Documentaire sur LCP à 20 h 30

Accueilli à Serquigny, ce réfugié afghan apprend le français. | J2F / LSD Production / LCP-Assemblée nationale

Serquigny, dans la campagne normande. Un village français semblable à des milliers d’autres, environ deux mille habitants, rien de particulier à signaler, ni drames ni faits divers sortant de l’ordinaire. Un jour, pourtant, le quotidien banal de ce petit coin de France a été bousculé par l’arrivée de visiteurs inattendus. Lorsque l’Etat a décidé de fermer la tristement célèbre « jungle » de Calais, les migrants qui l’occupaient ont été répartis dans 450 centres d’accueil et d’orientation, disséminés sur tout le territoire.

Serquigny, dans l’Eure, a été choisi pour accueillir trente réfugiés afghans, installés dans des appartements HLM, au cœur du village, avec comme voisins de palier des familles normandes. « Au début, nous avions un peu peur. Comment ces hommes, jeunes, allaient-ils se comporter avec les femmes… Puis, on a appris à se connaître. Ça se passe bien », raconte Cédric, habitant d’un de ces immeubles. Une fois installés, les migrants perçoivent une allocation mensuelle de 204 euros, en attendant que leurs dossiers soient étudiés par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra). Les agents de cet organisme évaluent les risques encourus par ces migrants en cas de retour dans leur pays natal.

La solidarité face au FN

Durant sept mois, le réalisateur Adrien Pinon a suivi le quotidien de ces nouveaux arrivants, au cœur d’une communauté peu habituée à un tel événement. Ce documentaire aussi instructif qu’émouvant fait parler tout le monde, face à la caméra : les jeunes hommes afghans mais aussi des villageois opposés à ces arrivées ou ceux, nombreux, qui multiplient les initiatives pour aider ces visiteurs d’un pays si lointain, si étrange, à s’intégrer plus facilement. Personnage central de cette aventure normande, Lionel Prévost, maire du village, ne cache pas sa volonté d’aider « ces jeunes Afghans qui ont vécu des choses terribles et ont l’espoir d’une vie meilleure ». En janvier 2017, lors de la traditionnelle cérémonie de vœux, le maire avait résumé la situation d’une jolie phrase : « les désordres du monde viennent frapper à notre porte ».

Welcome chez nous - Bande annonce

Face aux huées de militants du Front national venus crier leur colère et brandissant des pancartes explicites (« Pour une Normandie sans migrants »), la solidarité s’organise : cours de français, matchs de foot ou de basket, soirées culinaires et dansantes, les gestes d’entraide sont nombreux. « Je me souviens avoir connu l’exode sur les routes de France en 1940. J’ai connu le froid, qui est pire que la faim. Ces enfants-là ont tellement souffert à Calais, ont eux aussi connu le froid. Quand on leur donne quelque chose, leurs yeux s’illuminent », souligne Thérèse.

A ces Normands prêts à beaucoup pour les aider, les jeunes Afghans ne cachent pas leur gratitude : « Je ne pensais pas que les gens de Serquigny nous aideraient autant. Les gens ont vu à la télé les bagarres entre migrants dans la “jungle” de Calais. Nous étions considérés comme des animaux. Mais ici, les gens sont gentils, ils nous apprécient pour ce que nous sommes. Ils ont compris que nous avions beaucoup d’ennuis », témoigne Ahmad, 22 ans. Six mois après leur arrivée à Serquigny, neuf Afghans ont reçu la protection officielle de l’Etat français et peuvent rester sur le territoire. Les vingt et un autres sont toujours dans l’attente de l’examen de leur dossier. Trois d’entre eux ont quitté le village avant d’avoir la réponse, retournant ainsi à la clandestinité.

Welcome chez nous, d’Adrien Pinon (France, 2017, 52 min).