Plaque commémorative devant la salle de concert du Bataclan, à Paris, le 13 novembre 2016. | CHRISTOPHE PETIT-TESSON / REUTERS

Le gouvernement a décidé de réorganiser l’aide aux victimes, un chantier sensible dans un contexte de menace terroriste. Ce changement au nom de « l’efficacité » suscite la colère des associations.

Le nouvel exécutif compte fusionner le Secrétariat général de l’aide aux victimes (SGAV), créé en février 2017, avec un service rattaché à la justice, le Service de l’accès au droit et à la justice et de l’aide aux victimes (Sadjav). « C’est pour garantir aux victimes et à leurs proches une action efficace et un guichet unique que le rapprochement des deux services est envisagé », a expliqué vendredi 16 juin le ministère de la justice dans un communiqué.

« La politique d’aide aux victimes doit (…) reposer sur une approche interministérielle » pour « mobiliser l’ensemble des acteurs de manière efficace et réactive », poursuit la chancellerie. François Bayrou a commencé cette semaine une série de consultations avec les associations de victimes et d’aide aux victimes.

« Inacceptable »

Mais l’annonce de cette réorganisation a été mal accueillie. Depuis 2015, la France a été frappée par une vague d’attentats sans précédent, qui ont fait 239 morts et des centaines de blessés.

« C’est inacceptable », pour Patricia Correia, mère de Precilia, tuée dans l’attentat terroriste au Bataclan, le 13 novembre 2015. « Nous, les victimes, avons besoin de soutien, les attentats sont des horreurs (…) Il est essentiel que cette mission soit poursuivie », a-t-elle déclaré à l’Agence France-Presse.

« Le Secrétariat général, c’était justement le guichet unique », un endroit où les victimes peuvent être aidées dans leurs différentes démarches administratives (santé, justice, impôts, etc.), affirme de son côté Caroline Langlade, présidente de l’association Life for Paris, créée après le 13 novembre. L’organisation a publié jeudi une lettre ouverte au président de la République.

Cette structure était réclamée par les victimes et leurs proches après les carences constatées des services publics : morts annoncées sur Twitter, morgues surchargées, parcours de prise en charge complexes et mal expliqués…

Dans une tribune adressée au gouvernement, plusieurs professionnels de la santé et de la recherche ont réclamé vendredi « des moyens en proportion des enjeux considérables », estimant les moyens actuels « insuffisants pour anticiper les conséquences de prochaines attaques ».

Moyens insuffisants

Nier la « dimension pluridisciplinaire » des victimes d’actes de terrorisme est un « recul » de leur protection, abonde le député Les Républicains Georges Fenech. Son collègue socialiste Sébastien Pietrasanta reproche à l’exécutif de « marcher sur la tête ». Une commission d’enquête parlementaire sur les attentats, que le premier présidait et dont le second était rapporteur, avait recommandé la création d’une « administration dédiée » à l’aide aux victimes.

« On détricote ce qui avait été construit précédemment. C’est un retour à l’état antérieur, qui avait prouvé sa complète inefficacité. C’est très choquant », regrette Georges Salines, le président de l’association « 13 novembre : fraternité et vérité ».

Le service rattaché au ministère de la justice « n’est pas en mesure de faire face à une crise majeure », juge Françoise Rudetzki, la fondatrice de l’association SOS-Attentats. « Il va falloir des mois avant qu’il ne soit opérationnel. Qu’est-ce qui va se passer d’ici là ? », s’interroge-t-elle.

« En additionnant les moyens humains et financiers disponibles » et en combinant le stratégique et l’opérationnel, « l’accompagnement des victimes et leur reconnaissance par la Nation ne s’en trouveront que renforcés », se défend le ministère de la justice.