Voilà un rapport qui tombe à point nommé, à quelques jours du sommet du G7 à Taormine (Sicile), vendredi 26 et samedi 27 mai, où la question du changement climatique promet d’être âprement débattue. Investir en faveur de la transition énergétique devrait bénéficier à la croissance : tel est le credo développé par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) dans un rapport de plus de 300 pages adressé mardi aux pays du G20.

« Loin d’être un frein, l’intégration de l’action climatique à la politique en faveur de la croissance peut avoir un effet économique positif », a insisté le secrétaire général de l’OCDE, Angel Gurria, en présentant le rapport. Une panoplie de mesures bien calibrées devrait ainsi permettre d’accroître de 2,8 % le produit intérieur brut (PIB) des pays du groupe des 20 d’ici à 2050. L’augmentation nette pourrait même approcher les 5 % en tenant compte de l’élimination de certains effets néfastes du réchauffement, tels que les dommages causés par la multiplication d’épisodes climatiques extrêmes.

« Passer à l’action maintenant »

« Le problème est si urgent que nous devons passer à l’action maintenant », a encore exhorté M. Gurria. Une allusion à peine voilée aux tergiversations de la nouvelle administration américaine autour de l’accord de Paris, adopté fin 2015 pour juguler le réchauffement (celui-ci prévoit de contenir la hausse des températures « bien au-dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels »). Un processus dont Donald Trump, président du deuxième pays émetteur mondial de gaz à effet de serre, a menacé de se retirer tout en promettant de « mettre fin à la guerre contre le charbon ». Le sujet figure tout en haut de l’agenda du sommet du G7, au cours duquel les partenaires des Etats-Unis espèrent obtenir des éclaircissements.

Dans son rapport, l’OCDE insiste sur le coût qu’engendrerait tout retard dans la mise en œuvre des objectifs de l’accord de Paris. Une action trop tardive se conclurait in fine par la nécessité d’un ajustement plus radical, au risque de perturbations économiques et environnementales profondes. Des infrastructures liées aux énergies fossiles ou à forte teneur en carbone deviendraient brusquement obsolètes, souffrant d’importantes dépréciations.

L’organisation économique sise à Paris, au Château de la Muette, appelle donc les Etats du G20 à prendre le leadership dans la lutte contre le réchauffement. S’ils représentent 85 % du PIB mondial et 80 % du total des émissions de CO2, les pays sont aussi « collectivement à la pointe de la transition », souligne l’OCDE. Ainsi, les vingt principales économies de la planète réunissent ensemble 98 % des capacités installées d’énergie éolienne, 97 % dans le photovoltaïque et 93 % des véhicules électriques.

Investir plus franchement dans les infrastructures

Quelles que soient leurs contraintes budgétaires, les pays peuvent agir en supprimant toute forme de subventions aux énergies fossiles, en augmentant la taxation du carbone et en réorientant la politique de recherche et développement en faveur de l’innovation verte. L’OCDE appelle aussi à investir plus franchement dans les infrastructures. L’injonction n’est pas nouvelle. Depuis deux à trois décennies, les pays avancés comme les économies émergentes – à l’exception de la Chine – souffrent d’un sous-investissement chronique qui pèse sur la croissance.

En tout, l’OCDE évalue à 6 300 milliards de dollars (5 600 milliards d’euros) par an, jusqu’en 2030, les besoins d’investissements des pays du G20 dans les transports, l’énergie, l’eau ou les télécommunications. Une enveloppe qu’il faudrait gonfler de 10 % si ces investissements étaient systématiquement dirigés vers des infrastructures respectueuses du climat. Mais ce surcoût serait aisément compensé par les bénéfices en matière d’innovation, d’économies d’énergie, ou encore de santé et de bien-être des populations…

L’OCDE reconnaît toutefois que « la transition ne réussira pas » si elle n’est pas « inclusive ». Autrement dit, le soutien politique et social à ces bouleversements d’ampleur sera compromis si les travailleurs, les entreprises et les collectivités dépendant d’activités polluantes n’y sont pas pleinement associés.