Edouard Philippe soutient tantôt des candidats LRM, comme ici Benjamin Griveaux à Paris, tantôt des candidats LR. | PATRICK KOVARIK / AFP

Un coup à droite, un coup à gauche. Un coup pour, un coup contre son camp. Faute des traditionnels désistements, absence de triangulaires oblige (il n’y en aura qu’une, dans la 1re circonscription de l’Aube), l’attribution des soutiens en vue du second tour des législatives, dimanche 18 juin, se fait dans une cacophonie certaine. Passage en revue de certains de ces cas emblématiques.

  • Edouard Philippe entre son ancienne famille et la nouvelle

En matière de soutien pour les législatives, Edouard Philippe a une logique bien à lui. Issu des rangs du parti Les Républicains, mais premier ministre d’Emmanuel Macron, l’ancien maire du Havre fait du cas par cas. Dans le Finistère, il est allé soutenir Maël de Calan, candidat investi par Les Républicains (LR), dans une circonscription où la candidate La République en marche (LRM), Sandrine Le Feur, l’a emporté d’une courte tête lors du premier tour.

Cette dernière a répliqué en diffusant une vidéo de soutien de… Christophe Castaner, ministre chargé des relations avec le Parlement, lui-même candidat LRM dans les Alpes-de-Haute-Provence.

Dans l’Essonne, toutefois, c’est bien une candidate de La République en marche qu’il a soutenue mardi matin : Marie Guevenoux, ancienne juppéiste, comme lui.

  • La 18e parisienne de la discorde

La situation est un peu différente dans la 18e circonscription de Paris, où aucun candidat LRM n’avait été investi. Le premier ministre a apporté son soutien au candidat LR, Pierre-Yves Bournazel, face à la socialiste PS Myriam El Khomri qui revendique, elle, le soutien d’Emmanuel Macron lui-même.

Interrogé mardi matin sur France Info à ce sujet, le premier ministre n’y voit pas d’incohérence :

« Il n’y a pas de candidat En marche ! (dans cette circonscription) et il y a deux candidats avec des passés différents, des engagements différents, qui entendent se placer dans la majorité présidentielle. »

Mais voilà que pour ajouter à la confusion, l’ancien premier ministre de François Hollande, Bernard Cazeneuve, a prévu de soutenir Mme El Khomri sur le terrain.

  • Au FN, soutien à gauche et à droite

Le Front national aussi fait du cas par cas. Les battus du premier tour donnent leur bénédiction tantôt à des candidats Les Républicains, tantôt à La France insoumise. Dans la 8circonscription de Loire-Atlantique, Gauthier Bouchet a ainsi appelé à voter pour la candidate de La France insoumise au second tour, selon BFMTV. Le tweet du candidat malheureux a toutefois été supprimé, un message ne donnant « aucune consigne », le remplace.

Dans le Nord, le candidat FN de la 1re circonscription, Eric Dillies, a appelé à voter pour le candidat de La France insoumise, Adrien Quatennens, dès le soir du premier tour. Dans le Vaucluse, Rémy Rayé et Antonia Dufour, conseillers départementaux FN du canton de Monteux, appellent, eux, à voter soit pour Jacques Bompard (le maire d’Orange, du mouvement d’extrême droite Ligue du Sud) soit pour le candidat LR Julien Aubert, au nom de « l’union des droites ».

  • L’ancienne ministre PS qui soutient Ruffin

Dans la 1re circonscription de la Somme, François Ruffin a lui aussi reçu le soutien d’une candidate déchue, et non des moindres. La députée sortante PS et ancienne secrétaire d’Etat Pascale Boistard a appelé à voter pour le journaliste, réalisateur du documentaire Merci patron. « Il faut le plus de députés de gauche possible dans l’Hémicycle pour résister à la vague anti-sociale et anti-services publics » portée par le parti d’Emmanuel Macron, a déclaré Mme Boistard à l’AFP. Soutenu par La France insoumise, le PCF et EELV, M. Ruffin a obtenu 24,3 % des voix dimanche, contre 34,1 % à son adversaire de La République en marche (LRM), Nicolas Dumont, maire (ex-PS) d’Abbeville. Si elle sort d’un gouvernement largement honni par M. Ruffin, elle n’avait toutefois pas mâché ses mots pour critiquer, à plusieurs reprises, Emmanuel Macron et les élus qui le rallient. En campagne, elle avait toutefois prévenu que, si elle était élue, elle ne serait pas « dans le sectarisme, une opposition stérile et stupide » aux projets du gouvernement.

  • La suppléante de Mennucci derrière Mélenchon

A Marseille, Nasséra Benmarnia n’a pas attendu la décision du PS local pour donner sa consigne de vote. Selon France Info, la suppléante de Patrick Mennucci a choisi Jean-Luc Mélenchon, dont l’arrivée dans la circonscription avait pourtant suscité l’ire de son candidat. Le député PS sortant n’a d’ailleurs pour sa part pas donné de consigne vote. La fédération socialiste des Bouches-du-Rhône se réunit mardi soir pour arrêter sa position.

  • Mélenchon soutient « quatre » députés PS

Le chef de file de La France insoumise a, lui, posé les conditions de son soutien à des députés PS sortant en ballottage pour le second tour. « J’appelle à voter pour les députés du PS qui ont signé la motion de censure. (…) Il y en a quatre en tout et pour tout dans le pays », a-t-il dit sur RTL, en citant Régis Juanico (Loire) et Barbara Romagnan (Doubs). Les deux autres députés PS qui avaient signé en mai 2016 la motion de censure à laquelle il avait finalement manqué deux signatures, et qui sont qualifiés pour le second tour dimanche, sont le chef de file des frondeurs Christian Paul (Nièvre) et Yann Galut (Cher). « Quant aux autres, qu’ils méritent leurs voix, et qu’ils s’en débrouillent », a ajouté M. Mélenchon.

  • Le nouveau poignard de Hamon contre Valls

Comme un énième épisode de la guerre fratricide au PS qu’ils incarnent depuis la primaire à gauche, Benoît Hamon s’est une nouvelle fois distingué de Manuel Valls. Il soutient « sans hésiter » Farida Amrani, la candidate de La France insoumise, opposée au second tour à Manuel Valls dans l’Essonne. « C’est une candidate de gauche et Valls est aujourd’hui sur un projet politique qui s’est éloigné de la gauche, progressivement », poursuit-il, fustigeant les futures ordonnances pour réformer le code du travail.

Mais l’ancien premier ministre de François Hollande pourra, lui, compter sur le soutien… de Serge Dassault. Le sénateur Les Républicains a appelé mardi à voter pour Manuel Valls, notamment en raison des « propositions irréalistes » de la candidate LFI qui, selon lui, « font peser de graves menaces sur notre pays et n’apporteraient aucune solution concrète pour notre territoire ».

  • Balkany boude le candidat Les Républicains

Député sortant de la 5e circonscription des Hauts-de-Seine, Patrick Balkany (LR) a, lui, refusé de soutenir le candidat investi par son parti – Arnaud de Courson –, qu’il abhorre, en appelant à voter pour la candidate macroniste au second tour des législatives. Céline Calvez (LRM), arrivée largement en tête au premier tour avec 41,7 % des voix, « est une femme charmante », s’est justifié auprès de l’AFP M. Balkany, qui raillait pourtant récemment le parachutage de cette Parisienne. « Il a fallu lui envoyer un GPS ! », s’amusait-il encore il y a une dizaine de jours, en prédisant un triomphe de la droite.

Las ! « J’ai constaté que les Français souhaitent que le président ait une très large majorité », a reconnu l’homme fort de Levallois, qui a estimé « qu’il faut entretenir de bonnes relations avec le député de sa circonscription quand on est maire ». Quid de la discipline partisane ? « Je ne vois pas pourquoi je soutiendrais mon opposant de toujours, qui me critique, qui n’a aucun intérêt pour la ville », s’est-il ému, en faisant référence à Arnaud de Courson, pourtant investi par son parti LR (14,7 % des voix au premier tour).