• FREDERICK MARTIN
    In memoriam
    (Sélection d’œuvres par le Trio Polycordes ( Sandrine Chatron, Florentino Calvo, Jean-Marc Zvellenreuther).

Pochette du CD monographique consacré à Frédérick Martin par le Trio Polycordes. | LA FOLLIA MADRIGAL

Autodidacte curieux de tout (à l’instar du « black metal » norvégien auquel il consacra deux livres), Frédérick Martin (1958-2016) a fait entendre sa voix par une musique à la fois subtile et intuitive. Riche de 130 opus mais souvent peu connue, sa production appelle une mise en perspective telle qu’en propose ici le Trio Polycordes. Un effectif insolite (harpe, mandoline, guitare) pour un compositeur atypique (dans le genre marginal attachant)… la rencontre est édifiante à chaquerceau. Sous l’égide du rock (Honor, Gradus, Dignitas), du jazz (Dowlan’s box) ou de l’abstraction (le Bélier, formidable solo qui ouvre les Bonnes Pensées), autant que dans l’hommage psychédélique (Ustvolsk) rendu à la compositrice Galina Ustvolskaïa, comme lui, salutaire irréductible. Pierre Gervasoni

1 CD La Follia Madrigal.Fred

  • FRED DUPONT
    Organ Session

Pochette de l’album « Organ Session », de Fred Dupont. | ASSAÏ RECORDS/SOCADISC

Au recto de la pochette de son album Organ Session, il est précisé que Fred Dupont joue de l’orgue Hammond et du piano électrique Wurlitzer. La marque du premier renvoie aux classiques du jazz et des interprètes comme Rhoda Scott, Jimmy Smith, Jack McDuff, Lonnie Smith ou Larry Young, celle du second plutôt à la soul (Ray Charles et son What I’d Say) ou le rock en concurrence avec le piano Rhodes. Des pistes empruntées ici en d’habiles combinaisons, sans qu’un genre prenne le pas, en valorisant une couleur. Le swing funk de la composition New Orleans, le clin d’œil pop-jazz du début de Listen Here, le jazz-rock « à la Miles Davis des années 1980 » dans Mandat Cash, le hard bop de Rhum Express… Dupont, le guitariste Jo Champ, le trompettiste Renaud Gensane, le saxophoniste Baptiste Herbin et le batteur Damien Schmitt y transmettent une générosité musicienne. Présenté au même titre que les musiciens, Manu Gallet, dont la prise de son donne espace et précision à cet enregistrement. Sylvain Siclier

CD Assai Records/Socadisc.

  • DIVERS ARTISTES
    Nashville

Pochette du coffret « Nashville », sélection de divers artistes par Georges Lang. | WARNER MUSIC

Dans le petit livret qui accompagne ce coffret de 4 CD consacré à la musique de Nashville (Tennessee), Georges Lang, qui présente plusieurs programmes musicaux sur la radio RTL, rappelle que certes, la country est la musique généralement attachée à la ville qui « compte plus de cent studios d’enregistrement », mais qu’elle est plus riche et variée que ce que l’on en perçoit généralement. Ce que démontre sa sélection de 93 chansons, qui permet d’entendre que la country ne s’en tient pas à des romances avec voix traînante et tricotis de guitare. Le blues, le rock, jusqu’au plus énergiquement électrique, et aussi la pop viennent l’irriguer. Georges Lang a choisi de consacrer les trois premiers CD à la « new country », celle d’artistes apparus principalement dans les années 1990 et à partir des années 2000. Un choix érudit qui permet des découvertes. Et pour les classiques, le quatrième CD permet de retrouver notamment Johnny Cash, Dolly Parton, Patsy Cline, Charlie Rich, Tammy Wynette, Willie Nelson ou Kenny Rogers. S. Si.

1 coffret de 4 CD Warner Music.

  • ALT-J
    Relaxer

Après un premier album, An Awesome Wave (2012), saisissant d’audace formelle (un mélange folk-hip hop-soul inédit) et garni de titres étrangement accrocheurs, le quatuor de Leeds, devenu trio, perdait de son tranchant dans un second opus, This Is All Yours (2014), d’une complexité pesante. Revenus à plus de limpidité, les anciens étudiants en art façonnent, dans Relaxer, huit chansons à la lisière du rêve voluptueux et des tensions de l’insomnie. La première moitié de l’album concentre les morceaux où guitare sèche et voix se confrontent aux rythmes les plus anguleux. Du magnifique titre d’ouverture, 3WW, dont la noirceur altière évoque All Tomorrow’s Parties du Velvet Underground, à Hit Me, une harangue à la morgue très Iggy Pop. Plus « relaxantes », les quatre dernières chansons planent du côté de Pink Floyd (Adeline), avant de s’alanguir à la façon de Leonard Cohen ou de Simon and Garfunkel de l’ère numérique. Stéphane Davet

1 CD Infectious / PIAS

  • DUO MONTANARO
    Ki

Les Montanaro, père (Miquèu, 35 albums au compteur) et fils (Baltazar) dans une suite de pièces instrumentales, interprétées avec souffle et cordes. Flûtes (dont le galoubet tambourin, l’instrument traditionnel provençal composé d’un fifre et d’un tambourin) et violons (plus quelques assaisonnements sonores, telle la guimbarde) racontent et inventent un folklore imaginaire. L’émotion, dans leur monde, tient en peu de mots ou s’emballe en de folles sarabandes. Les Montanaro n’ont rien à faire des frontières qu’ils s’amusent à dissoudre allègrement, empruntant ici ou là des souvenirs de leurs nombreux voyages, de leurs expériences et rencontres musicales. C’est un savoureux voyage qu’ils proposent dans cette suite de pièces. On y passe d’un désert coloré à des évocations de traditions musicales hongroises et turques, du souvenir des troubadours à une mazurka nostalgique. Patrick Labesse

1 CD IN/EX Music/L’Autre Distribution.

  • OPHELIE GAILLARD
    « Exiles »

Schelomo, Rhapsodie hébraïque. De la vie juive. Danse de mariage. Freilechs d’Ernest Bloch. Concerto pour violoncelle et orchestre. Tanzlied des Pierrot extrait de Die Tote Stadt de Wolfgang Korngold. Ouverture sur des thèmes juifs de Serge Prokofiev. Sarah chante une petite berceuse pour le petit Isaac de Chava Alberstein. Avec Ophélie Gaillard (violoncelle), Sirba Octet, Orchestre philharmonique de Monte Carlo, James Judd (direction).
Un violoncelle dans une grande malle de voyage sur la pochette de disque : comme sa comparse Sonia Wieder-Atherton avant elle, Ophélie Gaillard a fait de la voix de son instrument, « par nature un animal social », celle des juifs exilés aux Etats-Unis. La douleur de la séparation, la douleur de l’espoir, de survivre ou de vivre ailleurs jalonnent cette route musicale. De la vibrante Rhapsodie hébraïque de Bloch au nostalgique Tanzlied des Pierrot de Korngold dont la riche expressivité post-mahlérienne tranche avec l’esprit grinçant de l’Ouverture sur des thèmes juifs que Prokofiev écrivit à son arrivée à New York en 1919. Le cycle From Jewish Life de Bloch, initialement pour violoncelle et piano, a été ici magistralement adapté pour l’ensemble Klezmer du Sirba Octet, groupe de musiciens essentiellement issus de l’Orchestre de Paris, histoire de faire écho à la veine populaire qui transcende ces musiques. La qualité de l’Orchestre philharmonique de Monte-Carlo sous la fine direction de James Judd, l’engouement communicatif des Sirba Octet et surtout le violoncelle généreux et sensitif d’Ophélie Gaillard donnent à ce disque – magnifique témoignage intelligemment agencé – le monopole du cœur. Marie-Aude Roux

1 CD Aparté