Rafael Nadal pose avec le trophée du vainqueur de Roland-Garros, devant la tour Eiffel, lundi 12 juin. | GONZALO FUENTES / REUTERS

Patrice Hagelauer, ancien sélectionneur de l’équipe de France de Coupe Davis et entraîneur de Yannick Noah, revient sur le dixième sacre de Rafael Nadal à Roland-Garros, dimanche 11 juin, et sur les raisons d’une domination sans précédent pour un joueur de tennis sur terre battue.

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Que représente la dixième victoire de Rafael Nadal à Roland-Garros ?

Patrice Hagelauer : C’est incroyable et même presque irréel. Jamais je n’aurais pu imaginer qu’un joueur de tennis réalise une telle performance. J’ai été estomaqué par son niveau. Il y a quelques mois, on disait qu’il était fini, et là il revient en jouant mieux qu’avant !

C’est le meilleur joueur de tennis de tous les temps sur cette surface, où il domine facilement ses adversaires. Il y a un gouffre entre lui et les autres.

Même avec Björn Borg, sextuple vainqueur de Roland-Garros ?

Nadal est meilleur que Borg. Après, il est dur de comparer deux joueurs qui jouent à des époques différentes. Mais ils ont un point commun. Les adversaires de Björn Borg se demandaient comment faire pour remporter des jeux face à lui. Cette crainte, on la retrouve aussi, aujourd’hui, chez les joueurs qui jouent contre Nadal.

« L’atout principal de Nadal est sa force mentale », estime Patrice Hagelauer. | Christophe Ena / AP

Quelle est la clé d’une telle longévité ?

L’atout principal de Nadal est sa force mentale. C’est un guerrier qui se bat sur chaque balle. Il a une constance qui lui permet d’être à fond tout le temps. Et même quand il perd un point, il se remobilise tout de suite.

La clé de son jeu est dans le contrôle émotionnel. Il se sent très fort. Physiquement, il est extraordinaire et techniquement aussi. On connaissait son coup droit dévastateur, maintenant c’est son revers qui fait aussi mal. Il trouve des angles invraisemblables.

Peut-il rester à ce niveau encore longtemps ?

S’il n’a pas de blessures physiques, il peut rester à ce niveau pendant deux ou trois ans. Sa finale face à Roger Federer à l’Open d’Australie [défaite en cinq sets] prouve qu’il peut encore jouer un super tennis sur différentes surfaces.

Mais je pense qu’il doit adopter la même stratégie que le Suisse en allégeant son programme. Ses récentes blessures doivent l’encourager à se préserver pour ne pas s’user trop vite. Même si c’est difficile pour lui, car Nadal est à son meilleur niveau quand il joue beaucoup et enchaîne les matchs.

Pourquoi Nadal a-t-il plus de réussites sur terre battue que sur une autre surface ?

C’est la surface la plus lente du circuit et la mieux adaptée pour développer son jeu. Il arrive à placer l’adversaire en fond de court pour dicter l’échange. La terre battue lui permet de trouver une multitude d’angles, de placer des accélérations et de changer le rythme comme il l’entend. Ses possibilités tactiques sont accrues avec cette surface.

Il utilise très bien son service, qui est loin d’être le plus puissant sur le circuit, en variant au maximum son toucher de balle avec des lifts, des slices. Sur terre battue, il peut aussi multiplier les échanges afin d’user ses adversaires et de prendre l’avantage physique.