Saisie d’objets en ivoire, en 2015 à Roissy. | SARAH BRETHES / AFP

Tout se vend et tout s’achète sur la Toile, y compris des animaux en danger d’extinction ou des « produits dérivés », tels que des objets en ivoire. A la faveur de l’anonymat, ainsi que de l’absence de frontières et de réglementation, « Internet est devenu le plus grand supermarché du monde, ouvert vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept » et « ce marché librement accessible offre de nombreuses possibilités d’activités criminelles », constate le Fonds international pour la protection des animaux (IFAW).

Pour tenter de freiner ce trafic, le bureau français de l’ONG mène depuis un an une veille sur le commerce en ligne de plusieurs espèces animales – tortues d’Hermann, perroquets gris du Gabon –, mais aussi sur celui de l’ivoire ou encore de parties du corps de tigres et de léopards, très prisées sur le réseau. Des « articles » commercialisés notammnent par trois sites, leboncoin.fr, naturabuy.fr et marche.fr.

Les premier résultats de cette surveillance, portant sur dix mois (de mai 2016 à février 2017), révèlent « une tendance encourageante », se félicite l’organisation. Sur cette période et sur l’ensemble des trois plates-formes de vente en ligne, le nombre d’annonces litigieuses a en effet chuté de près de 70 %, passant d’un pic de 144, en juillet 2016, à seulement 45, en février de cette année.

La baisse est particulièrement forte pour les offres d’objets en ivoire, tombées de 96 à 10 entre les mêmes mois (- 90 %), en raison principalement de la décision de naturabuy.fr de supprimer sur son site la catégorie « objets en ivoire et en os » et d’interdire leur vente.

De même pour le perroquet gris du Gabon (Psittacus erithacus), désormais classé à l’annexe I de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (Cites) – ce qui en interdit le commerce mondial et oblige leurs propriétaires à se déclarer comme éleveurs d’agrément –, les résultats sont spectaculaires. Alors que 35 de ces oiseaux, appelés aussi « perroquet jaco », étaient proposés à la vente en septembre 2016, ils avaient quasiment disparu du Web début 2017, du fait des restrictions mises en place, cette fois, par leboncoin.fr.

Travail de sensibilisation

L’ONG y voit l’effet de plusieurs facteurs. D’abord, la réglementation plus stricte adoptée par la France, où un arrêté du 16 août 2016, révisé le 4 mai, bannit le commerce de défenses d’éléphant, de morceaux d’ivoire et de cornes de rhinocéros lorsque ces pièces sont brutes, c’est-à-dire non travaillées. Ensuite, son propre travail « d’information, de conseil et de sensibilisation à la cybercriminalité dont les espèces sauvages protégées sont victimes », auprès des sites de vente en ligne.

Un travail d’autant plus nécessaire, souligne Julie Matondo, d’IFAW-France, que « la réglementation reste trop complexe pour distinguer aisément ce qui est légal et illégal ». De fait, si le commerce de défenses et de cornes brutes est prohibé en France, il existe des dérogations pour les objets fabriqués à partir d’ivoire ou de corne avant 1947 – ils sont alors considérés comme des « antiquités » –, ou pour ceux façonnés entre 1947 et 1975, sous certaines conditions.

Aussi l’ONG appelle-t-elle les sites de vente en ligne à sensibiliser eux-mêmes leurs utilisateurs « à la problématique du braconnage et aux lois encadrant le commerce des espèces sauvages ». Tout ne passe en effet pas par la Toile, comme l’a montré, en mars, le sort d’un rhinocéros blanc abattu, dans le parc zoologique de Thoiry (Yvelines), par des braconniers venus faire main basse sur sa plus grande corne.

Un rhinocéros tué au parc zoologique de Thoiry
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