Une enquête publique et une enquête criminelle devront déterminer les causes et les potentiels responsables du drame qui a endeuillé le quartier. | DANIEL LEAL-OLIVAS / AFP

Une semaine après l’incendie de la Grenfell Tower, dans l’Ouest londonien, dont le dernier bilan est d’au moins 79 morts ou présumés morts, le processus d’accompagnement des victimes a été critiqué par des élus locaux et des habitants. Victoria Vasey est la directrice du North Kensington Law Centre, un centre juridique qui accompagne des survivants du drame.

Où vivent aujourd’hui les survivants de l’incendie du mercredi 14 juin ?

Certaines des personnes avec qui nous travaillons vivent dans des chambres d’hôtels qui leur ont été temporairement attribuées. D’autres vivent chez des amis ou de la famille, car ils préfèrent ça à l’hôtel, mais ils ne peuvent pas tenir très longtemps comme cela.

D’autres personnes, qui n’étaient pas dans la tour mais dans les habitations aux alentours, ont été renvoyées chez elles. Parmi celles-ci, la plupart ont été renvoyées dans leurs appartements (pas toutes), mais sans gaz, donc sans eau chaude. Et certaines sont particulièrement traumatisées de retourner vivre dans un lieu d’où elles ont vu et vécu ce terrible incendie.

Il y a de nombreuses critiques sur la prise en charge des victimes, notamment en ce qui concerne le logement. Qu’en est-il ?

Je crois qu’il y a eu des plaintes concernant l’état des hôtels proposés, mais je n’en ai pas entendu personnellement. Vendredi 16 juin, certains clients auraient même été sommés de quitter leur chambre d’hôtel mardi 20 juin, et n’ont appris seulement la veille du mardi qu’il s’agissait en réalité d’une erreur.

Pendant ce temps, ils n’arrivaient pas à avoir des informations claires par les autorités locales, alors que ces personnes ont perdu des membres de leur famille et sont traumatisées. Ils ne devraient pas avoir à gérer ce genre de choses.

Quelle est la prochaine étape pour les victimes ?

Elle est différente pour chacun d’eux, même s’il y a des problèmes communs. Si le gouvernement leur accorde un traitement spécifique, les choses pourront aller plus vite. Ici, au centre juridique, avec bien d’autres associations, nous aidons notamment les gens à obtenir de nouveaux papiers. Cela semble très basique, mais les victimes n’ont plus de passeport, de carte bancaire, de certificat de scolarité, et toutes ces choses dont ils ont besoin pour reprendre leur vie quotidienne.

Il y a évidemment de nombreux problèmes de logement qui doivent être résolus, ainsi que des problèmes spécifiques pour les immigrés, et nous devons nous assurer que les victimes peuvent retourner correctement au travail ou parler avec leur employeur afin de prendre un peu de temps pour eux.

Tout cela, ce sont les problèmes immédiats. Les gens doivent reconstruire leur vie. Et tout ce que j’ai mentionné n’est pas important en comparaison de leur deuil. Nous essayons de rendre les processus matériels les plus rapides possibles pour que les gens puissent se concentrer sur les choses importantes.

Il y aura également des démarches légales ?

Oui, et elles feront partie, pour certaines personnes, du processus de reconstruction. Une enquête publique a été annoncée par Theresa May, des survivants et des témoins seront sollicités afin de découvrir la vérité. Il y a également une enquête criminelle que nous suivrons de près.

Craignez-vous que certaines victimes, notamment des immigrés clandestins, ne soient jamais identifiées ?

Pour être claire, nous ne savons pas si cela sera le cas pour de nombreuses personnes, le problème est justement que nous ne savons pas. Nous savons que, dans la tour, vivaient des immigrés, soit en pleine démarche administrative pour obtenir des papiers et qui ont maintenant tout perdu, et peut-être des sans-papiers.

Il y avait également des personnes qui sous-louaient un logement et n’étaient donc pas sur les listes officielles.

Nous estimons qu’il est vital que le gouvernement propose une sorte d’amnistie pour que, dans un premier temps, l’on puisse identifier toutes les personnes qui sont mortes, mais aussi que toutes les victimes puissent demander de l’aide sans craindre des représailles. Enfin, que l’enquête publique et l’enquête criminelle puissent être aussi complètes que possibles, puisque ces victimes peuvent détenir des informations importantes.