Affrontements entre police et jeunes de la ville de Bamenda, chef lieu de la région anglophone du Nord-Ouest. | REUTERS

Moins de dix minutes d’audience ont suffi pour balayer les espoirs des avocats de la défense. Mercredi 7 juin, la juge du tribunal militaire de Yaoundé a rejeté leur demande de mise en liberté provisoire. Elle n’a pas non plus pris en compte les réquisitions du ministère public qui demandait une mise sous surveillance judiciaire des leaders de la crise qui secoue depuis novembre 2016 le Nord-Ouest et le Sud-Ouest, les deux régions à majorité anglophone du Cameroun.

L’avocat Felix Nkongho Agbor, le professeur Fontem Neba, l’animateur radio Mancho Bibixy, alias BBC, ainsi que 24 jeunes emprisonnés depuis plus de six mois, sont notamment accusés d’« actes de terrorisme » et de « complicité d’actes de terrorisme ». Ils risquent la peine de mort. Tous plaident non coupables.

La juge a estimé que la demande soumise par les avocats était illégale, car l’article 224 du Code de procédure pénale interdit la remise en liberté sous caution lorsque les accusés encourent la peine de mort ou l’emprisonnement à vie. Elle a renvoyé le procès au 29 juin, pour un début de l’examen du fond du dossier avec l’audition des premiers témoins de l’accusation.

Solidarité

« La juge s’est prononcée sur une demande que nous ne lui avions pas faite, dénonce Me Claude Assira, l’un des avocats de la défense, joint par Le Monde Afrique. Nous l’avons interrogée sur une demande de remise en liberté pure et simple ou, éventuellement, sur une mise en liberté sous surveillance judiciaire. Nous allons réfléchir et chercher à voir s’il y a des voies de recours ou s’il est possible de réitérer la demande. »

Ce maintien en prison des leaders n’apaise pas la situation dans la partie anglophone du Cameroun. A Bamenda, les journées « ville morte » s’enchaînent chaque lundi et pour chaque journée d’audience. « Ce mercredi, les marchés sont déserts. Les boutiques, cybercafés, bars et salons de coiffure sont fermés, raconte un enseignant de la ville. C’est ainsi que la population marque sa solidarité avec ses frères. »

Les leaders arrêtés depuis janvier 2017, considèrent leur détention « abusive » et veulent le faire savoir. Depuis dimanche 4 juin, l’animateur radio Mancho Bibixy a débuté une grève de la faim. « Il est apparu très affaibli au tribunal. Il avait de la peine à marcher », assure un journaliste présent au tribunal militaire.