Le leader nord-coréen Kim Jong-un supervise un tir de missile antiaérien organisé par l’Académie des sciences de la défense nationale. Image non datée, diffusée par KCNA, l’agence de presse officielle du régime, le 28 mai 2017. | STR / AFP

Alors que la Corée du Nord a procédé, dimanche 28 mai, à un nouveau tir de missile balistique – le troisième depuis le 10 mai, la probable préparation par Pyongyang d’un sixième essai nucléaire nourrit l’inquiétude de la population chinoise et les critiques de la presse officielle.

Bien que leur pays reste le principal soutien économique du pays, « les Chinois ont une image de plus en plus négative de la Corée du Nord », constate Cheng Xiaohe, professeur de relations internationales à l’université du Peuple de Chine.

Sur le réseau social Sina Weibo, les internautes ne cachent plus leur réprobation de la Corée du Nord. « Le chien qui quémandait l’aide financière est aujourd’hui devenu un loup », écrit l’un d’eux sous le pseudonyme Ainihaobaobao. « C’est dingue, notre voisin est un voyou la bombe à la main », s’angoisse un autre. « Il faut que le gouvernement chinois agisse, les essais nucléaires nord-coréens mettent clairement en danger le nord-est de la Chine », conclut un troisième, Rubberman2013.

Folles rumeurs

Le programme nucléaire nord-coréen nourrit les plus folles rumeurs de l’autre côté de la frontière. Par exemple, que la Corée du Nord utilise dans ses recherches des pièces détachées de piètre qualité, de sorte que le risque d’une fuite radioactive ne peut être écarté. Ou encore qu’un prochain essai nucléaire pourrait provoquer une éruption volcanique au mont Paektu, à la lisière des deux pays.

Reste une poignée de commentaires qui défendent la position de Pyongyang, rejetant la faute sur l’Occident et ses médias. « La menace des armes nucléaires a été exagérée par la presse, surtout japonaise et américaine. Ils veulent transformer la crise nucléaire nord-coréenne en un conflit entre Pékin et Pyongyang, pour détruire leur alliance », juge ainsi Kenansanshi.

Le temps semble lointain de « l’alliance de sang », forgée durant la Guerre de Corée. Selon le bilan établi par la Chine, 183 108 soldats chinois envoyés par Mao Zedong ont trouvé la mort au cours du conflit (1950-1953), dont le propre fils du Grand Timonier. « L’alliance de sang n’existe plus. Aujourd’hui, les liens entre Pékin et Pyongyang ne sont plus que des relations diplomatiques normales », commente un internaute sur Baidu Zhidao, un site de questions-réponses chinois.

L’entêtement de Pyongyang

L’établissement de relations diplomatiques entre la Chine et la Corée du Sud, en 1992, avait déjà marqué un tournant. La puissance économique et le « soft power » sud-coréens jouent largement en faveur de Séoul depuis : les jeunes Chinois se passionnent aujourd’hui pour la K-pop et les séries télévisées sud-coréennes.

Pékin a bien tenté de convaincre Pyongyang de s’inspirer de son modèle : l’adoption de la politique d’ouverture et de réformes économiques a permis au Parti communiste chinois (PCC) de se maintenir au pouvoir. En retour, Pyongyang accuse le voisin chinois de s’être éloigné de la voie communiste. Arrivé à la tête du PCC à l’automne 2012, Xi Jinping a, depuis lors, maintenu à distance le dirigeant nord-coréen, Kim Jong-un.

Le Huanqiu Shibao, quotidien connu pour son ton nationaliste sur les questions internationales, a publié ces dernières semaines une dizaine d’articles dénonçant l’entêtement de la Corée du Nord : « Il ne faut pas sous-estimer le danger des essais nucléaires », « De plus en plus de Chinois sont pour un renforcement des sanctions contre la Corée du Nord », ou encore « La possession d’armes nucléaires ne permettra pas d’assurer la survie du régime ».