, et le chef d’état-major, Hulusi Akar, se sont constitués parties civiles. Sur 221 prévenus, 200 sont en détention provisoire, 9 comparaissent libres et 12 sont en fuite, a précisé l’agence de presse officielle Anadolu.

L’accusé vedette de ce procès est l’imam Fethullah Gülen, un ancien allié de M. Erdogan considéré désormais par Ankara comme le cerveau du putsch raté du 15 juillet 2016, ce qu’il nie. Installé aux Etats-Unis depuis 1999, le prédicateur est jugé par contumace à Sincan, sa chaise est vide. L’administration américaine n’a pas donné suite pour l’instant à la demande d’extradition formulée par les autorités turques.

Les accusés les plus connus sont le général Akin Öztürk, un ancien commandant de l’armée de l’air, le général Mehmet Disli, l’ex-bras droit d’Hulusi Akar, et le général Ali Yazici, l’aide de camp du président Erdogan au moment des faits. Tous sont accusés d’avoir planifié et mis en œuvre la tentative de putsch visant, selon l’acte d’accusation, à renverser le numéro un turc.

« J’ai donné ma vie à l’armée »

Le procès se tient dans la prison de Sincan, où une immense salle d’audience a été construite tout spécialement pour accueillir les grands procès du putsch. Les mesures de sécurité étaient drastiques, des tireurs d’élite avaient pris position sur les toits alentour et un drone de surveillance volait dans le ciel. Encadrés par des gendarmes, les accusés ont marché jusqu’à l’entrée de la salle sous les imprécations d’une foule déchaînée qui réclamait le retour de la peine de mort et brandissait des nœuds coulants.

L’ancien chef de l’armée de l’air, Akin Öztürk, a comparu le premier, niant sa participation au putsch : « Je ne suis pas l’un des planificateurs du putsch. Qui a planifié ? Qui a dirigé ? Je ne sais pas. Cette accusation est pour moi inacceptable. Pendant quarante-six ans, j’ai donné ma vie à l’armée. Je n’ai aucun lien avec ce putsch de traîtres. (…) Je n’avais pas encore parlé que la presse disait que j’avais reconnu ma participation. »

Au lendemain du putsch, le général était apparu sur les photos de presse avec le visage tuméfié et une oreille bandée, victime, comme beaucoup d’autres prévenus, de brutalités lors de son interrogatoire. Il a raconté comment, la nuit des événements, il était à Akincilar (nord-est), le quartier général des militaires factieux, où Hulusi Akar, le chef d’état-major, était retenu en otage : « Akar m’a dit de convaincre les putschistes de renoncer. C’est ce que je leur ai dit. Mais les putschistes étaient déterminés, le chef d’état-major était très tendu. Je n’ai jamais demandé à Akar de prendre la tête des conjurés, c’est la vérité, vous pouvez lui demander. »